Archives de catégorie : Culture

Article sur un thème culturel :  cinéma, télévision, vidéo, livres, musique, peinture, photographie, etc.

Dean Martin et Jerry Lewis

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Dans les années 1945 à 1956, un duo d’artistes était particulièrement connu aux États-Unis aussi bien pour la qualité de ses sketches qui contenaient aussi bien des chansons que de la danse. Ce duo, mêlant le charme de crooner de l’un de ses membres à l’humour déjanté du second était composé de Dean Martin et de Jerry Lewis. Ce sont deux personnages que l’on a un peu oubliés (et en particulier leur duo à succès) et que je vous propose de redécouvrir ci-après, avec un focus sur leurs prestations dansées qui tenaient une place particulièrement importante dans leurs numéros.

C’est le duo de type clown blanc (Dean Martin) et Auguste (Jerry Lewis) qui a fait le succès de ses membres. Il est vrai qu’auparavant les compères n’avaient pas autant de succès séparément. Avant leur rencontre, Dean Martin (de son vrai nom Dino Paul Crocetti) était un crooner de night-club après avoir été boxeur ou encore croupier de casino. De son côté, Jerry Lewis (pseudo pour Joseph Levitch) était un comique qui faisait des numéros où il mimait de manière exagérée une bande-son. Les deux artistes passaient au Glass Hat Club de New York lorsqu’ils firent connaissance en 1945. Dans leurs premières apparitions en tant que duo, Dean Martin chantait tandis que Jerry Lewis faisait le pitre autour, tentant de le déstabiliser. Le numéro se terminait par une poursuite. Leur succès s’accrut rapidement et leur ouvrit les portes de la radio et de la télévision au point d’avoir leur propre émission. Leur relation se dégrada au bout de quelques années et la fin de leur association était marquée par de nombreuses disputes. À partir de 1956, chacun reprit une carrière en solo au cinéma.

Durant toutes ces années de collaboration, les deux artistes ont persemé leurs numéros de danse. Essentiellement de la danse en couple, mais pas seulement. Cela est arrivé dans des émissions de télévision, mais aussi dans des films. Par exemple, dans le film « Livig It Up » de 1954 (photo ci-contre), on voit Jerry Lewis danser le lindy hop/jitterbug avec Sheree North. Même s’il fait le pitre, on devine bien ses qualités de danseur (que je vous propose de découvrir à la fin de cet article). Pour le duo de choc, l’émission « Colgate Comedy Hour » (voir plus bas) a été un terrain expérimental particulièrement riche où ils s’adonnaient à toutes sortes d’exercices allant du sketch burlesque à des prestations aux allures de comédie musicale. Et il faut bien avouer qu’ils n’hésitaient pas à faire quelques pas dans les bras l’un de l’autre pour faire rire le public. C’est dans cet état d’esprit caractéristique que ces amoureux du jazz et des danses associées ont fait découvrir le swing à des milliers d’Américains.

Je vous propose de regarder une vidéo en 2 parties. Il s’agit du sketch de la leçon de danse de Dean Martin et Jerry Lewis. Cette vidéo est extraite de l’émission américaine « Colgate Comedy Hour » (sponsorisée par la marque incluse dans son nom), diffusée à la télévision le 11 décembre 1950. Dean Martin fait le professeur de danse et Jerry Lewis fait un néophyte un peu simplet… Ceux qui ne parlent pas anglais auront peut-être un peu de mal à saisir toutes les subtilités des gags, mais ils pourront quand même comprendre l’essentiel de l’humour des deux comparses que j’aime personnellement beaucoup. On se demande si Jerry Lewis, à son époque, n’avait pas déjà inventé le jumpstyle (danse dont j’ai parlé il y a plusieurs mois dans un autre article de ce blog).

Et voici la seconde partie du sketch…

Le « Colgate Comedy Hour » est une émission de télévision qui a été diffusée à la télévision américaine de 1950 à 1955. Jerry Lewis et Dean Martin firent les beaux jours de cette émission, comme vous avec pu le deviner dans les vidéos ci-dessus. Dans une émission de la série, Jerry Lewis (presque) tout seul fait la comparaison avec la danse swing des années 40 et une nouvelle manière de danser en progression. C’est ce que je vous propose de regarder ci-dessous.

