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Les talons de la danse (3/3)

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Les deux premières parties de cet article ont permis de comprendre en quoi consiste le port de talons qu’ils soient bas ou hauts, ainsi que l’impact que celui-ci pouvait avoir non seulement sur nos pieds, mais aussi sur la santé de notre corps tout entier. Nous voici enfin arrivés à la troisième partie qui concerne tout particulièrement le port de talons en danse, et particulièrement en danse latine. Je me base ici tout particulièrement — mais pas seulement — sur une étude publiée en 2010 (et qui, en fait, m’a donné l’idée de cet article en trois parties).

1. Origines historiques et marche sur talons hauts
2. Des contraintes et des maux pour tout le corps
3. Danser sur des chaussures à talon (cet article)

PARTIE 3
Les chaussures à talons : danser sur des talons

Selon la danse que l’on pratique, l’impact du port de talons n’est pas le même. Lors de la pratique de certaines danses, on porte peu (voir pas du tout) de talons alors que d’autres danses conviennent particulièrement au port de talons. La différence est particulièrement visible au niveau des chaussures des danseuses. Dans le domaine des danses swing, le talon est bas et large ; dans le domaine des danses standard, le talon est bas à intermédiaire et fin ; dans le domaine des danses latines, le talon est intermédiaire à haut et fin. D’autres différences sont notables entre les danses « percussives » des claquettes ou du flamenco où les semelles sont rigides comme les chaussures de ville (ou les chaussures décrites dans la première partie de cet article) et les danses en couple où les semelles sont souples (peut replier la chaussure sur elle-même). C’est d’ailleurs la semelle rigide qui permet la pose de fers pour les claquettes (un fer sur la demi-pointe, un fer sur le talon).

Si, lorsqu’on va « clubber » (« danser en club » si vous préférez), les filles peuvent porter les talons très hauts le temps d’une soirée, il n’en va pas de même pour les soirées dansantes où l’on pratique le rock, la salsa, le tango, etc. Ces danses vont au-delà du pas de marche ou du simple posé-pointé alterné. Ainsi, si des plateformes et les talons de 12 cm à la mode permettent de clubber, il est difficile de danser réellement sur des talons de plus de 8 cm (ou 3,5 pouces, unité plutôt utilisée à l’étranger). Les chaussures des danses standard (valse, etc.) ont des talons assez bas, ce qui s’explique par le fait que la pose du pied lors d’un mouvement en avant se fasse en commençant par le talon, puis le pied se déroule vers la demi-pointe. Les chaussures de danse latine pour femmes ont généralement des talons de 6,5 à 7,5 cm (2,5 ou 3 pouces) avec une semelle souple.

Ce talon plus haut s’explique par le fait qu’un mouvement en avant se fasse en posant la pointe du pied en premier au sol avant de poser le talon. C’est d’ailleurs cette technique commune aux hommes et aux femmes qui permet aux danseurs le port de chaussures à talon cubain jusqu’à 4 cm de haut. À noter qu’en tango argentin et en salsa portoricaine, les danseuses peuvent utiliser des talons plus hauts que pour les danses latines. D’ailleurs, en tango argentin, les talons sont parfois « aiguilles », car la technique de danse n’est pas caractérisée par un fort appui sur le talon, au contraire les « ochos » se font particulièrement sur les demi-pointes (cette partie de la semelle est généralement plus rigide que pour les autres chaussures de danse). Dernier détail important, les chaussures de danse ont une bride/lanière autour de la cheville pour maintenir le talon à l’arrière de la chaussure. Cet élément est important pour éviter les désagréments et pertes de chaussures…

Ce n’est pas parce que ce sont des chaussures de danse qu’il est facile de se mouvoir sur des talons plus ou moins hauts. Je me rappelle la première fois où j’ai chaussé mes chaussures latines à talon cubain et j’avoue que je n’étais pas à l’aise pour marcher. En revanche, pour danser le cha-cha, elles étaient très confortables. Lorsqu’on se tient debout immobile en chaussures à talon, c’est comme ce que j’ai évoqué dans la première partie de cet article : il faut se tenir droit, les abdominaux engagés. Si l’on essaye à présent de marcher, il faut se conformer au style de la danse que l’on souhaite pratiquer. Dans le cas précis des danses latines (cha-cha, rumba, mambo, etc.), l’avant du pied avance en premier et reste en contact avec le sol, mais il ne faut pas oublier de mobiliser les hanches afin de compléter la démarche où tout le corps avance en un seul ensemble. Pour acquérir cette technique, rien de tel que des cours de danse, évidemment ! Cela évitera sûrement quelques entorses, car il faut rester attentif à la position des pieds et ne pas se relâcher pour éviter tout problème. Avec la pratique, le renforcement musculaire (mollets) et tendineux adéquat se fait et la cheville gagne en stabilité. Il est aussi conseillé de s’exercer en se tenant en équilibre pendant plusieurs secondes sur la demi-pointe des pieds sans chaussures. Si on fait cet exercice en chaussures, il faut que le talon soit décollé du sol. Certains se rappellent sûrement cette scène de « Dirty Dancing » où Patrick Swayze et Jennifer Gray s’entraînent : vous vous demandiez pourquoi celle-ci dansait sur les demi-pointes ? Eh bien, vous avez la réponse aujourd’hui ! Lorsqu’on s’entraîne à un certain style de danse, c’est donc la répétition qui va faire entrer les bons mouvements dans notre corps. Cette répétition va également intégrer dans nos mouvements la position du pied et donc la hauteur du talon. Il est donc fortement déconseillé de changer de hauteur de talon pour travailler un même style de danse : non seulement le danseur ou la danseuse perdrait une partie de son entraînement, mais en plus il y aurait un risque d’accident ou de trébucher. Il n’y a donc pas de secret, il faut pratiquer le plus possible dans un certain contexte pour être à l’aise dans celui-ci.

Jusqu’il y a peu, les études scientifiques s’étaient intéressées à l’impact de la position du pied sur celui-ci lors de la marche dans divers types de chaussures, mais l’aspect intensif de la danse avait été négligé. Il y a quelques mois, la revue « International Journal of Experimental and Computational Biomechanics » a publié une étude (sept 2010, Vol. 1, No.3, pp. 296-305, étude conjointe de la Liverpool John Moores University en Angleterre et du Human Movement Research Center en Chine) concernant l’utilisation des talons lors de la danse et en particulier la pratique des danses latines comme le cha-cha. Les résultats de cette étude montrent que danser en portant des talons hauts — peu importe la hauteur — implique une pression disproportionnée sur les orteils. Danser en talons de 10 cm de haut (ce qui est déjà très haut pour des chaussures de latines) triplerait la pression sur les orteils alors que danser les pieds nus équilibre la pression entre le talon et les orteils.

