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Le shim sham

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S’il y a une routine swing (aussi appelée enchaînement de jazz roots ou authentic jazz) que tout danseur de swing doit connaître, c’est bien le shim sham, où plutôt le « Shim Sham Shimmy » qui est son nom complet d’origine. C’est un enchaînement amusant et qui s’apprend assez vite que l’on retrouve traditionnellement dans nos soirées swing contemporaines, particulièrement lorsqu’il y a un orchestre en direct.

Le shim sham shimmy est à l’origine un enchaînement de danse à claquettes. Leonard Reed et Willie Bryant sont souvent crédités de la création de cet enchaînement, évolution d’un autre enchaînement appelé « Goofus ». J’aimerais partager avec vous ce qu’écrit Constance Vallis Hill, dans son très complet livre « Tap Dancing America » à ce propos (je vous le traduis, car le livre est en anglais).
Sur le titre « Turkey in the Straw », l’enchaînement sur la durée d’un thème était dansé sur 32 mesures. […] Reed se souvient que les chorus girls aimaient tant « Goofus » qu’elles y ajoutèrent leur propre touche féminine sur le pas de sortie par un shimmy. Quand Reed et Bryant parvinrent à New York en 1931 pour se produire au Lafayette Theatre de Harlem, ils découvrirent que la danse avait déjà pris et qu’elle constituait un enchaînement de prédilection dans un club nommé le Shim Sham. En ce lieu, il était régulièrement dansé par une troupe de filles sous le nouveau nom de shim sham shimmy. […] Depuis cette époque, littéralement des centaines de personnes, ne connaissant pas les origines de la danse parmi les chorus girls, créèrent leurs propres versions du shim sham. Dansé durant tout le XXe siècle au point fort des spectacles, le shim sham est considéré comme l’hymne national de la danse à claquettes.
Par la suite, le shim sham s’étendit au monde de la danse swing et fut dansé dans les soirées dansantes à la fois par les danseurs à claquettes et par les danseurs de swing (et en particulier de lindy hop). Comme le lindy hop s’endormit durant les années rock et disco, le shim sham survécut aussi en sommeil dans le milieu des claquettes.

Voici ce que dit Frankie Manning (dans son autobiographie, « Frankie Manning, l’ambassadeur du lindy hop« ) sur le renouveau du shim sham dans les années 80.
[Le shim sham] est constitué de quatre pas de base : le shim sham, les pushes avec un crossover, tacky Annie et les half breaks. […]
Au fil des années, j’ai enseigné dans de nombreux stages de la NYSDS et j’ai assez tôt introduit le shim sham lors de leurs soirées. Quelques-uns d’entre nous, comme Norma, Buster, Betty Brisbane (une ancienne girl) et moi, commencèrent à le faire et les gens commencèrent à le connaître avant que j’enseigne le moindre shim sham en stage. Je créai une version spéciale du shim sham pour les danseurs de swing avec des freezes au lieu des breaks dans le second thème et un troisième thème de boogies et Shorty George. D’une certaine manière, nous en vînmes à le faire chaque semaine (ce que nous ne faisions pas au Savoy), toujours au début du troisième set. Au fur et à mesure, j’ajoutai de nouvelles caractéristiques comme le fait de partir en swing out après le troisième thème, avec du slow motion, des freezes et des itches. Le shim sham a vraiment pris et il est à présent dansé dans les soirées du monde entier.

Le shim sham peut être dansé sur diverses musiques swing, mais il est d’usage de le faire sur « T’Ain’t What You Do » (la version de l’orchestre de Billy May ou celle de l’orchestre de Jimmy Lunceford sont souvent préférées) car ce titre contient les breaks adéquats. On peut aussi utiliser le « Shim Sham Song » du Bill Elliot Swing Orchestra (album « Swingin’ the Century », « Tuxedo Junction » d’Erskine Hawkins ou « Stompin’ at the Savoy » de l’orchestre de George Gee (avec les annonces faites par Frankie Manning en personne). Le shim sham est aujourd’hui traditionnellement dansé à la fin d’une soirée swing. Les danseurs se mettent face à l’orchestre pour faire ce shim sham en guise de remerciement pour la musique sur laquelle ils ont dansé toute la soirée. Cela n’empêche pas que cet enchaînement puisse être dansé n’importe quand dans la soirée. Bien des danseurs de swing ont acquis le réflexe de danser un shim sham dès qu’il entendent les premières notes de « T’Ain’t What You Do ».

