Cet été, en prenant l’avion, j’ai mis dans mon sac un livre au format poche, un récit de voyage de Jean Cocteau : « Mon premier voyage » , sous-titré « Tour du monde en 80 jours ». J’avais décidé de me changer les idées et de voyager encore plus loin que mon billet ne m’autorisait et la danse n’était pas censée faire partie des bagages cabine. Mais le hasard n’est pas toujours complice d’un éloignement, même temporaire, d’une passion de tous les jours…
« Mon premier voyage » a été écrit en 1936 par Jean Cocteau, que personnellement je ne connaissais que de réputation et par l’intermédiaire du film « La Belle et la Bête » qu’il réalisa en 1946 avec Jean Marais et Josette Day. Le concept de départ est simple : il s’agissait, pour Jean Cocteau, de refaire le voyage décrit par Jules Verne dans son « Tour du monde en 80 jours » en 1872, mais 64 ans plus tard (et pour fêter le centenaire de la mort de l’écrivain) afin de constater l’évolution du monde. Jean Cocteau (qui se met dans la peau de Philéas Fogg) est accompagné de Marcel Khill (qu’il surnomme « Passepartout ») et il envoie son carnet de voyage au journal Paris-Soir qui fait ainsi, à l’époque, partager à ses lecteurs les péripéties de ces successeurs des personnages de Jules Verne autour du monde. C’est ainsi que nous suivons pas à pas ce voyage haletant de bateau en train et de voiture en avion (sur la fin seulement) afin de tenir le défi contre la montre. Jean Cocteau essaye de redécouvrir les pays qu’il traverse en évitant les grandes fêtes préparées par les consuls et ambassadeurs, au courant de son projet, et en fréquentant des quartiers parfois peu recommandés, coupe gorges, salons où l’on fume l’opium et autres boui-boui où la nourriture fait peur. Il passe ainsi par l’Italie, l’Égypte, l’Inde, la Chine, les États-Unis avant de revenir en France. Il a aussi la bonne surprise de passer du temps sur un bateau avec Charlie Chaplin (dont j’ai appris qu’il fallait prononcer le nom à la française, car il est le fils du peintre français Charles Chaplin) avec qui il devient ami.
C’est vers la fin du livre (je finissais mon voyage en même temps que le livre, situation sympathique) que j’ai découvert le passage où Jean Cocteau arrive à New York et à Harlem en particulier. Nous sommes en 1936, vous devinez un peu ce qui va suivre, non ? Eh bien oui, son voyage le mène au Savoy Ballroom à la découverte du swing et du lindy hop ! Pour la peine, je vais vous recopier ci-après l’extrait correspondant. Il faut juste noter avant d’aller plus loin que le vocabulaire utilisé à l’époque n’avait pas la même portée que les mêmes mots utilisés de nos jours. Il n’y a, je pense, pas de notion péjorative dans les propos de Cocteau qui s’emballe facilement dans un lyrisme exacerbé ici et dans d’autres pages de son récit.
Extrait de « Mon premier voyage », par Jean Cocteau, 1936, (c) Gallimard
« Harlem c’est la chaudière de la machine et sa jeunesse noire qui trépigne, le charbon qui l’alimente et qui imprime le mouvement […] New York éprise de cathédrales, d’orgues, de cierges, de gargouilles, de burlesques, de ménestrels, de mysticisme et de mystères, est secouée par le rythme noir. » […] Où se rencontrent noirs et blanches ? Quelle est la fièvre qui renverse l’obstacle des races et l’emporte sur le vieux réflexe défensif ? La danse. Le Lindy Hop (Lindbergh dance) qui secoue Harlem d’une trépidation électrique et propage ses ondes partout.
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Le Lindy Hop qui règne depuis cinq ans est une gavotte nègre. Il se danse au Savoy, le dancing noir de Harlem.
Une longue salle basse entourée dune balustrade. Au milieu, la piste et l’orchestre. Autour, un promenoir, des loges et des tables où les spectateurs et les danseurs consomment des boissons naïves. Lorsque nous arrivâmes, l’orchestre jouait une valse, ou plutôt l’ombre d’une valse, ou plutôt, l’ombre de l’ombre d’une valse, une valse zombie, un motif de valse fredonné par un ivrogne sentimental, et, sur cette valse morte, les couples comme suspendus au plafond, laissaient traîner des jambes et des jupes molles, s’arrêtaient, se penchaient jusqu’à terre, la danseuse couchée sur le danseur, se redressaient lentement et reprenaient la promenade, la main dans la main ou face à face, sans jamais sourire. Valses et tangos sont la seule halte que s’accordent ces âmes blanches, ces somnambules secoués d’un érotisme candide et d’une ivresse rituelle. Soudain l’orchestre ressuscite, les morts qui dansent s’éveillent de l’hypnose et le Lindy Hop les secoue.