Pendant longtemps, j’ai cru que Dean Martin était simplement un chanteur grâce à des CD de compilation de crooners et Jerry Lewis un clown à cause de la rediffusion de certains films comme « Docteur Jerry et Mister Love ». Ce n’est que plus tard, avec l’ère de Youtube, que je suis tombé sur des vidéos d’époque qui m’ont prouvé qu’ils aimaient aussi beaucoup la danse et qu’ils en parsemaient leurs numéros pour notre plus grand plaisir. J’ai souhaité limiter à 3 le nombre de vidéos de cet article, mais je vous conseille d’aller faire un tour sur les sites d’hébergement de vidéos (Youtube ou Dailymotion) et d’en découvrir d’autres (dont certaines faites chacun de son côté après la fin de leur duo).

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La danse bretonne

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S’il est intéressant de découvrir les danses traditionnelles de France dans leur ensemble, il est encore plus intéressant d’approfondir le cas de certaines d’entre elles. Mon nom de famille ne cache pas mes origines bretonnes et il me semble donc logique de vous présenter un peu de la culture qui est la mienne. Ce n’est pas parce que j’ai émigré vers le Sud que j’en oublie mes racines, loin de là. Je vous invite donc à passer quelques minutes dans le monde des danses bretonnes (comme la célèbre gavotte) où le fest noz et la langue bretonne sont bien présents. Précisons dès à présent que danse se dit dañs en breton et que cela se prononce comme le mot français.

Pour bien comprendre ce qui suit, il faut savoir que la Bretagne n’est pas une région où la culture est uniforme. D’ailleurs, on ne parle pas le même breton à Brest qu’à Vannes. C’est une région composée de plusieurs « pays » (bro en breton) qui ont chacun leur propre microculture et n’ont pas de réel rapport avec les départements (Finistère, Côtes-d’Armor, etc.) que nous connaissons aujourd’hui. En marge de ce découpage de type « province », on rencontre une division qui a son importance dans le domaine de la danse : Basse-Bretagne (à l’Ouest et où l’on parle breton) et Haute-Bretagne (à l’Est et où l’on ne parle pas beaucoup breton, voire plus du tout). J’espère que ces précisions aideront les non-Bretons à mieux comprendre les choses…

La première danse bretonne dépeinte par écrit serait le trihori. (On rapproche le nom de trihori du breton tri c’hoari qui signifie « trois jeux » en référence aux trois parties composant la danse.) On retrouve sa trace dans un document de 1588 de Thoinot Arbeau qui la décrit comme une sorte de branle (danse du moyen-âge). En cette comparaison, on trouve donc des similitudes avec des danses traditionnelles d’autres régions de France. En Basse-Bretagne, on distingue cinq danses dont semblent découler les autres : la gavotte (dañs tro, largement diffusée), l’an dro parfois écrit en dro (région de Vannes et souvent associé à l’hanter dro), la dañs Treger (région du Trégor), la dañs Leon (Nord du Finistère) et la dañs tro plinn (centre de la Basse-Bretagne). En Haute-Bretagne, c’est moins clair, car les travaux de recensement n’ont été réalisés que tardivement. On trouve néanmoins clairement des danses apparentées à l’an dro bas-breton, des ronds ou rondes, des passe-pieds, des branles vendéens. On remarque l’absence de noms bretons pour ces danses de Haute-Bretagne. Toutes ces danses se pratiquaient souvent en cercles fermés. On peut ainsi citer d’autres danses connues comme la ridée, le laridé, la danse du loup, le jabadao, la dañs plinn, mais aussi en Haute-Bretagne la pastourelle, l’avant-deux et les quadrilles.

Comme pour beaucoup de danses traditionnelles, la pratique a longtemps été essentiellement tournée vers les moments clef de la vie des gens : grands travaux agricoles (moissons, arrachage des pommes de terre, grands défrichages, etc.), activités de groupe (confection de paniers, etc.), événements familiaux (mariage, etc.), événements commerciaux (foires), événements religieux (pardons, feux de la Saint-Jean, etc.) La danse était accompagnée de chants ou de musiciens (sonneurs de biniou et de bombarde, mais ils ont été rejoints par des joueurs de violon, de clarinette ou d’accordéon). Le recours aux musiciens (qui étaient payés) avait généralement lieu lors de grands événements. Les autres fois, les danses étaient animées par des chanteurs (qui n’étaient pas payés, eux) qui peuvent très bien danser en même temps qu’ils chantent. À noter, la spécificité des chants bretons en la technique du kan ha diskan (« chant et contre-chant ») où deux chanteurs alternent en une sorte de question-réponse.