Pour finir cet article, voici la chorégraphie du shim sham la plus dansée, celle de Frankie Manning. Chaque ligne numérotée se danse sur 8 temps. Pour savoir ce que signifient les noms indiqués, je vous conseille soit de prendre des cours, soit de consulter mon livre « Le lindy hop et le balboa » qui comporte tous les détails pas à pas.

Partie 1
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1 Stomp off pied droit    (départ sur le 8)
2 Stomp off pied gauche
3 Stomp off pied droit
4 Break

5 Push et crossover à droite
6 Push et crossover à gauche
7 Push et crossover à droite
8 Crossover à gauche, puis à droite

9 Tacky Annie
10 Tacky Annie
11 Tacky Annie
12 Break

13 Half break
14 Break
15 Half break
16 Break

Partie 2 (avec les freezes)
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17 Stomp off pied droit
18 Stomp off pied gauche
19 Stomp off pied droit

20 Freeze  (avancer le pied droit sur le 8)
21 Push et crossover à droite (poids du corps sur pied gauche...)
22 Push et crossover à gauche (...avant de démarrer le 1er push)
23 Push et crossover à droite
24 Crossover à gauche, puis à droite

25 Tacky Annie
26 Tacky Annie
27 Tacky Annie
28 Freeze (avancer le pied droit sur le 8)

29 Half break
30 Freeze (avancer le pied droit sur le 8)
31 Half break
32 Freeze (avancer le pied droit sur le 8)

Partie 3 (les boogies)
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33 Boogie back
34 Boogie forward
35 Boogie back
36 Boogie forward

37 Boogie back
38 Shorty George
39 Boogie back
40 Shorty George

Partie 4 (improvisation)
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41 Lindy hop en couple     
   (avec le ou la partenaire le ou la plus proche...)

La vidéo qui me permet de conclure ici montre Frankie Manning en personne qui, en 2003 et à l’âge de 89 ans, conduisait un shim sham dans le Kansas, aux USA. Frankie Manning est décédé à l’âge de presque 95 ans et nous lègue sa passionnante autobiographie dont j’ai eu le plaisir d’assurer la traduction en français et l’édition française (voir plus haut). N’hésitez pas à l’acheter, ça vaut la peine de se cultiver directement auprès de personnes qui ont vécu la naissance du lindy hop au son des big bands autour des années 30.

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Lindy hop : Savoy, Hollywood, Smooth

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Les mots qui composent ce titre peuvent être inconnus à certaines personnes dansant en couple pourtant depuis des années. C’est probablement parce qu’on ne leur a jamais proposé de danser sur du jazz ou du swing de l’âge d’or des big bands. Sur ce type de musique, il est possible de danser le rock, le quickstep, le foxtrot ou le slow-fox. Cependant, quand il s’agit de l’orchestre de Count Basie ou de celui de Duke Ellington, le lindy hop est le must. Développée dans les années 20, 30 et 40 à partir de Harlem (le quartier de New York), cette danse est toujours pratiquée dans le monde entier, particulièrement depuis le renouveau du swing des années 1980. Il a fallu une bonne trentaine d’années au lindy hop pour se remettre de la déferlante du rock’n’roll après la Seconde Guerre mondiale.

Si l’on danse le lindy hop un peu partout (et de plus en plus), ce n’est pas pour autant que tout le monde danse de la même manière. C’est un peu comme pour le rock. On ne le danse pas tout à fait de la même façon dans toute la France, sans parler des variantes à 6 temps et à 4 temps. Bref, la différence par rapport au rock, c’est qu’on entend ça et là qu’il y aurait une rivalité entre le lindy « Savoy style », le lindy « Hollywood style » ou le lindy « Smooth style ». Certaines personnes considèrent les deux dernières appellations comme synonymes, alors que d’autres considèrent que ces styles sont différents même s’ils sont tous les deux issus de la côte Ouest des États-Unis). Essayons de voir ce qu’il en est.