Sur quelle herbe ont-ils marché ? Sur la marihuana, l’herbe qui se fume et qui grise. Ces grosses négresses en cheveux et ces petites filles dont la poitrine se cabre et dont pointe la croupe, le chapeau placé comme une gifle, deviennent un lasso que les noirs déroulent et enroulent à bout de bras, un boomerang qu’ils lancent et qui les frappe au coeur après avoir tournoyé dans le vide. Parfois, le visage sévère, extatique, la négresse passe sous le bras du danseur, se détache, s’éloigne, exécute un cavalier seul, parfois elle s’élance et le prend d’assaut comme une vague. Il arrive que les couples s’isolent et combinent les figures d’un quadrille plus grave qu’une partie d’échecs. Des blanches se mêlent aux couples noirs. Le vertige, la fatigue ne ralentissent jamais les jambes dont le « dope », les reefers (cigarettes de marihuana) soutiennent le rythme ininterrompu. Rythme d’une foule qui finit par n’être que son propre reflet dans de l’eau qui bouge.
À Paris on exécute le Lindy Hop, mais il y manque je ne sais quel chanvre diabolique, je ne sais quel poivre de Cayenne qui fait de ce menuet nègre une danse de Saint-Guy contagieuse, et de Harlem l’usine du dynamisme américain.
[…] au bar Onyx, une cave où vous allez entendre les meilleurs swing de New York, […] le Swing a remplacé le Jazz. C’est le terme nouveau qui désigne un band noir dont la musique tourne et vous boxe l’âme. Au bout de cette petite cave étroite se démènent, sur une estrade, les cinq nègres de l’orchestre le plus pur. C’est l’oeuf cru qui deviendra l’oeuf cuit et les oeuf sur le plat et l’omelette aux fines herbes. Car ces ensembles s’abîment. Même un Armstrong qu’on croyait de diamant s’est laissé corrompre. Le rêve de ces Ford construites avec des ficelles et des boîtes de conserve est de devenir Rolls Royce et l’orchestre symphonique qui monte des profondeurs, les smokings blancs, les saxophones de nickel éclaboussés de lumière, seront la perte de ces vieux tambours, de ces vieilles trompettes et de ces vieux chapeaux. Le drummer est un nègre d’origine indienne. Il roule son tonnerre et jette ses foudres, l’oeil au ciel. Un couteau d’ivoire miroite entre ses lèvres. Près de lui les jeunes loustics d’une noce de campagne se disputent le microphone, s’arrachent de la bouche des lambeaux de musique saignante et s’excitent jusqu’à devenir fous et à rendre folle la clientèle qui encombre les tables. Lorsque le swing s’arrête, un roulement de caisse accompagne les acclamations et les saluts des choristes Halte ! Les tables s’écrasent contre un mur brutal de silence, et après une stupeur de catastrophe, le Swing empoigne le Boléro de Ravel, le déchire, le malaxe, le scalpe, l’écorche vif, entortille autour de son bâton monotone les pampres écarlates d’un tyrse vaudou. »
Voici qui donne une perception du swing à Harlem en 1936 par un Français. Bien sûr, c’est enveloppé dans un discours plutôt lyrique et l’herbe qui fait rire est mentionnée comme inspirationnelle. Je précise que, dans le reste du livre, Cocteau donne l’impression de se mouvoir dans un milieu où la consommation de drogue est plus ou moins une habitude naturelle. Le fait que je reprenne ici mot pour mot le texte de Jean Cocteau ne signifie pas que j’encourage la consommation de produits stupéfiants pour trouver l’inspiration dans la danse. Je souhaite juste conserver le rythme et l’ambiance donnée par le texte d’origine. Que ceux qui souhaitent lire le récit du voyage de Cocteau dans son intégralité n’hésitent pas à acheter le livre, non sans avoir relu le récit de Jules Verne (qui, lui, n’a pas plus connu le swing et le lindy hop que ses personnages) afin de mieux apprécier les références.
