Les talons de la danse (1/3)

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Les danseuses et les danseurs utilisent tout leur corps et s’il y a une partie qui requiert tout particulièrement leur attention, ce sont bien leurs pieds. J’ai déjà eu l’occasion de parler ici de différents types de chaussures pour danser en soirée et il est évident que le sujet est vaste, selon le style de danse, selon les goûts individuels, selon que l’on soit une fille ou un garçon. En particulier, certaines danses se font mieux avec des talons (danses latines, tango argentin) alors que d’autres se pratiquent volontiers à plat ou en baskets (rock, lindy hop). Essayons donc de décortiquer la relation entre le talon de chaussure et la pratique de la danse ou, tout simplement, de la marche. Et cela concerne aussi les hommes… Un article en trois parties, tellement ce sujet méritait d’être traité en profondeur. Voici la liste des parties en question :

1. Origines historiques et marche sur talons hauts (cet article)
2. Des contraintes et des maux pour tout le corps
3. Danser sur des chaussures à talon

PARTIE 1
Les chaussures à talons : origines historiques et marche sur talons hauts

L’être humain porte des chaussures depuis environ 40 000 ans, mais le fait de porter les chaussures à talons est bien plus récent puisqu’en en trouve dans la culture de l’Égypte ancienne. Si l’on regarde dans l’histoire de France, on s’aperçoit que la mode des talons hauts provient du XVIe siècle, époque à laquelle Catherine de Médicis utilise des talons de provenance italienne pour se grandir et ainsi faire honneur à son mari le Duc d’Orléans (futur Henri II de France) qui était plutôt grand. La mode des talons envahira rapidement la cour de France aussi bien parmi les hommes que les femmes avec une surélévation pouvant atteindre une dizaine de centimètres. On trouve de cette époque des peintures italiennes montrant les chaussures à semelle haute et, ultérieurement, des chaussures où seuls les talons sont hauts dont j’ai regroupé deux exemples dans l’image ci-contre. Jusqu’à la Révolution, les talons ont été associés à la noblesse ou la richesse, ce qui explique le fait qu’ils aient quasiment disparu après 1789, laissant la place à la botte basse ou à la bottine. Ce n’est qu’au XIXe siècle que les talons reviennent à la mode chez les femmes et en particulier chez les prostituées. Il semble que les avantages esthétiques procurés par les talons hauts aient été assez rapidement recherchés par les « honnêtes femmes » afin de ne pas laisser cet avantage compétitif aux « filles de joie ». À noter que ce n’est que vers 1850 que l’on a commencé à fabriquer des chaussures droite et gauche de formes différentes correspondant à la forme de chaque pied.

À la base, les femmes mettent des talons hauts parce que cela les grandit, les amincit et que cela embellit leurs jambes. De plus, sur des talons hauts, la démarche peut devenir plus féminine, voire aguicheuse, du fait de la mobilisation des hanches pour le mouvement. Diverses causes à cela : les fesses ressortent un peu plus, la cheville en tension prolonge la jambe, les hanches sont utilisées pour marcher, le mollet est contracté et donne une belle courbure à la jambe, la nécessité de se tenir droite si l’on ne veut pas avoir l’air cruche, sans compter le rehaussement général de plusieurs centimètres. Il paraît même que la position de la jambe et de la cheville seraient un signal subliminal à caractère sexuel adressé aux mâles… Or, nombreuses sont celles qui ne parviennent pas à tenir sur des talons fins et encore moins à marcher correctement. Or, tout cela s’apprend et nécessite un certain entraînement au niveau de l’équilibre et au niveau des muscles.

S’il est conseillé à certaines personnes ayant mal au dos de marcher sur un talon de 1,5 centimètre environ au lieu de chaussures plates, la plupart des amatrices de talons privilégient un petit talon de 3 à 4 centimètres. Cela apporte quelques avantages esthétiques sans trop de désagréments (j’y viens bientôt…). Oui, mais voilà, la mode mène vers des talons plus hauts : au moins 9 ou 10 centimètres voire davantage s’il y a une semelle compensée en plus. Et l’équilibre est d’autant plus difficile que le talon est fin (comme le talon aiguille). Ces chaussures à la mode sont très jolies et ont un effet garanti sur la gent masculine, mais il est généralement déconseillé de les porter en permanence, au point de prévoir une paire de chaussures basses de rechange à passer au bout de quelques heures de talons vertigineux. Certain(e)s pourraient croire que le sujet de cet article ne s’applique qu’aux femmes, mais ce n’est pas exact. Les hommes aussi peuvent porter des talons couramment. Il existe des modèles de chaussures portés par les deux sexes et qui ont des talons plutôt élevés (et je n’utilise pas ici le terme de « hauts » puisqu’on n’y est pas encore). Parmi ces chaussures, il y a des bottes de style cowboy (santiags et boots) dont le talon peut atteindre 6 cm (elles sont souvent utilisées pour monter à cheval) et des chaussures à talon cubain dont le talon peut atteindre 4 à 5 cm (voir un article précédent dans ce blog pour plus d’informations sur ce type de talon en danse latine chez les hommes). Et je ne parle pas ici des chaussures une peu exotiques ou à plateforme qui circulaient dans les années de la fin des années 60 aux années 80.