À l’époque, chaque bro avait ses propres danses qui se diffusaient peu et les différentes danses étaient généralement transmises par mimétisme : chaque nouveau danseur apprenait sur le tas en regardant les autres ou en intégrant directement (et maladroitement) la danse de groupe. Mais l’industrialisation de la fin du XIXe siècle avec ses voies de communication crée une ouverture vers l’extérieur, qui fera évoluer la danse plus rapidement que précédemment. En effet, la société évolue vers une individualisation plus présente là où l’esprit de groupe était essentiel à la survie. C’est ici que le cercle formé par les danseurs s’ouvre et se transforme en longue chaîne où le meneur du début de la chaîne décide du chemin. Puis, on passe à des chaînes de plus en plus courtes (jusqu’à finir au simple couple) où chaque individu pourra être amené à se montrer un peu plus. En parallèle de cette évolution, les mouvements de bras sont apparus là où les danseurs se serraient littéralement les coudes à l’origine, ce qui ne permettait pas aux bras de bouger, mais renforçait le lien entre les danseurs. Au XVIIIe siècle, les danses de Haute-Bretagne sont également influencées par la contredanse anglaise (country dance) où l’on danse couple par couple, comme dans un quadrille. La contamination sera effective au début du XIXe siècle. Et l’on ne parle pas des polkas et autres scottiches qui se diffusent dans tout le pays et sont assimilées par les danses traditionnelles.

La danse bretonne la plus connue de nom est probablement la gavotte. Cette danse bretonne (aussi appelée dañs tro en breton) doit son appellation française à la gavotte française dansée à la Cour du fait que les deux danses se pratiquent en cercle, mais il semble que l’origine de la danse n’ait pas de rapport avec la gavotte française. Les pas de la gavotte bretonne varient selon la zone géographique où elle est pratiquée (différence au niveau des changements d’appuis, petits sauts, vitesse, etc.). Cette zone s’étend sur environ les 3/4 de la Basse-Bretagne. La gavotte peut se trouver au sein de suites de danses incluant des moments de repos (parfois marqués par une marche). Je réserve une description détaillée des pas pour un autre article.

Même si elle est la plus connue du fait de son nom français, ce n’est pas à la gavotte à laquelle pensent les touristes se rendant en Bretagne. Ils ont en tête l’image d’une danse se dansant en cercle, certes, mais qui comporte des mouvements de bras et où les danseurs se tiennent par le petit doigt. En réalité, il s’agit là de l’an dro (que l’on peut traduire par « la ronde » ou « le tour » en français). Cette danse peut aussi se faire en chaîne ouverte où les hommes et les femmes sont alternés et se tiennent effectivement par le petit doigt. Le néophyte en danse peut éprouver des difficultés à synchroniser le mouvement de ses pieds avec celui de ses bras qui est caractéristique de la variante de Baud et qui correspond à ce qui est dansé de nos jours en fest noz. Je vous donne quelques détails.

Lorsqu’ils dansent en rond, les danseurs démarrent face au centre du cercle et se tiennent par le petit doigt. La rythmique de base est : « 1 et 2, 3 et 4 », que l’on peut aussi énoncer : « vite, vite, lent, vite, vite, lent ». Cette rythmique est marquée par les pieds : un pas par mot en commençant par le pied gauche, on sautille très légèrement, les pieds toujours posés à plat.

  • 1. Écarter le pied gauche à gauche.
  • et. Assembler le pied droit au pied gauche.
  • 2. Écarter le pied gauche à gauche.
  • 3. Assembler le pied droit au pied gauche.
  • et. Piétiner du pied gauche sur place.
  • 4. Piétiner du pied droit sur place.