J’étais parti pour écrire un texte sur un sujet totalement différent de ce qui va suivre, mais au dernier moment je suis tombé sur un article intéressant, et en relation avec la danse, qui vient de paraître sur le site scientifique américain
L’article en question relate l’expérience d’une équipe anglaise de chercheurs en psychologie, dirigée par le docteur Neave de l’université de Northumbria dans le nord de l’Angleterre, qui a travaillé sur l’influence sur les femmes de la manière de danser des hommes en termes d’attirance. Pour cela, cette équipe a utilisé les techniques de capture de mouvement en 3D (« motion capture ») — utilisées fréquemment pour faire certains dessins animés récents, ainsi que dans les jeux vidéo — pour appliquer à un mannequin virtuel les mouvements de vrais êtres humains. Ce principe a l’avantage de ne jamais dévoiler les caractéristiques physiques des danseurs et donc de ne pas influencer les participantes à l’expérience. Pour y parvenir, on barde les hommes de marqueurs réfléchissants dont l’ordinateur va suivre les mouvements afin des les reporter sur les points clés d’un mannequin virtuel. C’est donc ce mannequin virtuel en mouvement qui est montré aux femmes et non les vrais danseurs. Ainsi, seule la manière de bouger compte.
Dix-neuf hommes de 18 à 35 ans ont été filmés alors qu’ils dansaient sur un rythme basique pendant 30 secondes et leurs mouvements ont été présentés à 38 femmes qui devaient leur donner une note de 1 à 7. Voilà pour les conditions de l’expérience.
J’en conviens, même les mouvements des « bons » danseurs de l’expérience ne sont pas terribles. On imagine alors le pouvoir d’attraction de ceux qui savent réellement danser… C’est un peu une lapalissade : on imagine bien que la danse de John Travolta dans « La fièvre du samedi soir » est plus attractive que celle de Mister Bean dans la série du même nom… De mon point de vue, cette expérience ne peut que justifier davantage le fait qu’il faille un tant soit peu apprendre à danser, peu importe le style.
Cela apporte à un homme (ou une femme, car cette expérience aurait sûrement pu être réalisée dans l’autre sens) un minimum d’aisance pour bouger de manière plus originale que les « mauvais » danseurs de l’expérience et ainsi sortir du lot. Enfin, si vous ne recherchez pas particulièrement à séduire les filles parce que vous avez déjà une chérie à la maison, pensez à elle et à la manière dont vous pouvez, par la danse, entretenir la flamme dans ses yeux. Dans tous les cas, une danse en couple est sûrement le meilleur moyen d’attirer l’attention du sexe opposé. Si vous voulez lire l’article original,
Beaucoup de personnes qui commencent l’apprentissage de la valse (viennoise ou musette, peu importe) font face au problème de la tête qui tourne après deux tours du couple à un rythme soutenu. Je me propose donc de vous parler de ces rotations qui parsèment la danse et qui sont omniprésentes dans les figures de patinage artistique que l’on voit aux Jeux olympiques d’hiver en ce moment.
Lorsqu’on tourne sur soi-même, les yeux doivent en permanence se réadapter et faire la mise au point sur ce qu’ils ont en face d’eux. Le cerveau n’arrivant plus à se fier aux informations transmises par les yeux, il essaye de se baser sur celles provenant de notre oreille interne qui contrôle l’équilibre. Or, comme on est en permanence en mouvement, là non plus point de salut et on a cette sensation de vertige. Ce phénomène de la tête qui tourne, est appelé « vertige positionnel paroxystique bénin » par les médecins et est en réalité une sensation de déplacement erronée des objets par rapport à soi.


Du côté des danses à deux et dans notre cas de la valse en particulier, c’est généralement le danseur qui se plie à cet exercice. Pour ce qui est de la danseuse de valse, dans les bras de son danseur, il lui est possible de simplement fixer un point situé sur l’épaule de son partenaire. Dans ce cas, elle n’aura pas le tournis, mais elle manquera probablement tout un tas de choses intéressantes qui se déroulent dans la salle de danse… Afin de ménager sa danseuse moins expérimentée, le danseur expérimenté prendra soin d’alterner les tours à gauche et les tours à droite afin que cette dernière n’ait pas le vertige. Un dernier truc : si, malgré tous ces conseils, vous avec encore la tête qui tourne après une série de tours à droite, il vous suffit de tourner rapidement sur vous-même dans le sens inverse afin de faire disparaître cette sensation illico presto !
Je profite de l’occasion du thème de cet article pour vous proposer une petite expérience… Ci-contre, vous voyez une danseuse qui tourne sur elle-même. Elle semble flotter dans l’espace et on ne voit que son ombre en 2D. Il va sans dire qu’elle n’applique pas l’astuce dont j’ai parlé plus haut, mais cela n’a rien à voir avec ce qui va suivre. La question est : dans quel sens la voyez-vous tourner ? Certains la voient tourner à droite, d’autres la voient tourner à gauche. Ce type d’illusion d’optique est toujours amusant, car il est censé dévoiler comment notre cerveau travaille.
