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La danse indienne et Bollywood

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Aujourd’hui, je vous propose de continuer notre découverte du vaste monde de la danse. Depuis plusieurs années, un style de danse venu d’Inde attire de plus en plus nos contemporains, il s’agit de la danse Bollywood. D’apparence dynamique, joyeuse et souvent mettant en scène des personnages typiques, cette danse se situe au confluent de diverses cultures. Cet article tente de vous faire découvrir cet univers bien particulier, un peu mystérieux et pourtant très apprécié dans le monde entier.

Avant d’aborder la danse Bollywood, jetons un oeil à la danse indienne dans son ensemble. La pluralité culturelle de l’Inde n’est plus à démontrer et cela est autant dû à l’étendue du pays qu’à son histoire. La danse classique indienne impose au danseur une forte expression émotionnelle, une dextérité importante ainsi qu’un maniement du rythme très précis. Trois formes de danse classique indienne sont les plus connues : le Bharata Natyam (originaire sur Sud-Est de l’Inde), le Kathak (originaire sur Nord) et le Kathakali (Sud-Ouest de l’Inde), une forme de danse théâtrale où la symbolique des positions de mains est prédominante. Le Bharata Natyam, pratiqué au départ exclusivement dans les temples religieux par les femmes (les devadasi), est composé de plusieurs éléments dont le maître de danse qui fait aussi office de chef d’orchestre, des rythmiques effectuées par les pieds, des gestuelles de mains (mudras) inspirées de l’iconographie de la religion hindoue, des postures de corps (karanas), etc. Il est à noter que le dieu des arts de la scène hindou est Brahmâ et que le dieu de la danse est Shiva. La danse cosmique de ce dernier exprime le cycle de la destruction et de la création de l’univers. Comme le Bharata Natyam, le Kathak est une danse généralement effectuée en solo. Il a commencé par être associé à une certaine sensualité (ce qui lui a donné mauvaise réputation jusqu’au 19e siècle). Le Kathak raconte une histoire via le mime et des rythmiques de pied complexes. Enfin, le Kathakali, originaire de la région de Kerala, une importante zone de commerce avec l’étranger où le multiculturalisme est de mise. Les danseurs ont le visage fortement peint, une bande de papier faisant office de barbe, un énorme couvre-chef et une tunique imposante, faisant ainsi référence aux divinités, démons et humains de l’ancien temps. La danse se fait pieds nus et comporte des passages où l’on prend appui sur l’extérieur du pied. Dans un programme complet de danse indienne, les trois formes peuvent se succéder au gré des musiques employées. Pour vous donner une idée de ce que j’ai décrit dans ce paragraphe, voici un exemple de Bharata Natyam : un extrait de « Pushpanjali », dansé par Savitha Sastry.

Mais venons-en au Bollywood. Le cinéma indien s’est développé depuis le début du 20e siècle un peu de la même manière que le cinéma américain. Des premiers films silencieux en noir et blanc, on est passé progressivement aux films de comédie musicale dans les années 1930 et 1940. C’est le caractère imaginaire et enluminé des films musicaux de cette époque qui a probablement aidé les populations indiennes à surmonter des périodes difficiles de l’histoire comme la Seconde Guerre mondiale et la partition des Indes en 1947. Cet âge d’or du cinéma indien dura jusque dans les années 1960 et vit naître la plupart des grands classiques. La croissance de l’aspect commercial de ces films à succès continua jusque dans les années 1970 où le terme « Bollywood » est pour la première fois utilisé. Ce néologisme est la concaténation du « B » de Bombay (ville la plus peuplée de l’Inde et de nos jours connue sous le nom de Mumbai) et de l’essentiel du mot « Hollywood », capitale du cinéma américain. Ainsi, le terme « Bollywood » se rapporte-t-il uniquement aux films créés à Bombay (et il y en a beaucoup ; ils ont souvent en Hindi, très populaires, et comportent des scènes chantées et dansées). Chaque autre région de l’Inde (et même au-delà) produisant des films est dotée d’un surnom composé selon les mêmes règles : Kollywood pour les films du quartier de Kodambakkam à Chennai (anciennement Madras, et sont en Tamil avec beaucoup d’action et de cascades), Lollywood pour les films du Pakistan tournés à Lahore, etc. Ainsi, les films Bollywood sont construits à grand renfort de costumes brillants, d’éclairages évolués, d’accessoires divers pour appuyer les chorégraphies chantées un peu comme les musicals hollywoodiens. Depuis le début des années 2000, Bollywood a été le producteur du plus grand nombre de films grand public par an (soit environ 1000 films chaque année), dépassant largement ce qui se fait aux USA.

Dans les premiers films de Bollywood, les chorégraphies étaient basées sur la danse indienne traditionnelle ou classique, dont le Bharata Natyam et le Kathak. Petit à petit, l’influence américaine s’est fait ressentir dans ces danses. En particulier, des éléments des chorégraphies venues de Broadway et des clips passant sur les chaînes de télévision émises dans le monde entier (comme MTV, chaîne musicale « pour les jeunes ») ont peu à peu été intégrés pour ajouter de l’originalité et du spectaculaire dans les productions indiennes. Ces éléments sont donc principalement issus du jazz et du hip-hop. Chaque film raconte une histoire et les chorégraphies dansées sont là pour marquer une étape de l’histoire en question, il y a donc une mise en scène particulière dans chaque chorégraphie où l’histoire intervient. Par exemple, cela peut être une scène romantique entre une femme et un homme qui se rencontrent ou encore une dispute entre deux soeurs dans un décor un peu irréel. À titre d’exemple, j’inclus ci-dessous un exemple de danse Bollywood avec le titre « Bole Chudiyaan Bole Kangana » issu du film Kabhi Khushi Kabhie Gham, tourné en 2001.

En plus des films Bollywood que l’on peut acheter sur DVD un peu partout dans le monde, il est possible de voir des chorégraphies de ce type, par exemple, dans l’émission américaine « So You Think You Can Dance » (d’ailleurs, il y en avait une dans l’émission de la saison 10 américaine diffusée la semaine dernière ; petite copie d’écran maison ci-contre…), mais aussi dans plusieurs spectacles montés par des troupes dans divers pays, dont la France. Ces spectacles à caractère « exotique » pour nous combinent des éléments favorisant l’évasion du quotidien (vêtements d’Inde, bijoux, danseuses aux cheveux longs et bruns, chants dans une autre langue, mouvements différents, etc.), constituant ainsi un certain stéréotype apprécié de nos jours. Cela explique donc l’engouement actuel pour la danse indienne moderne, et en particulier Bollywood, qui permet la création de cours dédiés dans les écoles de danse.

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