Le fait de danser sur des talons hauts implique un déplacement de l’appui du talon vers l’avant du pied. Cette altération dans la répartition de la pression peut mener à des problèmes plantaires, des irritations ou un gonflement de la partie inférieure du pied qui entraîne des maux au niveau du talon. L’équipe scientifique conseille le port de chaussures qui fournissent un bon amortissement et un enveloppement du pied de manière à éviter ces désagréments. Ce type d’étude pourra déboucher sur l’amélioration de la conception des chaussures de danse à talons afin de réduire les effets néfastes de leur port.

D’une manière générale, les études scientifiques n’ont relevé aucun lien entre les problèmes de pieds dont souffrent les hommes et les chaussures qu’ils portent. Ce n’est pas le cas des femmes qui, elles, portent en moyenne beaucoup plus souvent des talons et des chaussures à lanières (sandales). Ainsi, à l’âge de 65 à 74 ans, les maux de pieds font partie des 20 principales raisons pour lesquelles les femmes consultent un spécialiste. Alors que ceux et celles qui ne portent pas de chaussures ont un pied plus large et un espace plus important entre le gros orteil et le suivant, les femmes portant souvent des talons hauts ont les orteils collés les uns aux autres et éventuellement un pied incurvé.

Lorsqu’on porte des chaussures à talon, il faut en prendre soin si l’on veut les faire durer un peu. De plus, un talon fin peut tout aussi bien abîmer ou rayer un sol. Pour ce genre de situation, les magasins spécialisés vendent des protections en plastique pour talon. Il y a différentes formes, adaptées à différents talons. Ces embouts sont obligatoires dans certaines salles de danse et de nombreuses compétitions. Ajoutons que lorsque l’extrémité du talon (« bonbout ») elle-même est usée, celle-ci peut être généralement remplacée sur des chaussures de danse à talon qu’elles soient pour femmes ou pour hommes. Ce remplacement à neuf restabilisera la chaussure (surtout si le talon est fin) et évitera des entorses inopportunes.

Pour conclure, je reprendrais ce qu’a dit quelqu’un dont je ne me rappelle malheureusement plus le nom : « Ginger Rogers a fait les mêmes pas de danse que Fred Astaire, mais elle les a faits sur des talons ! ». Et, pour ceux qui l’ont remarqué dans l’actualité récente, même Madonna arrive à danser le Melbourne shuffle (voir l’article décrivant cette danse dans ce blog) en talons sur le titre ‘Party Rock Anthem » de LMFAO au SuperBowl ! Voilà, nous sommes arrivés à la fin de cet article en trois parties ! Il m’a fallu compiler de nombreuses sources d’information pour son écriture en m’assurant de la fiabilité des informations. Lorsqu’on danse, il est nécessaire de ne pas s’arrêter à la simple pratique des mouvements et à l’utilisation d’accessoires a priori banals comme des chaussures. Il faut creuser un peu et s’intéresser aux à-côtés. C’est ce que j’essaye de faire et dont je partage le résultat dans une forme synthétique dans ce blog (ou dans une forme plus détaillée dans mes livres) dans des domaines variés comme l’histoire, la science et la santé, la culture, la technique, la musique, l’art, etc.

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Les talons de la danse (2/3)

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Dans la première partie de cet article, j’ai présenté le sujet du port des talons dans son ensemble, ainsi que ce que cela change par rapport au fait de ne pas porter de talons. Je continue d’approfondir ce sujet en rapport avec nos pieds tellement sollicités lors de la danse en prenant un point de vue physiologique voire médical. En particulier, je détaille quel impact le port de talons hauts a sur notre corps tout entier (et pas seulement pour nos pieds), illustrations à l’appui.

1. Origines historiques et marche sur talons hauts
2. Des contraintes et des maux pour tout le corps (cet article)
3. Danser sur des chaussures à talon

PARTIE 2
Les chaussures à talons : des maux pour le corps

Si l’on essaye d’imaginer l’impact du port de talons sur notre corps, nous vient immédiatement à l’esprit les pauvres top-models qui présentent les nouvelles collections de haute-couture et qui défilent sur les podiums sur des talons hauts de telle manière que bon nombre d’entre elles ont connu des chutes en se tordant une cheville. Cela dit, il y a des conséquences beaucoup moins visibles que ces problèmes d’équilibre, sauf pour celles qui les ont vécues. Je me base pour la suite sur une série d’études parues entre 2001 et 2005 dans des revues médicales spécialisées américaines comme le « Journal of Experimental Biology ».

Le port de talons place le pied et toutes les parties du corps qui lui sont liées dans une position qui n’est pas naturelle. Cela entraîne inévitablement des maux qu’on n’aurait pas eus sinon. De plus, le frottement ou la sollicitation répétée de certaines parties du pied ou du corps produisent aussi des conséquences locales désagréables. Passons donc en revue tout cela.

Impact sur les pieds
Commençons par l’endroit le plus évident : les pieds. Outre les entorses que j’ai mentionnées plus haut, le port de chaussures à talons implique des complications moins évidentes. Les chaussures à talon portées par les femmes sont généralement plus fines que les chaussures sans talon. Cela a pour conséquence de comprimer les muscles, tendons et petits os qui forment le pied. Les conséquences de la compression du pied dans la chaussure sont diverses : oignons, cors, etc. En particulier, on peut rencontrer des cas d’hallux valgus où le gros orteil dévie, formant ainsi une boule au niveau de l’articulation à l’intérieur du pied. Même si ce problème peut avoir des origines génétiques, le port de chaussures à talon haut (et parfois le port de chaussures tout court…) ne fait qu’agraver la situation. Il y a aussi le syndrome de Haglund est une inflammation du talon s’accompagnant de douleurs dues à la survenue d’une saillie anormale sur la partie postérieure du calcaneus (os du pied où est rattaché le tendon d’Achille) qui frotte contre la partie arrière de la chaussure. Les pieds y sont particulièrement sensibles en hiver. De plus, l’inclinaison de la chaussure à semelle rigide et talon haut fait plus ou moins glisser le pied vers l’avant, ce qui comprime tous les orteils (phalanges) contre l’avant de la chaussure (surtout si l’extrémité est en pointe) dans le cas de chaussures fermées et certains orteils contre les lanières ou le rebord de la chaussure dans le cas de chaussures ouvertes (et les orteils dépassent parfois de la chaussure). Cela peut être matérialisé par de la corne sur les articulations des orteils ou au niveau de la plante du pied. Il est donc ici important de préciser qu’il faut bien faire attention à l’adéquation de la taille des chaussures par rapport à vos pieds et que, dans les cas entre deux pointures, il existe des compléments de semelle intérieure adhésifs (aussi appelés anti-glissoires, cales talon, semelles antidérapantes, etc.) à mettre à l’intérieur de la chaussure (talon et plante). L’effet secondaire est, malgré tout et du fait de l’épaisseur ajoutée, de comprimer un peu plus le pied dans la chaussure pour le maintenir en place et cela peut entraîner des métatarsalgies (douleurs du métatarse).