Il arrive souvent qu’une personne souhaitant apprendre à danser se présente dans une école de danse pour des cours particuliers et découvre que l’apprentissage doit être plus long qu’elle ne l’avait envisagé. Évidemment, tout le monde aimerait savoir danser en un clin d’oeil et sans effort. Malheureusement, cela n’est pas possible. Pourtant, il y a des gens qui prétendent qu’on peut tout danser en ne maîtrisant qu’un seul ensemble de pas. Je suis tombé, il y a quelques mois, dans une librairie (je ne me suis pas fait mal , je vous rassure
), sur un livre qui le prétendait en tout cas. Je n’ai plus exactement le titre en tête, mais il me semble que cela ressemblait à « Manuel de l’homme parfait ». Peu importe. En tout cas, ce livre regroupait tout un tas d’astuces et de raccourcis (ouvrir une bouteille de champagne, défaire un soutien-gorge avec une seule main, réussir la manoeuvre de Heimlich, etc.) pour permettre à monsieur Tout-le-Monde de devenir cet homme parfait qui fait tomber les femmes (décidément, tout le monde tombe aujourd’hui…
). Comme la Saint-Valentin vient de passer, je vais vous donner le secret pour ce qui concerne la danse en couple. Ca pourra servir à certains d’entre vous l’année prochaine !
Ce fameux livre décrivait un pas soi-disant universel à la rythmique comme suit : « lent, vent, vite, vite », puis on recommence. Cela m’a fortement rappelé le « Magic Step » (traduction française : le pas magique) d’Arthur Murray. Et je crois que l’auteur du livre y a trouvé son inspiration. Pour mémoire, Arthur Murray (ci-contre avec son épouse) est un célèbre professeur de danse né en 1895 et décédé en 1991. Il a particulièrement été connu par ses cours de danse télévisés et les écoles de danse sous licence disséminées dans tous les États-Unis. Pour la petite histoire, Jane, la fille d’Arthur Murray a épousé le docteur Heimlich qui a donné son nom à la fameuse manoeuvre que l’on enseigne en stages de premiers secours. Il y a tellement à dire sur ce monsieur que je lui consacrerai un article entier ultérieurement.
Mais revenons à nos moutons, ou plutôt à notre fameux « Magic Step », le pas magique. En plus de l’enseigner, Arthur Murray en parle dans son livre « How to become a good dancer » (« Comment devenir un bon danseur »), écrit en 1938 et réédité jusqu’en 1959 (c’est tout du moins l’édition dont je dispose). Il situe ce pas dans le contexte du foxtrot, mais certains d’entre vous auront malgré tout reconnu une rythmique familière à d’autres danses.
Le schéma de base de déplacement du danseur est représenté dans la figure ci-dessus : en avant, en avant, de côté, assemblé. Il suffit de danser ce pas le long de la ligne de danse et l’on obtient un foxtrot « à la Murray ». Ensuite, il n’y a plus qu’à transformer ce pas pour changer les directions, tourner, etc. À partir de là, Arthur Murray ajoute le « Senior Walk » pour tourner d’un quart de tour à droite, puis un quart de tour à gauche et l’on obtient quasiment le pas de base pratiqué aujourd’hui en quickstep (en forme de « W »). Dans la progression, on trouve aussi le « Junior Walk » (en déboîté), le « Conversation Step » (position promenade) et il introduit même un « Magic Right Turn », le tour à droite magique… En tout cas, si vous voulez en savoir plus, ne cherchez pas ce livre dans le commerce : il n’existe plus depuis longtemps.
Comme je l’ai laissé entendre, on retrouve la rythmique de ce pas (mais avec une autre technique de pas) dans d’autres danses comme le tango, le pas marché du rock ou le collegiate shag, sans compter les variantes du foxtrot. Certains s’en servent aussi pour danser le slow (mais en réalité cela s’apparente plutôt au slow fox). Dès qu’une musique (en 4/4 ou 2/4) n’est pas trop rapide, le « lent, lent, vite, vite » peut être utilisé (ou peut-être « lent, vite, vite, lent » résonne-t-il mieux à vos oreilles ?). Il est sûr que certains messieurs ne s’en sont pas privés pour séduire lors de soirées ou repas dansants au son d’un grand orchestre de jazz. Classe et décontraction. Bien entendu, ce « Magic Step » ne fonctionne pas dans le cadre de danses à 3 temps ou des danses stationnaires. On peut donc dire que le pas universel n’existe pas et qu’il faut malgré tout travailler beaucoup différentes techniques pour devenir le danseur parfait !