Donc pour résumer, un déplacement en pas chassé se fait sur « 1 et 2 » alors que l’on reste sur place sur le « 3 et 4 ». Enfin, il y a le fameux mouvement des bras. En réalité, il est simple : on enroule comme si on tournait deux manivelles à la fois (on termine coudes en bas et mains en haut) sur « 1 et 2 » et on effectue le mouvement inverse (on déroule) sur le « 3 et 4 ». Ce qui est compliqué au début, c’est de faire les pas et les bras en même temps. En guise d’exemple, voici un an dro dansé en chaîne en 2008 par le cercle celtique « Bleuniou Lann An Aven » lors de la soirée de l’Aven à Riec sur Belon, dans le Finistère. Un film réalisé par un amateur, mais qui est assez représentatif.

Depuis années 40 et encore davantage après la Seconde Guerre mondiale, les cercles celtiques et les groupes de loisirs déforment (volontairement ou non) les danses que leurs danseurs pratiquent. Ils créent ainsi de nouvelles danses et variantes. L’invention de nouvelles danses a aussi été parfois faite en contradiction avec le support musical traditionnel (on effectue des pas sur une musique qui n’y est traditionnellement pas associée). Le renouveau de la danse traditionnelle bretonne se fait en partie grâce au chanteur et harpiste Alan Stivell (dont l’une des mélodies connues a été reprise dans les années 90 par le groupe Manau) qui, par la musique et ses prises de position, affirma sa culture et l’identité de ses racines. Après 1970, l’évolution des musiques populaires amena le remplacement du chant dans les festoù noz par des formations musicales où apparaissent les guitares électriques. Une petite précision : festoù noz est le pluriel de fest noz, une fête en soirée. Si la fête se passe le jour, on appelle cela un fest deiz (« fête de jour »). Ces fêtes traditionnelles sont devenues un vecteur de transmission non seulement des danses bretonnes, mais aussi de la musique bretonne. Ces rassemblements se font comme les soirées de danses à deux, il s’agit d’une sortie de loisir pour se divertir et voir du monde dans une ambiance festive. Le mot fest noz dépasse aujourd’hui les limites de la Bretagne puisqu’on qualifie parfois de fest noz les bals folk d’autres régions où d’autres danses traditionnelles sont pratiquées (mazurka, polka, scottich, bourrée, etc.). Ces rendez-vous familiaux et populaires ouverts à tous semblent être très positif, cependant ils ont produit des effets pervers sur les danses des origines par un gommage des difficultés techniques, l’uniformisation des gestes lorsque des cours d’initiation sont donnés, etc. En même temps, on voit parfois la disparition des rituels de danse dans les festoù noz (disparition du meneur, attitude légère vis-à-vis des traditions, perte de respect, etc.). De même, on assiste à la dissociation entre la musique et chant d’un côté et la danse de l’autre côté.

Comme pour beaucoup de danses traditionnelles, si nous pouvons encore danser ces danses traditionnelles bretonnes, c’est grâce aux efforts de collectage qui ont été faits du temps où il y avait encore des survivants connaissant les danses des origines. Il y a toujours une opposition entre les partisans de la tradition intacte des origines et ceux qui pensent que les danses ne vivent que si elles sont pratiquées et si elles évoluent selon leur contexte de pratique dans le temps. Là-dessus, je vous laisse réfléchir… L’été est passé et vous aurez peut-être manqué quelques festoù noz lors de vos vacances en Bretagne. Néanmoins, jetez un oeil à côté de chez vous : il y a sûrement un groupe d’irréductibles Bretons expatriés qui vous accueilleront avec plaisir. Il y en a partout, même où je vis à présent, dans le Sud-Ouest toulousain…

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La danse tahitienne

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Pour marquer la saison chaude, je vous propose de partir dans les îles. Non, pas l’île de Ré ou la Corse, mais beaucoup plus loin, dans l’océan Pacifique. Je vous emmène aujourd’hui à Tahiti, collectivité d’outre-mer faisant partie de la Polynésie française. Aussi loin que je me souvienne, c’est là — j’y ai vécu 2 ans — que j’ai fait, étant enfant, mes premiers pas de danse en apprenant à l’école ce que la majorité des Français métropolitains connaissent sous le nom de tamure (prononcer « tamouré »). Il est temps pour moi de vous faire découvrir cela avec un soupçon de culture tahitienne.