Impact nerveux, musculaire, articulaire et osseux
La jolie ligne donnée aux jambes par le port de talons hauts est due en partie à la contraction des muscles des mollets. À la longue, le port très fréquent de talons hauts provoque un raccourcissement de ces muscles. Les études menées jusqu’ici montrent que le volume musculaire de personnes portant des talons de manière intensive est identique à celui de celles qui n’en portent pas ; en revanche, les fibres musculaires sont plus courtes dans le premier cas. Dans la continuité de ce raccourcissement, le tendon d’Achille a tendance à rétrécir, à s’élargir et à devenir moins souple. Cela ne pose a priori pas de problème lorsque l’on porte des chaussures à talon, mais cela devient gênant dès que l’on revient aux chaussures basses ou que l’on marche pieds nus puisque le tendon est étiré au-delà de sa position habituelle avec les talons hauts. C’est un effet pervers du fait que le corps s’adapte à l’environnement dans lequel il vit. Si le port des talons est systématique, le corps considérera qu’il s’agit de sa situation normale et il s’adapte en conséquence. Pour éviter cela, il faut donc alterner le port de talons hauts avec la marche à plat et l’étirement du tendon qui y est associée. Le port des talons hauts augmente aussi les tensions articulaires au niveau du genou, ce qui entraîne arthrose du genou due à une usure prématurée du cartilage. Il semble que le fait de porter des talons larges au lieu de talons fins ne change rien de significatif au problème. Seule la hauteur du talon compte. Une étude a montré que le port de talons pouvait augmenter la pression sur le genou de l’ordre de 26 pour cent par rapport à une situation sans talons. Et je passe sur les cas d’arthrose du genou qui est développée à la suite d’années entières à porter des talons hauts. J’aurais pu parler de ce qui suit dans le paragraphe relatif aux pieds, mais ici on parle aussi des nerfs. Le névrome de Morton est une autre affectation associée à une douleur particulièrement vive au niveau du troisième ou du deuxième espace métatarsien (entre les doigts de pieds). C’est un problème relatif au nerf digital comprimé dans des chaussures étroites.

Impact sur le dos
Lorsqu’on porte des talons hauts, la partie supérieure du corps est déséquilibrée vers l’avant. Il faut alors compenser en actionnant en permanence les muscles du dos afin de revenir à l’équilibre. En résumé, on se redresse. En cas de port prolongé de talons hauts, les muscles du dos agissent de telle manière que la lordose lombaire (courbure concave du bas du dos) s’en trouve naturellement accentuée : les fesses semblent ressortir et la cambrure du creux des reins augmente. C’est une posture qui est exagérée par rapport à la posture naturelle de départ. C’est cela qui entraîne certaines douleurs dans le dos. Pour éviter cela, il faut régulièrement s’étirer le bas du dos pour compenser les muscles qui auront tendance à rester en position rétractée.

Après avoir lu la première partie de cet article, on se dit que les talons ont beaucoup d’avantages esthétiques. En revanche, après avoir lu cette seconde partie, on se dit qu’il y a bien des inconvénients aussi. Certaines femmes portant fréquemment des talons disent d’ailleurs avoir du mal à remarcher pieds nus. Mais au final, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas porter de talons : cela veut simplement dire qu’il faut le faire en connaissance de cause et qu’il faut compenser les désagréments par un entraînement ou des exercices adéquats. Une jambe et un pied souples et bien musclés peuvent facilement être associés à des talons de toute hauteur. Un peu d’étirement (stretching) et un renforcement musculaire naturel par la danse sont donc tout à fait conseillés dans ce cas.

Pour conclure cette partie, il faut se dire que si l’on force le corps dans une certaine position répétée, ce dernier va tenter de s’adapter au mieux à la nouvelle situation selon sa constitution (et avec ses limites). C’est le principe de l’entraînement. Le problème est qu’il s’adapte parfois tellement qu’il ne peut plus spontanément revenir dans sa position naturelle d’origine, sauf si on l’entraîne dans l’autre sens. Je rementionnerai d’ailleurs le sujet de l’entraînement dans la prochaine partie de cet article qui sera consacrée au port de talons pour la danse puisqu’il est déconseillé de s’entraîner en changeant de hauteur de talon à tout bout de champ. Rendez-vous donc dans quelques jours pour la fin de ce long article consacré aux talons !

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Les talons de la danse (1/3)

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Les danseuses et les danseurs utilisent tout leur corps et s’il y a une partie qui requiert tout particulièrement leur attention, ce sont bien leurs pieds. J’ai déjà eu l’occasion de parler ici de différents types de chaussures pour danser en soirée et il est évident que le sujet est vaste, selon le style de danse, selon les goûts individuels, selon que l’on soit une fille ou un garçon. En particulier, certaines danses se font mieux avec des talons (danses latines, tango argentin) alors que d’autres se pratiquent volontiers à plat ou en baskets (rock, lindy hop). Essayons donc de décortiquer la relation entre le talon de chaussure et la pratique de la danse ou, tout simplement, de la marche. Et cela concerne aussi les hommes… Un article en trois parties, tellement ce sujet méritait d’être traité en profondeur. Voici la liste des parties en question :

1. Origines historiques et marche sur talons hauts (cet article)
2. Des contraintes et des maux pour tout le corps
3. Danser sur des chaussures à talon