Pour ce qui est de danser, les chaussures de ville à talon haut sont à réserver à une danse modérée et basique, un peu comme en discothèque, car elles sont faites pour la marche ou pour rester assise. En effet, la semelle de ce type de chaussures est bien souvent rigide (voire compensée), ce qui aide à maintenir un équilibre sur des talons très hauts. Ces dernières années, il y a deux styles de danse qui utilisent les chaussures à talon haut. La première discipline est la pole dance (danse sensuelle sur une barre verticale ) dont j’ai déjà parlé dans ce blog. Ici, les talons ne servent pas réellement à la danse, ils sont là pour le côté sexy et « aguicheur ». Il faut dire que les danseuses de pole dance n’ont pas souvent les pieds au sol. Le second style pourrait tout simplement s’appeler « Danse sur talons hauts » (parfois apparentée au style burlesque) et a été tout particulièrement mis à l’honneur par les Pussycat Dolls. Ces dernières ont d’ailleurs sorti un DVD d’entraînement (en anglais ou allemand). Les caractéristiques du port de talons hauts sont mises en avant comme un déhanchement prononcé ou encore une légère position cambrée. On remarque en passant dans le DVD que les filles des Pussycat Dolls ne portent pas leurs talons pour l’entraînement, seulement pour la représentation finale. Un autre exemple de performance sur des talons se trouve dans le clip « Single Ladies » de Beyoncé, rendu célèbre par de nombreuses reprises de la chorégraphie (y compris par des hommes) et en particulier dans la série Glee.

Avant de parler de danse en couple (rock, salsa, tango, etc.) sur des chaussures à talons (voir partie 3), voyons donc comment se passe une simple marche dans ces accessoires de mode… Celles qui ont directement essayé de marcher sur des talons hauts disent : « Pas facile ! » Effectivement, la marche sur des talons demande un certain équilibre et une certaine habitude, d’autant plus s’ils sont hauts. On considère généralement la classification suivante : talon bas (moins de 6 cm), talon moyen (entre 6 et 8,5 cm) et talon haut (supérieur à 8,5 cm). Pour démarrer, on peut s’habituer aux talons à la maison en marchant et effectuant des tâches de base en intérieur plutôt qu’aller directement faire un après-midi de shopping en ville ou une soirée dansante. Le mieux est d’alterner le port de talons plats et de talons hauts de manière à préserver les articulations et le dos. Car le port de talons de manière systématique n’est pas sans impact sur la santé. Je reprends ci-après une photo (je n’ai malheureusement pas noté la source) qui illustre très bien les différentes hauteurs de talons hauts (pas ceux pour danser que je montrerai dans la partie 3 de cet article) sans présence de semelle compensée ou de plateforme et qui montre bien la position de la jambe et de ses muscles en fonction de la hauteur. J’aurai l’occasion d’aborder la dernière hauteur de talon dans un prochain article qui portera sur les pointes (je crois que j’aurai alors fait le tour du sujet des pieds !).

Commençons déjà par avoir une bonne posture. Il faut en effet se tenir droit(e) et le cou dégagé : pas question de compenser la position tendue des chevilles par une flexion des genoux qui, elle-même, entraînera inévitablement un avachissement au niveau de la colonne vertébrale. En chaussures à talons, le poids du corps repose essentiellement sur le talon des pieds et tout le reste du corps doit être aligné au-dessus de ceux-ci. Ensuite, il faut relâcher les muscles ne servant pas à maintenir cette posture élégante. Au niveau des pieds, la marche en chaussures à talons hauts ressemble à la marche sans talons : on avance le pied en posant le talon (aussi haut soit-il) en premier au sol, puis l’avant du pied. Il ne faut pas avoir peur de mettre le talon sous pression, car il est normalement conçu pour résister. La différence se situe au niveau de l’engagement des abdominaux et du mouvement prononcé des hanches. Contrairement à une idée en vogue, il ne faut pas essayer de marcher comme les top models qui lèvent beaucoup les pieds en pliant les genoux et posent les pieds au sol sur une même ligne. Au contraire, il n’est pas nécessaire de lever exagérément les pieds du sol et il suffit de marcher un pied après l’autre, chacun d’eux ayant sa propre ligne parallèle à celle de l’autre. Évidemment, les deux lignes sont proches l’une de l’autre afin de ne pas avoir une démarche de cowboy… En talons aiguilles, l’équilibre peut être plus difficile à maintenir, mais cette difficulté est compensée par une musculature qu’il faut développer au niveau des jambes, des chevilles et des pieds. Et pour cela, rien de mieux que la danse…

Voici donc que s’achève la première partie (déjà longue) de cet article que j’ai essayé de faire le plus synthétique possible… et j’y passe le temps nécessaire pour m’assurer de la justesse des informations que je présente. Je vous invite à revenir sur ce blog dans quelques jours pour prendre connaissance de la seconde, puis de la troisième partie. Je suis persuadé qu’elles intéresseront beaucoup d’entre vous, particulièrement celles qui portent des talons pour danser les danses latino-américaines (cha-cha, rumba, salsa, etc.).

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