L’imaginaire collectif est très vivant par rapport à Tahiti : des grandes plages désertes, des cocotiers, la mer bleue turquoise, sans oublier les vahines (prononcer « vahiné ») qui, au son des ukuleles, dansent le « tamouré » vêtues d’un soutien-gorge en noix de coco, un pagne en feuilles de bananier et la fleur de tiaré fixée au-dessus d’une oreille. C’est très caricatural, évidemment. En réalité, la danse tahitienne doit être appelée ‘ori tahiti (le mot ori signifie « danse » en tahitien). Mais d’où provient donc alors cette histoire de tamure ? Le tamure est à l’origine un poisson de la famille des becs de cane et présent dans les archipels de la Société et des Tuamotu. Une chanson fut composée après la Seconde Guerre mondiale avec le mot tamure dans son refrain. Comme sa mélodie était basée sur les rythmes traditionnels tahitiens, on eut tôt fait d’associer le nom du poisson à ceux-ci ainsi que, par ricochet, à la danse qu’on pouvait effectuer dessus. Il existe toutefois une autre hypothèse quant à l’utilisation de ce mot : il semble que Cook ait décrit des danses indécentes qu’il appelle « timorodee » vers 1780 et qu’il utilisait donc le mot tamure en l’ayant déformé.

Lorsque les explorateurs Wallis, Bougainville (qui qualifia l’île de « Paradis terrestre » à son premier voyage) et Cook se rendirent (successivement) à Tahiti à partir de 1767, ils y virent des habitants vivant dans une société hiérarchisée, où les conflits étaient fréquents, où des actes de cannibalisme existaient, où le corps et les relations sexuelles n’étaient pas contraints. Ils remarquèrent particulièrement que les femmes dansaient nues ou presque. On pense bien que les premiers missionnaires protestants qui arrivèrent sur l’île en 1797 ont eu tôt fait de combattre ces gestes indécents et ces danses lascives, en particulier l’upa upa qui se dansait en couple. La seule exception dans le domaine de l’indécence était le hura, une danse ancienne, qui pratiquée dans un habit richement élaboré. Tahiti est massivement convertie au christianisme en 1815 et en 1842 arrivent les Français qui autorisent les danses du pays (mais avec modération et décence). La Fête nationale est établie le 14 juillet 1881 tout comme en France et cela correspond aux fêtes de Tiurai (les fêtes de juillet). C’est dans ce cadre que la danse regagne peu à peu du terrain aux côtés des himene, les chants traditionnels. Sortant de sa clandestinité, la danse refait surface à partir de 1956 avec le réveil de la conscience culturelle polynésienne et sous l’impulsion de Madeleine Mou’a. Suite à un séjour en France métropolitaine où elle a vu des groupes folkloriques auvergnats, cette institutrice décide de créer l’équivalent à son retour à Tahiti en créant le groupe Heiva. La danse est particulièrement à l’honneur lors du Tiurai où des concours de danse sont organisés. En 1984, le Tiurai est renommé Heiva (toujours au mois de juillet) et cela marque aussi le début d’une certaine codification des mouvements de la danse.

La danse traditionnelle tahitienne traduit une relation entre l’homme et la nature. Elle regroupe toute une famille de mouvements suivant des règles relatives à l’espace, la durée et le rythme marqué par les percussions traditionnelles. La danse est individuelle ou collective. Le ‘ori tahiti est composé de quatre types de chorégraphies (que l’on peut qualifier de danse à proprement parler) : le ‘ote’a, le hivinau, le pa’o’a et le ‘aparima.

Le ‘ote’a :danse de groupe d’origine guerrière, où les danseuses et danseurs sont disposés en colonnes ou en alignements étudiés, et accompagnée exclusivement d’instruments à percussion. Le ote’a correspond bien souvent à l’image de carte postale que l’on se fait de la danse tahitienne.
Le hivinau,danse configurée en deux cercles concentriques et accompagnée de tambours et d’un soliste vocal masculin (meneur) auquel les danseurs répondent en choeur. Les thèmes abordés ont trait aux tâches de la vie quotidienne.
Le pa’o’a,danse sensuelle en demi-cercle (parfois en cercle fermé) durant laquelle des couples composés d’un danseur et d’une danseuse se lèvent successivement pour improviser une danse au centre, les autres danseurs, accroupis, tapent des mains en cadence.
Le ‘aparima,danse gracieuse où les danseurs miment des scènes de la vie quotidienne correspondant aux paroles d’un chant au son de la guitare et du ukulele. Les mouvements de mains ont naturellement une grande importance ici (‘aparima peut être traduit en français par « mimer avec les mains »).