PARTIE 1
Les chaussures à talons : origines historiques et marche sur talons hauts

L’être humain porte des chaussures depuis environ 40 000 ans, mais le fait de porter les chaussures à talons est bien plus récent puisqu’en en trouve dans la culture de l’Égypte ancienne. Si l’on regarde dans l’histoire de France, on s’aperçoit que la mode des talons hauts provient du XVIe siècle, époque à laquelle Catherine de Médicis utilise des talons de provenance italienne pour se grandir et ainsi faire honneur à son mari le Duc d’Orléans (futur Henri II de France) qui était plutôt grand. La mode des talons envahira rapidement la cour de France aussi bien parmi les hommes que les femmes avec une surélévation pouvant atteindre une dizaine de centimètres. On trouve de cette époque des peintures italiennes montrant les chaussures à semelle haute et, ultérieurement, des chaussures où seuls les talons sont hauts dont j’ai regroupé deux exemples dans l’image ci-contre. Jusqu’à la Révolution, les talons ont été associés à la noblesse ou la richesse, ce qui explique le fait qu’ils aient quasiment disparu après 1789, laissant la place à la botte basse ou à la bottine. Ce n’est qu’au XIXe siècle que les talons reviennent à la mode chez les femmes et en particulier chez les prostituées. Il semble que les avantages esthétiques procurés par les talons hauts aient été assez rapidement recherchés par les « honnêtes femmes » afin de ne pas laisser cet avantage compétitif aux « filles de joie ». À noter que ce n’est que vers 1850 que l’on a commencé à fabriquer des chaussures droite et gauche de formes différentes correspondant à la forme de chaque pied.

À la base, les femmes mettent des talons hauts parce que cela les grandit, les amincit et que cela embellit leurs jambes. De plus, sur des talons hauts, la démarche peut devenir plus féminine, voire aguicheuse, du fait de la mobilisation des hanches pour le mouvement. Diverses causes à cela : les fesses ressortent un peu plus, la cheville en tension prolonge la jambe, les hanches sont utilisées pour marcher, le mollet est contracté et donne une belle courbure à la jambe, la nécessité de se tenir droite si l’on ne veut pas avoir l’air cruche, sans compter le rehaussement général de plusieurs centimètres. Il paraît même que la position de la jambe et de la cheville seraient un signal subliminal à caractère sexuel adressé aux mâles… Or, nombreuses sont celles qui ne parviennent pas à tenir sur des talons fins et encore moins à marcher correctement. Or, tout cela s’apprend et nécessite un certain entraînement au niveau de l’équilibre et au niveau des muscles.

S’il est conseillé à certaines personnes ayant mal au dos de marcher sur un talon de 1,5 centimètre environ au lieu de chaussures plates, la plupart des amatrices de talons privilégient un petit talon de 3 à 4 centimètres. Cela apporte quelques avantages esthétiques sans trop de désagréments (j’y viens bientôt…). Oui, mais voilà, la mode mène vers des talons plus hauts : au moins 9 ou 10 centimètres voire davantage s’il y a une semelle compensée en plus. Et l’équilibre est d’autant plus difficile que le talon est fin (comme le talon aiguille). Ces chaussures à la mode sont très jolies et ont un effet garanti sur la gent masculine, mais il est généralement déconseillé de les porter en permanence, au point de prévoir une paire de chaussures basses de rechange à passer au bout de quelques heures de talons vertigineux. Certain(e)s pourraient croire que le sujet de cet article ne s’applique qu’aux femmes, mais ce n’est pas exact. Les hommes aussi peuvent porter des talons couramment. Il existe des modèles de chaussures portés par les deux sexes et qui ont des talons plutôt élevés (et je n’utilise pas ici le terme de « hauts » puisqu’on n’y est pas encore). Parmi ces chaussures, il y a des bottes de style cowboy (santiags et boots) dont le talon peut atteindre 6 cm (elles sont souvent utilisées pour monter à cheval) et des chaussures à talon cubain dont le talon peut atteindre 4 à 5 cm (voir un article précédent dans ce blog pour plus d’informations sur ce type de talon en danse latine chez les hommes). Et je ne parle pas ici des chaussures une peu exotiques ou à plateforme qui circulaient dans les années de la fin des années 60 aux années 80.

Pour ce qui est de danser, les chaussures de ville à talon haut sont à réserver à une danse modérée et basique, un peu comme en discothèque, car elles sont faites pour la marche ou pour rester assise. En effet, la semelle de ce type de chaussures est bien souvent rigide (voire compensée), ce qui aide à maintenir un équilibre sur des talons très hauts. Ces dernières années, il y a deux styles de danse qui utilisent les chaussures à talon haut. La première discipline est la pole dance (danse sensuelle sur une barre verticale ) dont j’ai déjà parlé dans ce blog. Ici, les talons ne servent pas réellement à la danse, ils sont là pour le côté sexy et « aguicheur ». Il faut dire que les danseuses de pole dance n’ont pas souvent les pieds au sol. Le second style pourrait tout simplement s’appeler « Danse sur talons hauts » (parfois apparentée au style burlesque) et a été tout particulièrement mis à l’honneur par les Pussycat Dolls. Ces dernières ont d’ailleurs sorti un DVD d’entraînement (en anglais ou allemand). Les caractéristiques du port de talons hauts sont mises en avant comme un déhanchement prononcé ou encore une légère position cambrée. On remarque en passant dans le DVD que les filles des Pussycat Dolls ne portent pas leurs talons pour l’entraînement, seulement pour la représentation finale. Un autre exemple de performance sur des talons se trouve dans le clip « Single Ladies » de Beyoncé, rendu célèbre par de nombreuses reprises de la chorégraphie (y compris par des hommes) et en particulier dans la série Glee.