Sortons un peu du domaine strict de la danse (mais pas tout à fait…) à l’occasion de cet article. Je vais vous parler un peu de typographie. Pour simplifier, la typographie est l’art de mettre des caractères ensemble pour former des mots. C’est ce qu’ont fait pendant longtemps les imprimeurs avec leurs caractères en plomb (à l’envers) qu’ils assemblaient en lignes en vue de l’encrage qui amène à l’impression sur papier. Ça, c’est ce que faisait Gutenberg, l’inventeur de la discipline au XIXe siècle. De nos jours, les imprimeurs travaillent de plus en plus grâce aux technologies numériques et l’encrage du papier est piloté par des ordinateurs. Or, il y a des ordinateurs dans la plupart de nos maisons et chacun peut devenir lui-même son propre imprimeur pour des petits besoins.
Je ne vais pas détailler ici une par une les règles de typographie, mais je souhaite mettre en évidence la partie un peu plus « créative » de la typographie. Elle se situe non seulement au niveau de la disposition des caractères sur une page, mais aussi dans le choix des polices de caractères. Lorsqu’une personne débute dans la réalisation d’un document sur ordinateur, elle tombe assez facilement dans des pièges qui aboutissent à un document (affiche, formulaire, etc.) réellement moche. Eh oui, un logiciel comme MS Word donne accès à tellement de possibilités en quelques clics de souris qu’on a vite fait d’en abuser. Regardez donc le petit exemple ci-contre.

Alors, quelle ligne choisiriez-vous ? On pourrait dire que c’est très subjectif, et c’est en partie vrai. Cela dit écrire « salsa » avec des caractères symbolisant de la neige (ligne 3) symbolise mal la chaleur de la danse. De même, la valse (ligne 1) ne semble pas faire partie des disciplines habituelles du cirque et le charleston n’est pas synonyme de technologie et d’affichage LCD (ligne 3) et pas plus de culture hip-hop et de tags (ligne 2)… Il nous reste donc la ligne 4 où l’on voit la classe de la valse viennoise, l’aspect rebelle du rock, la créativité de la salsa et l’ambiance Cotton Club du charleston. C’est, je l’avoue, un ressenti personnel et d’autres polices de caractères auraient pu convenir. Mais j’espère que vous aurez compris l’idée générale présidant à la suggestion d’une ambiance rien qu’en écrivant un mot.
Pour finir, il est clair qu’il ne faut pas abuser de ce type de procédé. L’exemple de l’affichette « moche » présentée plus haut en est l’illustration. Même si les mots étaient écrits dans une police correspondant à l’ambiance associée à leur signification, si l’on change de police à chaque mot, il n’y a plus rien qui passe dans ce fouillis de caractères… C’est comme en danse : il est dangereux de trop mélanger des styles différents dans une même danse, car il en résulte que l’on ne sait plus ce que l’on danse. En revanche, il faut qu’il y ait un minimum de style et de technique pour donner corps à une danse et engager la communication entre les partenaires entre eux ou entre les danseurs et le public.
Dans ce blog, je m’intéresse à toutes les formes de danses au-delà des danses de couple qui ont tout de même ma préférence. Je considère en effet que, lorsqu’on pratique une discipline, il est essentiel d’élargir son horizon aux disciplines voisines afin de mieux se situer. C’est un peu ce que font les scientifiques astronomes et astrophysiciens qui s’intéressent aux confins de l’univers alors qu’ils ne peuvent toucher du doigt que notre bonne vieille planète Terre. Comprendre l’univers permet de mieux comprendre notre planète. Dans cette logique, s’intéresser aux autres formes de danse permet de mieux comprendre la danse que l’on pratique.
L’histoire commune du hip-hop nous dit que cette culture (qui inclut la danse du même nom) est née dans les années 1970 dans le Bronx au sein de la population afro-américaine qui organisait fréquemment des fêtes d’immeubles (les « block parties »). Plusieurs courants de musique et de danse s’y sont mêlés et l’on a ainsi vu se développer la breakdance (aussi appelé le break) qui a atteint la France dans les années 80. (Vous vous souvenez peut-être du « H.I.P. H.O.P. » télévisé de Sidney en 1984 ?) Mais le break n’est pas le seul style présent dans la danse hip-hop, on y trouve aussi le pop, le lock, le boogaloo, la danse au sol, etc. De nos jours, le hip-hop (new style) se laisse influencer, entre autres danses, par la salsa dans certains jeux de jambes eux-mêmes issus des la danse swing en solo (comme le Suzie-Q pratiqué sur les talons en hip-hop new style).