Au niveau des mouvements proprement dits, le roulement circulaire des hanches des danseuses et les ciseaux effectués par les danseurs sont connus. Cependant, les bases ne se limitent pas qu’à cela. Les danseuses doivent maîtriser cinq mouvements fondamentaux du bassin ou du ventre dont il y a ensuite de nombreuses variantes. Le mouvement des mains est aussi très important en particulier lors du ‘aparima, comme je l’ai dit plus haut. Les danseurs, quant à eux, font des mouvements plus masculins et amples, il y a des sauts, des coups de pieds, des flexions de genoux, etc. Le fameux pas des ciseaux (pa’oti, voir illustration ci-contre) est d’ailleurs présent dans une autre danse qui n’a rien à voir : le lindy hop. On les y appelle les crazy legs (les « jambes folles » en français).

De nos jours, la danse tahitienne continue d’évoluer. De grands groupes comme les Grands Ballets de Tahiti (photo ci-contre) y incorporent de la nouveauté sous la forme de mouvements issus de la danse contemporaine ou de la danse classique. L’opposition entre tradition et modernité est donc présente dans certaines chorégraphies modernes de ‘ori tahiti. Par ailleurs, la danse est naturellement influencée par d’autres formes de danse traditionnelle comme le hula venu de Hawaii. Depuis la fin du XXe siècle, les danses traditionnelles tahitiennes connaissent de nouveau une grande popularité et un grand nombre d’écoles de danse voient le jour. La musique est aujourd’hui jouée par des tambours polynésiens (je passe ici sous silence les noms des instruments en tahitien, peu familiers en dehors de la Polynésie), des flûtes nasales, des guitares, de ukuleles et parfois du didgeridoo et d’autres instruments traditionnels comme le pu, la conque marine, qui marque souvent le début d’une prestation. Les costumes contemporains sont divisés en trois types : le grand costume (souvent porté en début de spectacle et marqué par sa grande jupe en fils d’écorce d’hibiscus et sa coiffe), le costume végétal (marqué par la couleur verte des feuilles de végétaux qui le composent) et le costume en tissu (marqué par le paréo de tissu imprimé de motifs polynésiens et parfois de la couronne de fleurs).

Pour vous donner un aperçu de danse tahitienne, j’intègre ci-dessous une vidéo débutant par un ‘aparima.

La langue tahitienne appartient à une famille de plus de 400 langues parlées dans une zone géographique s’étendant de Madagascar à l’île de Pâques. Ce sont les langues malayo-polynésiennes. Comme la Polynésie française est en relation étroite avec la France, certains mots tahitiens sont passés dans le langage courant des métropolitains ou, en tout cas, sont devenus familiers même pour ceux qui n’ont jamais fait le voyage jusqu’à l’île. En voici quelques exemples ci-après. Notez que le « e » se prononce « é » et que le « u » se prononce « ou ».

  • Fiu = las, fatigué (on dit : « je suis fiu » – prononcer « fiou »)
  • Maeva = bienvenue (un prénom bien connu)
  • Monoi = huile de coco parfumée (utilisé dans des produits cosmétiques)
  • Pareu = pièce de tissu imprimé (qui est devenu « paréo »).
  • Tapu = interdit, défendu (qui est devenu « tabou »)
  • Tiare = gardenia tahitensis (fleur poussant à Tahiti)
  • Tiki = représentation sculptée d’un dieu (souvent connu comme pendentif)
  • Ukulele = instrument de musique à cordes (on l’écrit aussi parfois yukulélé)
  • Vahine = femme (les vahines des îles…)

J’espère que cet article vous aura fait un peu rêver, surtout si vous n’avez pas pu partir en vacances cet été. Peut-être cela vous aura-t-il donné envie de vous essayer au tamure, appellation que l’on retrouve de nos jours davantage dans les dancings et un contexte touristique ? Sachez en tout cas qu’il existe des cours et stages de danse tahitienne en France métropolitaine. Renseignez-vous autour de chez vous ! (Une première étape peut être de consulter le site Tahiti en France.) En me relisant, je m’aperçois que j’ai quelque peu débordé du contexte de la danse, mais un peu d’évasion ne fait pas de mal de temps en temps, non ?