Avant de parler de danse en couple (rock, salsa, tango, etc.) sur des chaussures à talons (voir partie 3), voyons donc comment se passe une simple marche dans ces accessoires de mode… Celles qui ont directement essayé de marcher sur des talons hauts disent : « Pas facile ! » Effectivement, la marche sur des talons demande un certain équilibre et une certaine habitude, d’autant plus s’ils sont hauts. On considère généralement la classification suivante : talon bas (moins de 6 cm), talon moyen (entre 6 et 8,5 cm) et talon haut (supérieur à 8,5 cm). Pour démarrer, on peut s’habituer aux talons à la maison en marchant et effectuant des tâches de base en intérieur plutôt qu’aller directement faire un après-midi de shopping en ville ou une soirée dansante. Le mieux est d’alterner le port de talons plats et de talons hauts de manière à préserver les articulations et le dos. Car le port de talons de manière systématique n’est pas sans impact sur la santé. Je reprends ci-après une photo (je n’ai malheureusement pas noté la source) qui illustre très bien les différentes hauteurs de talons hauts (pas ceux pour danser que je montrerai dans la partie 3 de cet article) sans présence de semelle compensée ou de plateforme et qui montre bien la position de la jambe et de ses muscles en fonction de la hauteur. J’aurai l’occasion d’aborder la dernière hauteur de talon dans un prochain article qui portera sur les pointes (je crois que j’aurai alors fait le tour du sujet des pieds !).

Commençons déjà par avoir une bonne posture. Il faut en effet se tenir droit(e) et le cou dégagé : pas question de compenser la position tendue des chevilles par une flexion des genoux qui, elle-même, entraînera inévitablement un avachissement au niveau de la colonne vertébrale. En chaussures à talons, le poids du corps repose essentiellement sur le talon des pieds et tout le reste du corps doit être aligné au-dessus de ceux-ci. Ensuite, il faut relâcher les muscles ne servant pas à maintenir cette posture élégante. Au niveau des pieds, la marche en chaussures à talons hauts ressemble à la marche sans talons : on avance le pied en posant le talon (aussi haut soit-il) en premier au sol, puis l’avant du pied. Il ne faut pas avoir peur de mettre le talon sous pression, car il est normalement conçu pour résister. La différence se situe au niveau de l’engagement des abdominaux et du mouvement prononcé des hanches. Contrairement à une idée en vogue, il ne faut pas essayer de marcher comme les top models qui lèvent beaucoup les pieds en pliant les genoux et posent les pieds au sol sur une même ligne. Au contraire, il n’est pas nécessaire de lever exagérément les pieds du sol et il suffit de marcher un pied après l’autre, chacun d’eux ayant sa propre ligne parallèle à celle de l’autre. Évidemment, les deux lignes sont proches l’une de l’autre afin de ne pas avoir une démarche de cowboy… En talons aiguilles, l’équilibre peut être plus difficile à maintenir, mais cette difficulté est compensée par une musculature qu’il faut développer au niveau des jambes, des chevilles et des pieds. Et pour cela, rien de mieux que la danse…

Voici donc que s’achève la première partie (déjà longue) de cet article que j’ai essayé de faire le plus synthétique possible… et j’y passe le temps nécessaire pour m’assurer de la justesse des informations que je présente. Je vous invite à revenir sur ce blog dans quelques jours pour prendre connaissance de la seconde, puis de la troisième partie. Je suis persuadé qu’elles intéresseront beaucoup d’entre vous, particulièrement celles qui portent des talons pour danser les danses latino-américaines (cha-cha, rumba, salsa, etc.).

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Le clogging

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Si l’on est amateur de danse à claquettes, on reconnaît aisément les claquettes irlandaises (Lord of the Dance, par exemple) et les claquettes américaines qui sont particulièrement identifiables. Les claquettes évoluent et l’on y incorpore aujourd’hui des mouvements et techniques issus d’autres disciplines comme le hip-hop ou les percussions corporelles (body drumming). Mais il existe encore de nos jours une autre manière de faire des claquettes qui existe depuis des lustres et qu’on appelle le clogging. Découvrons donc cela ensemble…

La définition du nom anglais « clog » fait référence à une un poids attaché à la jambe d’un animal pour freiner ses mouvements. Une autre définition fait référence à une chaussure lourde à semelle de bois assimilable à un sabot. Cela revient plus ou moins à la première définition, car il est sûr que des sabots ne permettent pas particulièrement de remporter le 100 mètres haies… Ajoutons que l’une des définitions du verbe « to clog » est le fait de danser le clogging (ou le clog, diront certains). À première vue, le clogging serait donc une manière de danser avec des sabots aux pieds. Mais ne nous arrêtons pas là : on ne porte plus beaucoup de sabots de nos jours.

Le clogging est une forme de danse folklorique américaine originaire de la région des montagnes Appalaches (nord-est des USA) et que l’on appelle aussi « hillbilly tapdancing » ou « flatfooting ». Ces dénominations alternatives donnent bien le ton puisque qu’on y devine une notion « campagnarde » pour la première et l’image de « taper du pied à plat » pour l’autre. En réalité, le clogging des Appalaches est issu d’un mélange de danses apportées par les premiers colons et fut très populaire sur le sol américain dès le 18e siècle. Les Irlandais et les Écossais ont apporté la gigue, les Anglais on apporté leurs jeux de pieds, etc. On dit même que la démarche lourde de certaines danses indiennes avec leurs tambours aurait inspiré le clogging. Dans sa région d’origine, les pas de clogging peuvent varier d’une vallée à l’autre et les danseurs de clogging sont fiers de leurs « spécialités régionales ». Cela dit c’est la standardisation qui a fait que le clogging a pu se propager plus facilement et attirer de nouveaux adeptes au-delà des Appalaches.

Les cloggers portent des vêtements s’approchant plutôt des vêtements portés par les danseurs de square dance, autrement dit une allure plutôt Western (jeans et chemises à carreaux). Côté chaussures, les cloggers portent des chaussures à semelle dure équipées de « steel taps » (de fers) spécifiquement lestées. À la différence des claquettes habituelles, les fers sont composés de deux plaques de métal qui s’entrechoquent à chaque pas et chaque impact avec le sol. Autant dire que ça fait du bruit et que l’image des sabots dont je parlais en début d’article n’est pas loin. Pour un clogger, autrement dit un danseur de clogging, l’essentiel n’est pas de porter des vêtements sophistiqués, ni de faire des pas compliqués. Il faut juste garder le rythme !

Les groupes de cloggers dansent habituellement en ligne, un héritage des danses irlandaises combiné au fait que le clogging s’est initialement développé en tant que danse en solo. On peut différencier essentiellement deux styles de clogging. Il y a tout d’abord le style dit « precision » où des musiques du hit-parade ou traditionnelles servent de base à des enchaînements de pas connus et tout le monde fait la même chose en même temps. Il y a aussi le style dit « freestyle » où tout est improvisé et qui est donc généralement dansé en solo. C’est le premier style qui se prête évidemment le mieux aux démonstrations. D’ailleurs, le clogging a été présenté en démonstration lors des JO d’Atlanta en 1996.