Voilà de manière succinte pour le contexte historique global. On y voit déjà quelques points communs entre le lindy hop et le hip-hop : origine afro-américaine à New York, multitude d’influences, jeux de jambes en commun, etc. Pour ce qui est du travail au sol, le lindy n’en comporte que très peu. Là où en en rencontre correspond aux figures acrobatiques ou encore aux danses dites excentriques (des spécialités exclusives de certains danseurs de l’époque). Je vous propose de regarder ce clip de 1940 où les Mills Brothers chantent le titre « Caravan » (un titre jazz bien connu) a capella. Des danseurs se succèdent et si vous regardez bien aux alentours d’une minute 50 du clip, le danseur effectue une figure au sol très fréquente chez les danseurs de hip-hop.
Comme vous le savez à présent, j’ai créé une maison d’éditions spécialement dédiée aux livres sur la danse,
Le principe est que le lecteur trouve des petits carrés en bas de certaines pages. Ces carrés correspondent à un code-barre en 2D et représentent une adresse où le contenu multimédia complémentaire peut être trouvé. Soit on tape la référence sur le site Internet dédié au livre, soit on utilise une application spécifique qui permet à un téléphone mobile de lire ce code (via son appareil photo intégré) et de charger automatiquement le contenu multimédia dans le téléphone. Bref, cela semble pratique. Imaginez que j’utilise ce système dans mes livres… On peut imaginer qu’une figure décrite dans le livre soit associée au code-barre menant vers une vidéo où l’on voit cette figure réalisée en vrai. On peut aussi imaginer qu’une morceau de musique cité puisse mener via le code-barre à un extrait sur Internet ou à un site de vente en ligne.
On le voit, les technologies et les modes de vie ne cessent d’évoluer. Je reste cependant encore attaché au support papier. Rien de tel que de tenir un livre dans les mains et de le feuilleter pour en extraire de nouvelles connaissances ou se divertir. Même avec l’arrivée de nouveaux concepts comme ces codes-barre 2D ou les e-books (livres électroniques ressemblant à des tablettes portables), le livre sur papier a encore de belles années devant lui. Je ne dis pas que je ne ferai pas de vidéos un jour (toutefois d’autres le font déjà très bien), mais la réalisation d’un livre, tâche longue et complexe, est vraiment quelque chose que je maîtrise et l’aboutissement de ce travail par un objet conséquent que l’on peut tenir entre ses mains est plutôt gratifiant.
Que conclure de tout cela ? Il est vrai que je n’ai pas beaucoup parlé de danse dans cet article plutôt informatif et technologique… Mais la danse n’est pas loin. J’ai déjà un certain nombre de projets en tête pour satisfaire le manque réel de livres et supports sur papier à destination des danseuses et danseurs, mais je suis ouvert à toute proposition de projet. Si vous avez des idées n’hésitez pas à m’en faire part et je verrai ce que je peux faire. J’espère que les éditions Ch. Rolland pourront également aider les enseignants en danse à fournir à leurs élèves des supports écrits de qualité. En ce début de saison, je suis content de voir que mon travail a plu non seulement à la communauté des danseurs (enseignants réputés et élèves ont salué le travail réalisé), mais aussi à la communauté des professionnels du livre (mon édition du livre de Frankie Manning en français a été sélectionnée ce mois-ci par le site
Je profite de cette période estivale pour aborder des sujets plus légers que dans le reste de l’année. Cette fois-ci, je vais vous présenter l’anecdotique (mais néanmoins populaire) danse des canards. Tout le monde connaît la danse des canards dans sa version de 1981 où la chanson de J.J. Lionel a déferlé sur la France. Ce disque est issu de la volonté du producteur belge Marcel De Keukeleire de lancer cette chanson en français et la danse qui va avec à destination des enfants, mais aussi de la famille au sens large. Aujourd’hui tout le monde sait (parfois malgré soi) danser la danse des canards sur les paroles très simples de : « C’est la danse des canards, qui en sortant de la mare se secouent le bas des reins et font coin-coin« .
Pour mémoire, voici la chorégraphie (que l’on trouvait aussi à l’époque sur la pochette du disque de J.J. Lionel). L’enchaînement est prévu pour être réalisé à deux personnes, mais on peut le danser seul ou en groupe (généralement en cercle).
Au-delà de l’aventure franco-française de cette chanson et de la danse associée, je voulais vous en faire découvrir les vraies origines que peu de gens connaissent. Le morceau original ayant donné naissance à la danse des canards a été composé à la fin des années 50 ou les années 60 par Werner Thomas, un accordéoniste suisse. Il l’appelait alors « Ententanz » (la danse des oiseaux) et on l’a souvent prise pour une polka, ce qu’elle n’est vraisemblablement pas. Nous ne sommes pas encore au stade des poulets, bien que le compositeur travaillait à cette époque comme musicien dans un restaurant. Un jour, un producteur belge, Louis van Rijmenant, entendit le morceau et essaya de sortir le disque en 1970, mais sans succès. Quelques années plus tard, le morceau intéressa d’autres producteurs et le titre fut introduit en 1981, aux USA, en Angleterre et en France entre autres. C’est ainsi que la danse des canards est devenue internationale. Elle porte différents noms selon la langue concernée : « Ententanz » (danse des canards) en allemand, « Chicken dance » (danse des poulets) en anglais, « il ballo del qua qua » (la danse des coin-coin) en italien, « El baile de los pajaritos » (la danse des oiseaux) en espagnol. De nos jours, cette danse est incontournable dans les mariages et, à l’étranger, dans les Oktoberfests (fêtes de la bière).