Comme je l’ai dit, le lindy hop est né au Savoy Ballroom de Harlem à la fin des années 20. En réalité, il n’est pas apparu un beau jour comme ça. Il a été développé progressivement à partir du breakaway, du collegiate, du charleston et d’autres influences (dont des acrobates, des comiques et autres spectacles de vaudeville). Les principaux contributeurs à l’évolution de cette danse sont issus des habitués du Savoy qui fait office de plaque tournante, mais d’autres salles de danse de Harlem ont également été impliquées comme le Renaissance Ballroom ou le Cotton Club. C’est à cette époque où, chacun cherchant à épater les autres, les danseuses et danseurs faisaient preuve d’une inventivité telle que la danse pratiquée sur le swing a évolué vers ce que l’on a appelé le lindy hop, mais on peut dire qu’à l’époque, avant qu’une grande tendance ne se dégage, tout le monde avait un peu sa manière de danser le lindy hop. C’est à cette époque que des grands noms de l’histoire du lindy hop ont vécu : Shorty George, Frankie Manning, Norma Miller, Al Minns, Leon James et la troupe des Whitey’s Lindy Hoppers d’une manière générale (elle aussi basée au Savoy dans les années 30). Frankie Manning a énormément contribué à la danse et, avec la troupe que je viens de citer, il a diffusé en soirée, en spectacle ou au cinéma une certaine manière de danser de lindy hop qui est restée sous l’appellation de « Savoy style » (le style du Savoy Ballroom).

Dans cette période riche en nouveautés des années 30 et 40, un certain nombre de personnes sont passées par le Savoy et y ont découvert le lindy hop. En particulier on remarquera un certain Dean Collins qui emmena avec lui les bases du lindy hop du Savoy vers la Californie en 1936 et en particulier Los Angeles dont un quartier, Hollywood, connu pour ses studios de cinéma. Bien sûr, Dean Collins a intégré les bases du lindy et sa pratique les a transformées vers un style qui lui est propre, éliminant par exemple les bounces du style d’origine. On parle souvent du film « Hellzapoppin' » pour la scène de lindy hop dynamique et pleine d’acrobaties effectuée par la troupe des Whitey’s Lindy Hoppers. Mais ce que l’on sait moins (probablement parce que peu d’amateurs de danse ont réellement vu le film en entier…), c’est que Dean Collins danse aussi dans une autre scène de ce film, celle de « Watch the Birdie » au bord de la piscine. On peut voir Dean Collins dans presque 40 films tournés dans les années 40 avec diverses partenaires, mais essentiellement avec Jewel McGowan dont je trouve le style très élégant.

Si l’on devait définir les styles de lindy hop, on pourrait dire ceci. Le lindy hop « Savoy » est très circulaire, la connexion entre les partenaires varie au sein d’une figure afin de laisser une grande liberté à la danseuse, la pulsation rythmique (« bounces ») est très présente, et un certain nombre de figures caractéristiques sont souvent dansées (hand-to-hand charleston, mini dip,… ainsi que de nombreux pas de jazz spécifiques comme le Shorty George, Suzie Q, etc.). Le style Savoy dispose d’une manière de danser « sociale » pour les soirées et les tempos lents à mediums ainsi que d’une manière « spectacle » avec de nombreux kicks pour les démonstrations et les tempos rapides. Enfin, la position « horizontale » des danseurs est orientée vers le/la partenaire, chacun portant son propre poids sans interférer avec l’autre à l’arrêt. Le style « Savoy » conserve donc de nombreux liens avec la culture afro-américaine. Le lindy hop « Hollywood » (ou « Smooth ») se danse plutôt sur une ligne (même si ce n’était pas le cas aux origines de ce style), la connexion est très présente (effet de contrepoids dans le couple) et permet des figures très précises ; de plus, l’ensemble de la danse semble fluide dans tous les axes de l’espace et le triple step n’est pas systématique. Enfin, la position « horizontale » des danseurs est plutôt vers l’arrière, créant une tension entre les partenaires et donc une connexion plus forte. Le style « Hollywood » ou « smooth » s’est éloigné des racines afro-américaines et a donné naissance à encore d’autres variantes à base de lindy hop (où j’avoue parfois ne pas retrouver les bases). Il est à noter que l’on crédite aussi Dean Collins comme étant à l’origine du West-Coast swing qui partage un certain nombre de points communs avec le style « Hollywood ». Notez, par exemple, que le lindy turn s’appelle le whip en West-Coast swing.