Le motif de base du clogging est le basic clog, que l’on peut décrire comme un « shuffle, step, ball change » dans le language des claquettes. Les cloggers ne le décrivent pas comme cela : par exemple, le shuffle porte le doux nom de « double toe step » (que l’on peut traduire par « double avec la pointe du pied »). Par ailleurs, le « ball » correspond souvent à une bascule du poids du corps vers l’arrière (comme le temps 1 du pas de base du rock à 6 temps).

De nos jours, on danse le clogging sur à peu près tous les styles musicaux, mais les musiques du top 40 country américain sont souvent utilisées pour créer des enchaînements chorégraphiques. C’est à la base d’enchaînements chorégraphiques que se font les compétitions de clogging qui existent depuis plusieurs années aux USA mettant en vedette de style dit « precision ». Lorsqu’on regarde ces compétitions, on distingue différentes tendances qui vont du folklorique (avec les costumes de style cowboy), au hip-hop (où l’on retrouve des mouvements de bras issus du hip-hop) en passant par le style gymnique (où l’on retrouve des mouvements de bras à la manière du rock sauté). Pour illustrer mon propos, je vous propose une vidéo où les Southern Belles Clogging se produisent en compétition en 2007.

Je n’ai pas connaissance d’une quelconque pratique du clogging en France où les claquettes américaines et irlandaises sont bien développées. J’ai découvert cette manière de danser dans l’émission américaine « So You Think You Can Dance » que j’ai déjà plusieurs fois évoquée ici. En tout état de cause, comme les claquettes que nous pratiquons de nos jours prennent partiellement leurs origines dans le clogging américain, il me semble intéressant de connaître quelques éléments sur cette discipline. S’il y a d’autres disciplines que vous aimeriez découvrir dans ce blog, glissez-moi donc un petit mot et je programmerai un article sur le sujet (non sans m’être sérieusement documenté sur le sujet au préalable comme d’habitude !).

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L’habit du moine et du danseur

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Les beaux jours reviennent et chacun remplace petit à petit les gros pullovers à col roulé par une garde-robe plus courte et estivale. Sur les pistes de danse, cela ne se remarque pas toujours, car il y fait souvent chaud quand on bouge sans arrêt (petit appel du pied aux propriétaires de salles ou écoles : une clim’ performante ou, à défaut, une bonne ventilation est réellement obligatoire lorsqu’il commence à faire beau). Lorsqu’on regarde la foule bigarrée des danseurs lors d’une soirée dansante, on remarque qu’il y a de tout : de la robe démodée au pantalon chic aux mouvements fluides ou de la chemise du dernier cri au t-shirt trop grand et bariolé.

Qui n’a jamais souri un jour en regardant un gringalet pas très bien fait de sa personne portant des vêtements de sport high-tech et des lunettes de star s’essouffler au bout de 5 petites minutes de course ? Ce n’est pas vraiment le gringalet qui nous prête à sourire ; c’est plutôt le décalage entre ce qu’il semble être et ce qu’il veut paraître qui nous interpelle. On connaît bien l’adage « l’habit ne fait pas le moine » qui nous suggère que ce n’est pas parce qu’on s’habille comme les sportifs de haut niveau qu’on va automatiquement en devenir un. Les apparences sont parfois trompeuses… Mais revenons à la danse et voyons si l’habit ne fait pas le danseur.

D’un premier abord, nous dirons qu’il y a deux principales manières de concevoir l’habillement quand on est danseuse ou danseur qui fréquente les soirées dansantes. La première est une vision sportive : la danse est vue comme une activité physique et, tout comme un sportif, il faut que le vêtement soit fonctionnel avant tout. Ici, on trouve ceux qui utilisent les tissus « respirants », qui disposent d’une petite serviette accrochée à la ceinture ou qui privilégient le t-shirt simple à la chemise. La seconde manière de voir les vêtements quand on danse est d’ordre esthétique. La danse est perçue comme une belle chose où il faut faire honneur à son partenaire ou sa partenaire et paraître soi-même au mieux de sa forme. Là, on parle de maquillage waterproof, de chemise à la mode ou de robes avenantes. Ces deux visions de la chose sont aux antipodes l’une de l’autre et il faut trouver le juste milieu. En réalité, une robe très jolie, mais nécessitant en permanence un réajustement pour qu’elle ne laisse pas trop voir un décolleté n’est pas idéale et, dans le même registre, un chapeau n’est pas un accessoire très commode pour danser. De même, la serviette éponge pendouillant d’une poche n’est pas toujours très commode quand on souhaite avoir toute liberté de mouvement. Je prends volontairement quelques cas très marqués pour bien faire comprendre la chose. Les danseuses et danseurs expérimentés essayent donc en général de trouver le juste milieu entre élégance et fonctionnalité des vêtements.

Ainsi, peut-on s’interroger sur le fait qu’une danseuse de tango argentin danse mieux en talons très hauts, qu’une danseuse de salsa danse mieux avec un pantalon fluide ou une robe faisant des vagues au moindre mouvement, ou enfin qu’un danseur de lindy hop danse mieux avec un pantalon extralarge coupé style années 30 ? N’est-ce pas uniquement lié à l’apparence ? La réponse n’est pas si claire que cela. En effet, la danseuse de tango argentin est susceptible de souvent pivoter sur l’avant de ses pieds, de s’appuyer en avant sur son danseur, etc. et une position où l’appui est naturellement porté sur les demi-pointes lui facilite le travail. Côté esthétique, il est clair que les talons affinent les jambes et rendent la danse plus jolie. Dans le second exemple, la danseuse de salsa peut se sentir davantage « danseuse latino » avec des vêtements qu’elle va sentir bouger sur ses jambes. Pour danser la salsa, la tenue estivale est de rigueur et l’on se sent davantage l’envie de se déhancher et de tourner si les vêtements que l’on porte font penser aux Caraïbes. Enfin, le danseur de lindy hop sera incommodé s’il danse dans un pantalon moulant du fait de sa position aux jambes légèrement fléchies. Celui-ci sera donc bien mieux dans un pantalon large qui, de surcroît, masque sa position fléchie et améliore sa silhouette et l’allure de sa danse (mais on n’est pas obligé de porter la veste comme dans la photo ci-contre…). L’effet de ces vêtements bien choisis est par conséquent à la fois pratique, esthétique et psychologique.