Un dernier mot pour l’anecdote : le même Jean-Jacques Lionel dont je parlais au début de cet article a bien essayé de lancer la « danse des petits chats » en 1982, mais cela n’a pas fonctionné et les canards sont bien restés au top des préférences des Français. Comme quoi on ne fait pas un succès comme on veut. D’autres se mettront plus tard à ce concept des hits d’été avec une danse nouvelle avec la Macarena, etc.). Je vous en reparlerai sûrement.
La danse en couple a eu beaucoup de mal avec la bienséance par le passé. Particulièrement au sein des hautes autorités religieuses. Je vous propose de parcourir aujourd’hui un article issu du New York Times du 26 octobre 1938, page 20 (article présenté ci-contre en Anglais). Comme vous le savez à présent, la traduction de textes en Anglais est un exercice que je pratique beaucoup dans le moment, je vous en livre ci-dessous une version française (assez rapidement faite je l’avoue, j’espère que vous pardonnerez les quelques imprécisions). 
Le swing, une « orgie rythmique de cannibales »… C’est cela oui… Parfois l’être humain me fait peur. Si l’on regarde dans le passé, ce mode de pensée contre les courants nouveaux n’est pas exceptionnel. Imaginez qu’à une certaine époque l’Église avait classé les danses en trois catégories : les danses honnêtes, les danses franchement mauvaises (par leur indécence et leur obscénité) et les danses douteuses et dangereuses. Et il est amusant de constater que la valse était classée dans la seconde catégorie… Rappelez-vous aussi comment la musique rock a été accueillie dans les années 1950. On parlait alors de musique de délinquants et les déhanchements suggestifs des rock stars comme Elvis Presley dérangeaient à tel point que ce dernier était cadré au-dessus de la taille lorsqu’il était filmé au début de sa carrière… Heureusement, les choses et les mentalités évoluent, sinon nous ne pourrions pas nous détendre dans une soirée dansante de nos jours.
Dansant sur le titre swing « Dinah », voici une femme apparemment vêtue d’une manière commune qui danse sur le pont d’un navire de croisière sous le regard des passagers médusés. Qu’a donc de particulier cette danse ? La réponse se fait vite voir : Melissa Mason (c’est le nom de cette danseuse) fait faire des moulinets à 360 degrés à ses jambes tendues. À certains moments, la position dépasse même le grand écart ! Mélangeant des pas plus classiques de claquettes à ses prouesses physiques, elle semble avoir des jambes littéralement faites de caoutchouc. La scène se déroule dans le film « The Yacht Party » en 1932, un court-métrage de la Warner dont la musique est jouée par Roger Wolfe Kahn and His Orchestra. Pour la petite anecdote, si l’on fait bien attention on peut voir le célèbre Artie Shaw jouer de la clarinette bien qu’il ne soit pas cité dans le générique. Voici, ci-dessous, la vidéo de la scène que je décris.
Melissa Mason pratique la danse excentrique ou, pour être plus exact, un type de danse excentrique. Il paraît qu’elle pouvait se brosser les cheveux avec un pied et se balancer entre deux troncs d’arbres, un pied sur chacun. À l’époque, on la surnommait Toe-zan (jeu de mots sur Tarzan mais avec le mot « Toe », orteil à la place du « Tar ») de la Jungle.
Là où la tektonik/electro-dance comporte essentiellement des mouvements de bras et de rares jeux de jambes, le jump style est tout à l’opposé : on n’y bouge que les pieds. Cette mode a commencé de se diffuser un peu comme la tektonik, via des vidéos Internet. Un jumper (ce serait un certain Patrick Jumpen…) s’est filmé devant son garage à bondir dans tous les sens (le gars de la tektonik s’était filmé dans son garage…) et la vidéo a été vue et les mouvements copiés. On constate que la musique utilisée est plus « dure », plus « techno » que celle de la tektonik (plus « dance music »). On pratique beaucoup le jump style dans le Nord de la France (et de l’Europe) dans des boîtes de nuit sur une techno qui pilonne : chaque temps est bien marqué par des basses énergiques (et on n’entend presque que cela à mon goût). Les soirées jump peuvent rassembler jusqu’à 25000 personnes qui sautent comme des kangourous à qui mieux mieux. D’ailleurs, le nom vient de l’anglais « jump » (sauter) et « style » (euh… style !). Je mets ci-dessous une vidéo issue de Youtube où l’on voit le (fameux ?) Patrick Jumpen danser sur une musique qui n’est encore pas trop violente par rapport à ce qu’on entend dans certaines raves (où l’on danse aussi le jump style).