Ainsi lorsque la danse swing a commencé à revenir dans les soirées dansantes à partir des années 80, on a naturellement cherché ceux qui étaient là lorsque la danse est née. C’est comme cela que l’on a redécouvert cette danse à New York (mais aussi en Californie) par le biais d’Al Minns, Frankie Manning ou Norma Miller qui ne sont devenus professeurs de danse qu’à cette époque récente. C’est à partir de ce style « Savoy » que le lindy hop s’est donc diffusé de nouveau dans le monde dans les années 80 et 90. Suite à ce renouveau, certains danseurs ont souhaité redonner vie au style originel de Dean Collins dans les années 90. Et c’est là où la dénomination de « Hollywood » est née, pour faire référence à ce style dansé dans les films d’Hollywood. Il faut noter que Dean Collins enseignait la danse en Californie. Ce style a été adopté par les amateurs de swing en recherche de nouveauté et deux « tribus » ont vu le jour en France : les Savoy et les Hollywood (on se croirait dans Koh Lanta…). En général, là où dans une grande ville il y avait des cours de Savoy, on trouvait aussi des cours de Hollywood chez le concurrent. C’est d’ailleurs toujours un peu le cas, un peu comme on a la salsa cubaine opposée à la salsa portoricaine (mais c’est une autre histoire). Cela dit, les danseurs de swing se mélangent au sein des mêmes soirées, car la musique swing reste la base du lindy hop qu’il soit Savoy, Hollywood, Smooth ou que sais-je encore. Ainsi, des figures passent d’un style à l’autre et inversement là où la technique de base ne fait pas obstacle. Car un danseur de Savoy peut avoir du mal à danser avec une danseuse d’Hollywood. En effet, cette dernière attend une connexion forte que le premier n’a pas l’habitude de donner. Apprendre les deux styles peut résoudre l’affaire, mais peut-être est-ce au détriment d’un style visuel marqué ? À chacun de voir. En tout cas, tout cela c’est du lindy hop et cette danse très riche n’a pas fini d’évoluer. À une époque, les danseurs américains de style Savoy venant en France parlaient de « that French lindy hop », ce qui montre bien que les Français ont, eux aussi, apporté leur pierre à l’édifice et ont fait évoluer le lindy hop des origines dans une nouvelle direction.

Avant de clore cet article, j’ai une pensée pour Frankie Manning, décédé il y a presque un an. Il y a un an, j’achevais aussi la traduction et l’édition française de l’autobiographie de ce personnage du lindy hop (« Frankie Manning, l’ambassadeur du lindy hop » ). Coïncidence malheureuse. Frankie n’aura pas eu l’occasion de tenir entre ses mains cette édition française à laquelle il a contribué en personne en écrivant une introduction spéciale pour les Français et en me donnant gentiment des photographies personnelles qui n’ont pas été publiées dans l’édition originale américaine. En revanche, sa co-auteur Cynthia Millman l’a vu et m’en a dit le plus grand bien. En tout cas, je suis heureux que ce livre puisse permettre aux francophones de connaître les origines du lindy hop racontées par l’un de ses créateurs ainsi que le message de paix et de tolérance que Frankie Manning ne cessait de diffuser de son vivant. Ce livre a été primé par la communauté des amateurs de musique jazz en recevant le prix du livre jazz 2009 du « Hot Club de France » et je ne cesse de recevoir des retours positifs sur cet ouvrage depuis qu’il est disponible. Cela m’encourage aussi à poursuivre un travail sur un livre présentant les figures de base du lindy hop d’un point de vue technique et qui sera disponible à la vente cet été.

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Frankie Manning en Français

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Je fais une petite pause dans les articles généraux sur le monde de la danse pour (re)parler un peu de l’autobiographie de Frankie Manning (écrite en collaboration avec Cynthia Millman) en français qui n’a jamais été aussi proche de sa sortie (en fin de mois). Comme cet article va être long, je vais le diviser en deux parties que je mets en ligne au fil de l’écriture.