Dans ces quelques exemples, il semble donc bien que l’habit fasse une partie du danseur ou, pour être plus exact, l’habit favorise une danse dans un certain style. Il est difficile d’imaginer des compétitions de danse sportive où les danseuses de latine auraient de grandes robes à plumes pour danser le cha-cha ou la samba et les danseuses de standard auraient de petites robes échancrées pour danser la valse ou le slowfox. Il est par ailleurs clair qu’un très mauvais danseur restera un très mauvais danseur (tant qu’il n’aura pas progressé, évidemment), peu importe son vêtement, tout comme un excellent danseur restera excellent même dans des vêtements peu seyants. L’endroit où se fait la différence se situe donc au niveau intermédiaire (c’est ce qu’on pourrait appeler le « danseur moyen », et il y en a beaucoup !) où les vêtements peuvent contribuer à la danse, à l’état d’esprit du danseur, voire même à détourner l’attention du public qui verra donc davantage l’aspect général que les pas de danse. Il restera toujours à ceux qui ne savent pas bien danser, et qui veulent garder tout le bénéfice d’une belle allure vestimentaire dans une salle de danse, l’option de rester sur le bord de la piste et de paraître occupé à autre chose. Mais on finira tôt ou tard par se poser des questions et se rendre compte de la supercherie…

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Claquettes ou tap dance

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Dans le domaine des danses en couple, il est une discipline qui est souvent associée aux traditionnels foxtrot, lindy hop ou autres danses pratiquées sur du jazz. Je fais référence ici à ce que beaucoup appellent « les claquettes » et que d’autres préfèrent voir appeler « la danse à claquettes », traduction directe de son nom en anglais « tap dance ». Car « faire des claquettes », ce n’est pas simplement faire de petits sons avec ses pieds, c’est plutôt mêler danse et percussions. C’est ce que je vous propose de découvrir aujourd’hui…

La danse à claquettes est issue de plusieurs pratiques allant du « clogging » anglais (sorte de gigue dansée en sabots à l’origine) aux danses et rythmes africains en passant par la danse traditionnelle irlandaise. Que ce soit du côté des origines européennes ou de celui des origines africaines, on retrouve un point commun dans le fait que les gens accompagnaient leur travail du son de leurs pieds frappés au sol. Bien sûr, entre ces cultures, les rythmes sont différents et les traditions aussi. C’est cela qui a initié la diversité des pas que nous connaissons aujourd’hui. La rencontre s’est opérée à la fin du XIXe siècle et au début des années 1900 aux États-Unis avec, d’un côté, les ouvriers émigrants venant d’Angleterre et d’Irlande et, de l’autre côté, les esclaves africains.

Les mouvements qui scandaient le travail passèrent de la vie à la scène par le biais des « Minstrel Shows » dont j’ai parlé dans un autre article de ce blog. Les Blancs grimés en Noirs faisaient le spectacle en imitant ces derniers. Jusque dans les années 1920, les frappes sont faites grâce à des semelles en bois en deux parties (sur des chaussures de cuir), mais devant l’usure rapide de celles-ci, on les remplaça définitivement par des plaques de métal, les fers (ou taps en anglais), qui pour autant sont de nos jours en aluminium. Pour l’anecdote, notez que les moins fortunés fixaient des capsules de bouteille sous leurs chaussures à la place de vrais fers. Les spectacles de danse à claquettes devinrent de plus en plus techniques et étonnants grâce au Vaudeville et à la concurrence entre les diverses salles de spectacle aux USA. Le mélange des styles de numéros (comiques, acrobaties, danseurs de caractère, etc.) contribua à l’enrichissement des numéros de danse à claquettes par l’importation de nouveaux mouvements de plus en plus spectaculaires et innovants. À cette époque, il était courant de se faire chorégraphier un numéro de claquettes par un professionnel et de l’apprendre en cours particuliers avant de le produire en spectacle. De cette période, on connaît de nombreux artistes comme Bill Robinson, Honi Coles, John Bubbles, les Nicholas Brothers, etc.

La danse à claquettes devint de plus en plus populaire avec les comédies musicales hollywoodiennes à partir des années 30 où des vedettes comme Fred Astaire, Ginger Rogers, Gene Kelly, Ann Miller, Eleanor Powell ou Shirley Temple firent de cette discipline une part essentielle du rêve américain. Ils y ajoutèrent des pas de danse classique et la musique jazz était omniprésente dans leurs numéros qui comportaient aussi du chant. De nombreux films cultes de cet âge d’or sont connus de tous comme « Top hat » (1935)Acheter sur Amazon, « Broadway Melody of 1940 »Acheter sur Amazon, « Chantons sous la pluie » (1952)Acheter sur Amazon, etc.

Comme d’autres manières de danser de l’époque swing, la danse à claquettes passa de mode avec la déferlante du rock’n’roll après la Seconde Guerre mondiale. Mais le renouveau est là de nos jours grâce au retour de l’attrait du public pour les danses traditionnelles et folkloriques (comme les danses irlandaises) ainsi que pour le jazz et le swing. Je dirais, pour simplifier, qu’on parle aujourd’hui de deux principales catégories dans la pratique de la danse à claquettes :

  • les claquettes irlandaises où l’essentiel de l’attention du danseur est portée sur les frappes et que l’on retrouve dans des spectacles comme « Lord of the Dance »Acheter sur Amazon ;
  • les claquettes américaines (au début correspondant au style Broadway et comédies musicales où les postures et déplacements de tout le corps sont importants) qui, de nos jours, correspondent à tout ce qui n’est pas inclus dans les claquettes irlandaises.

Il est intéressant de noter des pratiques spécifiques de la danse à claquettes comme le soft shoe, pratique légère, classe et dansée en chaussures sans fers (le sol est alors parsemé de sable pour qu’il y ait tout de même du bruit…) ou encore le hoofing aux frappes très intenses et complexes. Aux danseurs à claquettes, il est aussi possible d’associer, pour être complet, les percussionnistes qui font feu de tout bois… ou plutôt bruit de tout support comme les artistes du spectacle « Stomp »Acheter sur Amazon puisqu’ils incorporent des claquettes dans leurs numéros. Plus récemment, des artistes comme Gregory Hines ou Savion Glover (photo ci-contre) ont continué ou continuent de faire rêver le public américain (et les autres !) par leur dextérité et de faire évoluer la discipline. Ce dernier fait en particulier partie de ceux qui mêlent les rythmiques hip-hop à la pratique de la danse à claquettes. On voit aussi des innovations en terme de spectacle avec les « Tap Dogs », ces Australiens qui sont loin du sage costume et du chapeau melon de Bill « Bojangles » Robinson dans les années 30… Ce danseur à claquettes a marqué l’histoire à tel point que le « Tap Dance Day » (la journée de la danse à claquettes) est fêté aux États-Unis depuis 1989 le jour de son anniversaire, le 25 mai.