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La danse en film 3d ou en relief

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Le 19 mai dernier est sorti un nouveau film sur le thème de la danse : « Street dance 3D ». Vous me direz : un film de plus où s’opposent des idées préconçues et qui se finit en happy end. Peut-être. Mais la particularité de celui-là est qu’il s’agit du premier film en 3D, comme son titre le suggère fortement. C’est aussi pour moi l’occasion de faire une petite mise au point sur cette histoire de 3D.

Tout d’abord, voici le pitch du film. Une jeune Anglaise, Carly, vient de se qualifier avec sa troupe de street dance pour la finale des championnats anglais. Jay, son petit ami et leader du groupe, annonce qu’il arrête la danse et les plante là. Carly doit alors reprendre le groupe en main dans l’objectif de gagner la finale. Elle rencontre des problèmes de salle qui l’amènent à convenir d’un accord avec Helena, une prof de danse classique disposant d’une salle dans son école de danse : si Carly intègre les danseurs de classique de l’école dans sa team de street dance, elle peut disposer de la salle à volonté. De là vont naître tout un tas de péripéties entre les danseurs des rues et les danseurs académiques qui, évidemment, n’arrivent pas à se comprendre… tout du moins au départ.

J’ai trouvé le scénario sans surprise, mais correct. C’est manifestement un film destiné aux ados, mais il pourra tout aussi bien plaire aux plus âgés. En tout cas, durant les 1h38 de film, on ne s’ennuie pas. La bande-son est bien également, car elle correspond évidemment au style de danse, mais elle n’est pas trop agressive pour monsieur Tout-le-Monde. J’ai vu ce film en VF et, si la traduction était à la hauteur, il est resté malheureusement une coquille de doublage au moment où Carly passe en revue les différents styles de danse hip-hop. À côté du popping, elle a cité le « looking » qui est évidemment en réalité le locking. Comme le texte lu par les acteurs doubleurs est généralement manuscrit, il y a probablement eu là une erreur de déchiffrage de l’écriture du traducteur. Encore un bon point linguistique, le titre est le même en français et en anglais : cela évite les fausses traductions (du genre « step up » en anglais qui donne « sexy dance » en français… du n’importe quoi marketing).


Côté danse, j’ai trouvé les chorégraphies plutôt bonnes dans l’ensemble (mais sans plus pour certaines…). Cela est en fait dû à la manière dont cela a été filmé. Dans l’absolu, il y avait de bons moments, mais ils ont parfois été gâchés par un éclairage mal fait ou des déplacements de caméra qui desservent la danse au lieu de la servir… À noter la présence dans ce film des groupes Flawless (qui a participé à « Britain’s Got Talent », la version anglaise de l’émission « Incroyable talent ») et Diversity (qui a remporté le casting de la même émission). Tiens, tant que j’y suis, le leader de la troupe Diversity peut être vu sur le petit écran également en ce moment. Ashley Banjo fait office de jury dans la saison 1 (2009-2010) de l’émission « Got to Dance », émission anglaise de casting de danseurs, initialement diffusée sur Sky 1, mais (oh surprise !) également diffusée doublée en français sur Gulli (chaîne 18 de la TNT) tous les jeudis à 20h30 depuis le jeudi 27 mai 2010. Les deux autres membres du jury sont Kimberly Wyatt (membre des Pussycat Dolls) et Adam Garcia (danseur à claquettes d’origine australienne).