Genèse
Voici un peu plus de 8 mois, je signai le contrat d’acquisition des droits de traduction et d’édition du livre « Frankie Manning: Ambassador of Lindy Hop » avec Temple University Press, l’éditeur original aux États-Unis. Je ne m’imaginais alors pas l’ampleur de la tâche qui m’attendait. Au début, je me suis uniquement focalisé sur le texte. Comme la plupart des Francophones, j’avais lu (ou plutôt survolé) le texte en américain et en avais saisi le sens global sans particulièrement m’arrêter sur chaque mot ou chaque expression que j’avais du mal à comprendre. J’avais ainsi saisi la mine d’informations sur la danse et la musique swing ainsi que la culture afro-américaine et particulièrement celle des années 1920 à 1950. Ensuite, j’ai décidé qu’il fallait faire partager tout cela aux personnes qui ne parlaient pas l’anglais. D’où mes diverses démarches (ayant duré plusieurs mois) pour quasiment harceler les détenteurs des droits pour qu’ils me les vendent. L’affaire étant lancée, j’ai donc porté successivement diverses casquettes que je vous détaille ci-après.

Traducteur
La lecture du livre original m’avait laissé apparaître que j’étais capable de me lancer dans cette tâche. En effet, mon niveau d’anglais (que je qualifie de correct mais que mes interlocuteurs étrangers disent bon), ma connaissance du monde de la danse (et de la danse swing en particulier) à un bon niveau et de celui de la musique (dont le jazz) ainsi que mon aisance dans la pratique de la langue française sont des outils qui m’ont été indispensables à ce travail. J’y ajoute, bien sûr, de multiples dictionnaires, livres, sites Internet encyclopédiques, forums de traducteurs et autres amis ayant vécu à New York et parlant l’anglais depuis leur naissance qui m’ont été extrêmement utiles. Dans ce travail, j’ai essayé de rendre le mieux possible le style de Frankie et de faire une traduction la plus neutre possible vis-à-vis du large public visé. En particulier, certains termes et anglicismes trop spécifiques au milieu du swing français n’ont pas été repris tels quels (« routine » ou « danser en social » par exemple). Ainsi, que l’on soit danseur de lindy hop ou danseur de danses de salon, que l’on soit amateur de jazz ou néophyte complet ou que l’on soit simplement intéressé par l’histoire afro-américaine ou par l’histoire édifiante d’une vie, ce texte devrait être abordable part tous.

Correcteur
Une fois le texte traduit, il faut s’assurer de la cohérence de l’ensemble en français ainsi que de la bonne application des règles élémentaires d’orthographe et de grammaire. Cette phase requiert de multiples revues de texte, corrections, reformulations, etc. sans pour autant trahir le texte d’origine. Plusieurs bonnes volontés sont été mises à contribution dans cette relecture (et je les en remercie) en plus de logiciels automatiques. Mais je dois dire que jusque dans les dernières minutes, des coquilles étaient encore trouvées. J’ai corrigé dans ma traduction des erreurs qui restaient dans l’édition en anglais, mais il y a des chances que, malgré toute l’énergie qui y a été consacrée, des fautes de frappe subsistent. En tout cas, le maximum a été fait dans le temps imparti pour produire le résultat le meilleur possible.

J’ajoute ci-dessous un lien vers un petit clip qui a servi à faire la promotion de livre lors de sa sortie aux États-Unis en 2007 et en anglais. Cela vous donnera quelques informations en plus avant d’aller plus loin dans les explications.

Je continue cet article en détaillant les différentes casquettes que j’ai dû porter pour aboutir au livre que vous allez bientôt pouvoir acheter.

Éditeur
Une fois le contrat de cession des droits pour l’Europe négocié et signé et le texte étant fait, si l’on regarde le livre d’origine, il manque encore les photos. Certaines d’entre elles proviennent directement de Frankie et Cynthia, un contrat additionnel a donc encore été réalisé. Pour d’autres photos, ce fut plus compliqué. Par exemple, l’acquisition des droits de la photo de couverture fut une véritable chasse au trésor afin de trouver qui pouvait bien donner cette licence pour l’Europe (avec le fichier image, bien entendu). Au bout du compte, cette tâche de recherche d’autorisations de reproduction aura pris énormément de temps par rapport à ce que j’avais prévu. Et encore, je ne parle pas des coûts importants que je n’avais pas anticipés pour certaines photos (dont les images rares issues de la Warner et de la RKO). Heureusement que toutes les photos n’ont pas été acquises auprès de professionnels et que j’ai ainsi pu éviter des dépenses supplémentaires qui auraient encore alourdi le prix de vente du livre.