Les claquettes sont liées aux danses en couple de plusieurs manières. Tout d’abord, nous avons tous en tête l’image de Fred Astaire dansant avec ses partenaires (voir un autre de mes billets sur le sujet dans ce blog) à Hollywood où, entre deux refrains et trois pas de foxtrot, les danseurs s’adonnent à des rythmiques qui semblent sortir naturellement de leurs semelles. On a même pu assister à des claquettes sur patins à roulettes dans « Shall we dance »Acheter sur Amazon (« L’Entreprenant Monsieur Petrov » en version française et non le film avec Richard Gere que je vous présente dans un autre article). Donc voilà, la danse à claquettes est particulièrement esthétique en couple, il est simplement dommage que cette manière de les pratiquer ait un peu été oubliée de nos jours. Mais il est à noter que la danse à claquettes continue de se développer non seulement sous l’impulsion d’Américains, mais aussi d’Européens dont certains ont acquis une réputation excellente. Second argument, plus technique, le développement des qualités de danseur à claquettes permet d’améliorer son équilibre, son aisance et ses jeux de jambes dans les danses à deux comme le rock, le lindy hop,… et même la valse. Je l’ai moi-même vérifié dans ma manière de danser les danses à deux au fil de mon apprentissage de la danse à claquettes et je recommande à tout le monde de faire au moins une année (voire deux) de claquettes pour cela. Et (qui sait ?) peut-être ne pourrez-vous plus vous en passer, tout comme le petit manchot empereur du film d’animation « Happy Feet » (2005)Acheter sur Amazon qui ne peut s’empêcher de faire naturellement des claquettes depuis sa naissance…

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Chaussures pour danser

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Les mots pour nommer les chaussures sont nombreux. On y trouve les sages souliers d’antan, les godillots un peu rustiques, les vulgaires godasses, les plus modernes grolles, les sophistiqués escarpins, les antiques cothurnes, les grossiers écrase-merdes ou encore les simples tatanes ; et j’en passe ! Si le vocabulaire est riche, on pense bien que les utilisations sont tout aussi nombreuses. Les danseurs les plus aguerris n’hésitent pas à pousser le luxe jusqu’à changer de chaussures selon le type de danse qu’ils souhaitent pratiquer ou encore en fonction du type de sol. Alors cette manie est-elle bien fondée ?

Imaginez-vous, mesdames, mesdemoiselles, à danser le rock dans une soirée animée. L’ambiance monte tellement qu’à un moment donné votre danseur vous glisse à l’oreille : « Attention, acrobatie ! » Et là, c’est le drame ! Vous pensez à votre paire d’escarpins en nubuck avec le petit talon adéquat et refusez l’acrobatie au grand dam de votre partenaire. Eh oui, acrobatie ne rime pas avec talons hauts. Danser le rock se fait donc de préférence avec des chaussures plates voire même des baskets pour atténuer les petits chocs dus au piétinement continuel ou aux réceptions des petites acrobaties. Il existe même des chaussures spéciales avec des semelles compensées microaérées réellement très légères et pratiques. Et le jive ? allez-vous me dire. Effectivement, les danseuses de jive portent les mêmes chaussures à talons que pour les autres danses latines. Mais il faut savoir que le règlement de cette danse de compétition interdit les acrobaties : les partenaires doivent continuellement être en contact avec le sol.

Parlons-en, des compétitions. La danse sportive comporte deux catégories de danses : les danses latines et les danses standard. Les danseuses de danses latines (cha-cha, etc.) ont souvent des chaussures ouvertes (la sandale, un peu style été) avec un talon moyen (6,5 cm par exemple) alors que, pour les danses standard (valse, etc.), elles ont plutôt des chaussures fermées (l’escarpin, un peu style hiver pour caricaturer). Les danseurs ont aussi le choix : les chaussures standard au talon bas ou les chaussures latines au talon cubain (environ 4 cm de haut). Pour la danseuse comme pour le danseur, la semelle souple des chaussures est en cuir retourné afin de leur conférer un meilleur appui sur un parquet de bois (cela ne sert à rien si vous dansez sur du carrelage, évidemment). Il est évident que ces chaussures ne peuvent pas être portées à l’extérieur : elles ne sont pas faites pour cela. Comme les poussières et la saleté adhèrent facilement à la semelle, on la gratte de temps en temps avec une brosse en métal pour retrouver les qualités souhaitées.

En plus des cas de figure que je viens de détailler, il ne faut pas oublier que, pour faire de la danse à claquettes, il faut des chaussures à semelle rigide équipées de fers (mais on fait aussi à présent des sneakers à fers…), sinon ça fait beaucoup moins de bruit, forcément… Les danseurs de swing/lindy hop sont répartis entre ceux qui préfèrent les chaussures de villes traditionnelles (souvent bicolores noires et blanches) et ceux qui préfèrent les chaussures de sport avec leur semelle souple. Dans le premier cas, les glissades (slides) sont plus faciles et, dans le second, les pas sont bien amortis et la sensation des bounces du lindy est facilitée. À chacun sa préférence. Dans un autre registre, les danseuses de tango argentin et de salsa affectionnent des chaussures à talons très hauts. Leurs jeux de jambes sont ainsi mis en valeur et cela participe au style de la danse. Pour le tango, le poids du corps peut ainsi être facilement porté sur l’avant du pied alors que pour la salsa, le déhanché est augmenté.

Bien sûr, si vous débutez, n’investissez pas dans de multiples paires. Attendez d’avoir atteint un niveau minimal pour que cela serve réellement à quelque chose. D’autant plus que les chaussures de danse coûtent plus cher que des chaussures de ville que vous utiliserez en plus lors d’autres occasions. Pour démarrer, de simples chaussures de ville (ou des baskets pour le rock) peuvent convenir.

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