Comme la musique, l’allure de la danse est moins bon enfant que la tektonik. L’idée est de sauter en rythme sur les basses. Mais la difficulté arrive quand le danseur commence à tourner sur lui-même. Il faut de l’endurance : après quelques minutes le danseur est déjà bien essoufflé… On y fait des kicks sur place et on y retrouve parfois quelques similitudes avec les claquettes (quelques « figures » en portent le nom). Quand les amateurs de jump style se mettent à danser sur un même enchaînement sur une même rangée, cela fait un peu penser aux claquettes irlandaises. À part ces petits aspects un peu techniques, on danse toujours en solo…
Malheureusement, le jump style est aussi pratiqué par des groupes de jeunes extrémistes, attirés par un aspect défouloir violent. Cela ne signifie pas que tous les danseurs de jump style aient cette manière de voir les choses, mais il faut quand même le savoir. Ceux qui ont vu les saisons passées de l’émission So You Think You Can Dance ont pu voir un hurluberlu cagoulé se présenter aux castings initiaux et danser le jump style : il a été rapidement recalé… Pour conclure, je dirais juste que, personnellement, je trouve que les qualités esthétiques cette danse qui fait un peu penser au pogo des punks (mais sans la bousculade) ne se voient que lorsque c’est bien fait (comme pour la tektonik). En tout état de cause, je ne suis pas sûr de tous ces danseurs (principalement des garçons) soient de jolis jumpers (je vous laisse méditer là-dessus en regardant l’image ci-contre).
Imaginez que vous vous soyez trouvé le 15 janvier 2009 à 11 heures du matin à attendre votre train dans la gare de Liverpool Street à Londres. Tout à coup, après une annonce tout à fait banale, voici qu’une musique entraînante sort des haut-parleurs de la gare. À côté de vous, deux personnes se mettent à danser à droite, puis trois à gauche, puis cinq derrière vous, puis… presque toute la gare se met à faire les mêmes mouvements de danse ! Hip-hop, twist, jerk, valse, tout y passe ! Vous n’en croyez pas vos yeux. La musique s’arrête et toute la foule des danseurs se disperse. Une hallucination créée par votre passion de la danse ? Non, pas du tout, cela s’est bel et bien passé. Regardez donc ce que cela donne…
Vous l’avez deviné aux dernières secondes, cette vidéo est un spot pour l’opérateur de téléphonie T-Mobile. Mais il n’en est pas moins vrai que les usagers de la gare qui n’étaient pas dans le coup ont été bien surpris puisque le tournage a réellement été fait dans la gare en question en matinée. Pour la petite histoire, ce spot a nécessité 8 mois de travail et l’implication de 350 danseurs. Les danseurs (les 350 et, on le voit, les quelques amateurs qui s’y sont joints tant bien que mal) ont ainsi dansé en pleine gare pendant plus de deux minutes, face à des vrais voyageurs à la fois surpris et enchantés. Des caméras cachées dans la gare filmaient les réactions des usagers. Cette pub vient s’inscrire dans la nouvelle campagne « Life’s for sharing » (la vie est faite pour partager) de T-Mobile. Elle a été diffusée pour la première fois lors du Celebrity Big Brother sur Channel 4 le samedi soir suivant, moins de 48 heures après le tournage.
Personnellement, j’adorerais qu’un événement dansé dans ce genre arrive en vrai et pas que pour les besoins d’une publicité. De nos jours, on appelle cela un « happening » (terme à l’origine utilisé seulement par des artistes pour prendre une photo unique par exemple). Des organisations comme Improv’ Everywhere s’en sont fait une spécialité. Ils organisent des happenings un peu dans le même genre (ils doivent être la source de l’idée de la pub de T-Mobile) comme des immobilisations collectives (plus faciles à faire) ou le fait que tout le monde ouvre son parapluie simultanément. Certaines organisations regroupent leurs participants par des SMS (on appelle cela des « Flash Mobs »). Admettez que si des événements de danse collective similaires arrivaient un peu partout de temps en temps, la danse illuminerait sûrement les jours de tout un tas de personnes qui n’en voient jamais.