Graphiste et informaticien
Voilà, nous avons le texte, nous avons les photos. Il nous faut à présent les assembler dans un ensemble agréable. J’ai choisi de m’inspirer du design de l’édition américaine qui me semble à la fois moderne et sympathique. J’ai donc fait un compromis entre celui-ci et la charte graphique que je suis généralement pour tous les livres que j’édite (polices de caractères définies, emplacement de certaines informations dans le livre, logo, etc.). Le résultat est plutôt probant, mais il a demandé des heures de travail pour réaliser une maquette automatiquement appliquée d’une manière homogène à tout le livre. Je précise qu’un tel résultat n’aurait pas été atteint si j’avais utilisé un simple outil de bureautique comme Word (beurk !) : comme pour tous mes ouvrages, c’est le logiciel LaTeX qui a été mis à contribution avec grand succès. Ensuite, l’intégration des photos a demandé un travail de restauration pour certaines. En effet, Frankie Manning disposait de très vieilles photos plusieurs fois pliées et ayant donc de gros défauts. Là aussi, quelques heures de travail ont permis d’atteindre un résultat correct (dans l’édition originale, les photos n’avaient pas été restaurées). Enfin, une fois cela réalisé, on s’imagine que tout est fini, mais ce n’est pas le cas. Il reste encore un gros travail pour créer un index réellement utilisable, les tables des matières, les légendes en fonction des divers crédits et copyrights, etc. D’ailleurs, l’index a demandé le développement d’un petit programme maison pour automatiser quelques derniers ajustements. Ainsi, même si au dernier moment l’emplacement d’un mot changeait, l’index était toujours recréé en conséquence avec les bons numéros de page.

Encore éditeur
Eh oui. C’est la casquette d’éditeur qui revient à cette étape. Il faut à présent traiter avec l’imprimeur pour la fabrication du livre. Contrairement à mon habitude, j’ai souhaité avoir un objet plus robuste au niveau de la reliure (mais cela a un coût et implique des contraintes techniques…). Ensuite, il faut voir comment faire entrer cela dans le budget prévisionnel. Je vous passe quelques détails, mais le résultat est la réception de plusieurs palettes de cartons contenant des centaines d’exemplaires d’un même livre. Il ne reste plus qu’à le vendre pour au moins récupérer les milliers d’euros d’investissement (déjà dépensés avant même d’avoir vendu un livre).

Petit bilan…
Jusqu’au dernier jour (et la dernière minute !), j’ai échangé des coups de téléphone et des e-mails avec les États-Unis, en particulier avec Cynthia Millman à qui j’ai fait valider tous les changements que je souhaitais apporter par rapport à l’édition d’origine. Ce travail, malgré sa complexité (décalage horaire, distance, culture et langue, recherches à distance dans des archives, investissement personnel et temps passé pour aboutir au résultat, etc.), a été pour moi très enrichissant. J’ai la satisfaction d’être le seul (en plus des auteurs) à être entré dans le texte dans ses moindres détails et à en connaître les subtilités. Un simple lecteur ne peut pas le faire, même en lisant le livre plusieurs fois. Comme le dit gentiment Cynthia dans son introduction spécialement écrite pour l’édition française, ce travail m’a passionné et je suis heureux d’en être venu à bout. À présent, je souhaite que ce livre résultant du travail de Frankie, Cynthia et moi-même puisse contribuer à faire connaître le lindy hop et ses origines à tous les francophones. Je pourrai écrire encore des pages sur ce travail intensif sur neuf mois (c’est un peu comme mon dernier né…), mais peut-être aurai-je l’occasion de le faire de vive voix si un jour je suis invité à le faire près de chez vous ?

Pour finir, j’ajoute que je prépare un petit montage vidéo promotionnel d’une trentaine de minutes que je pourrai présenter dans diverses écoles, soirées, stages sur demande afin de donner un avant-goût du livre. Je ne vendrai ni ne diffuserai ce montage vidéo pour la simple raison que je n’ai pas acquis les droits de vente DVD de ce qui s’y trouvera. Je pourrai ainsi parler du travail autour de cette édition française, montrer des photos rares (dont certaines que je n’ai pas mises dans le livre !), des extraits de films anciens que Frankie mentionne dans son récit, ainsi que quelques anecdotes non racontées dans le livre et que je tiens directement des auteurs. Bien sûr, le livre pourra être disponible à la vente à l’issue de cet exposé si les organisateurs le souhaitent.

Ah, encore un mot… La disponibilité de cette édition en français est prévue le 27 avril 2009 au prix de 35 euros (je sais ce n’est pas donné, mais je ne suis pas une major de l’édition qui tire à des centaines de milliers d’exemplaires, le tirage est donc limité et le prix de vente en tient compte). N’hésitez pas à me contacter via mon site http://www.rolland-editions.fr (page « contact ») pour plus d’informations.

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Le Savoy Ballroom

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Il n’est pas fréquent que l’on puisse précisément identifier un lieu précis comme l’origine d’une danse en particulier. Qui peut dire où la java s’est développée ? Il y a cependant des exceptions. On peut, par exemple, remonter au Palladium pour le style de salsa portoricaine du même nom. Il s’agit d’une salle de bal à deux étages ouverte à New York en 1946 où de nombreux orchestres de musique latine se sont produits, favorisant ainsi le développement du style de mambo/salsa dit « Palladium » (on 2). Alors que je viens de finir la traduction de l’autobiographie de Frankie Manning, j’ai pensé vous parler d’un autre lieu, le lieu fétiche de Frankie : le Savoy Ballroom.

Le Savoy Ballroom est une salle de danse ouverte de 1926 à 1958 située dans le quartier de Harlem à New York. Le Savoy était tout en longueur : il s’étendait sur un pâté d’immeubles tout entier, de 140th Street à 141st Street sur Lenox Avenue. Il était large d’environ 23 mètres : 1122 mètres carrés au total ! Le Savoy avait deux estrades d’orchestre côte à côte, ce qui permettait l’organisation de batailles d’orchestres mémorables entre des big bands de renom (Chick Webb, Benny Goodman, Count Basie, etc.). La piste de danse en bois d’érable occupait la moitié de l’espace. Il y avait une balustrade le long du bord. Des tables et des chaises confortables séparées par des cloisons amovibles en bois se trouvaient derrière la rambarde. L’autre moitié de la pièce était constituée d’un espace-bar décoré d’or et de bleu. J’espère obtenir les droits de reproduction d’une photo de l’intérieur, vide, du Savoy pour illustrer l’édition française de l’autobiographie de Frankie Manning (parmi une trentaine d’autres photos rares).

C’est dans cet environnement motivant que s’est développé le lindy hop en évoluant selon les personnalités des danseurs fréquentant le Savoy à partir du breakaway, du charleston et des autres danses pratiquées dans les années 1930. Les danseurs du Savoy se firent remarquer à l’extérieur de la salle lors de compétitions organisées régulièrement comme le Harvest Moon Ball. Se structurant petit à petit sous l’égide d’Herbert « Whitey » White, les Savoy Dancers devinrent les fameux Whitey’s Lindy Hoppers que l’on rencontra dans des spectacles ou des films comme « Hellzapoppin' » en 1941. Ce groupe de danseurs est à l’origine du lindy hop (que l’on qualifie parfois de « Savoy style ») et de nombreuses innovations ont été faites par eux dans ce domaine (acrobaties, danse en formation, position vers l’avant et dans le sol, twist de la danseuse, etc.). Cette ambiance propice à l’inventivité et l’expression qu’apporta le Savoy fut pour une bonne partie derrière tout cela.

Il faut bien avouer que, de nos jours, des lieux comme cela n’existent plus. Ils ont été en partie remplacés par les écoles de danse, pour une autre partie par les soirées dansantes organisées ça et là (y compris dans des dancings) et pour une autre partie par les festivals, stages ponctuels ou compétitions. Mais je ne suis pas sûr qu’il y ait un lieu en particulier qui puisse prétendre rivaliser avec ce type d’établissement proposant à la fois un espace, de la musique live et une ambiance provoquant une réelle émulation. Mais les temps changent. À l’époque du Savoy, l’essentiel des distractions après une bonne journée de travail était centré autour des salles de danse et des salles de spectacle. Aujourd’hui, il y a la télé avec ses innombrables chaînes, la Wii avec sa manette à tout faire et l’ordinateur avec ses sites Internet de tout acabit (dont ce merveilleux blog ). À chacun de choisir… Pour en savoir plus sur le Savoy, ne manquez pas la sortie de l’édition française de l’autobiographie de Frankie Manning chez Ch. Rolland Éditions à la fin du mois d’avril 2009 !

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