Et la 3D dans tout cela ? Si les producteurs ont mis cette mention dans le titre, c’est que ça doit être important… Dans les faits, cette « 3D » se concrétise par une simple sensation de profondeur dans une image qui semble composée de différents plans plats. On ne sent pas le volume (à part dans de rares scènes comme les scènes de transition dans la ville ou la battle dans le bar). En tout cas, grosse déception. Pas d’image surgissant hors de l’écran, ni d’impression de faire partie de la scène de danse. Bref, rien à voir avec des films réellement tournés grâce à des caméras spéciales. Il y a même certaines scènes où la lumière « éblouissante » de certains spots lumineux qui était censée donner un effet spécial en 2D rend l’image impossible à distinguer avec des lunettes 3D. Car je mettrais ma main au feu que nous avons ici affaire à une « 3D relief » créée en post-production à partir d’un film classique en 2D. D’ailleurs, je pense qu’il vaut mieux voir ce film directement dans sa version « normale ». La 3D n’apporte rien ici, et ne sert qu’à distraire le spectateur et à réduire son champ de vision (les bords de mes lunettes aux verres polarisés m’ont plutôt gêné qu’autre chose). Donc cette troisième dimension n’est qu’une illusion et un argument marketing.

Je profite d’aborder ce sujet pour faire un aparté sur cette notion de 3D au cinéma. En réalité, on devrait parler d’un film en relief et non d’un film en 3D. Le relief est ce que l’on perçoit quand on regarde des films comme Street Dance 3D, Avatar, etc. Pour ceux qui ne maîtrisent pas encore bien les techniques de rendu en relief utilisées au cinéma, voici un petit résumé. On rencontre actuellement trois méthodes.

  • méthode anaglyphe: c’est la méthode des premiers films 3D-relief avec des lunettes dont un côté est bleu et l’autre rouge. Comme les couleurs du film sont trafiquées de manière à superposer deux images, les filtres de couleur des lunettes rétablissent les bonnes couleurs (autant que possible) et une image différente pour chaque oeil, ce qui met en évidence le relief. Cette technique fonctionne aussi avec des images fixes et donc des photos.
  • méthode polarisée: plus récente et économique avec des lunettes qui ressemblent à des lunettes de soleil. La lumière de chaque image est polarisée (l’une verticalement, l’autre horizontalement) et un filtre des lunettes est conçu pour ne laisser passer qu’une seule polarisation. Cela permet donc de séparer les deux images du film projeté.
  • méthode alternative: autre méthode contemporaine qui nécessite des lunettes un peu plus lourdes. Le projecteur envoie en alternance les images pour l’oeil droit et celles pour l’oeil gauche et ce sont les lunettes actives qui en obturant chaque verre à la fois et à haute fréquence sélectionnent l’image correspondant à un oeil donné.

Toutes ces méthodes ont un point commun : chaque oeil reçoit une image différente pour donner la sensation de relief. Cela signifie aussi que, peu importe l’endroit où l’on se trouve dans la salle, on reçoit les mêmes images et donc le même angle de vision sur le film. D’où mon propos sur la différence entre la 3D et le relief. Si l’on avait une technologie destinée à projeter de la vraie 3D, un spectateur à gauche de la salle de cinéma ne verrait pas la même chose qu’un autre situé à droite. Pour vous donner une idée de ce que je veux dire, la technologie des hologrammes pourrait s’approcher de cela : selon où l’on se trouve par rapport à l’hologramme, on le voit un angle différent. Lorsque je crée mes danseurs pour mes livres de technique dans mon ordinateur, je les manipule en 3D (eh oui, on peut aussi savoir faire autre chose que danser…) et je choisis l’angle de vue qui le plaît le mieux pour en faire une image intégrée dans le livre. Ce n’est donc évidemment pas là une image en 3D, mais c’est une image conçue par une technique 3D.

Pour conclure, je reviens à ma séance de cinéma avec Street Dance 3D. L’intérêt de voir de la danse en 3D relief est de l’ordre du spectacle : on en prend plein les yeux et on a l’impression d’entrer dans le film (si c’est bien filmé, et j’attends encore ce film…). Sinon, autant regarder le film de manière classique, et on appréciera d’autant mieux les chorégraphies. Bon alors, ce film, faut-il aller le voir ? La réponse est oui, mais si vous pouvez le voir en 2D, vous l’apprécierez probablement mieux. Pour l’instant, on n’a pas encore fait de meilleure 3D que la vie réelle…

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Rétrospective de la diffusion musicale

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J’ai eu un peu de mal à trouver un titre parlant pour cet article. En fait, je vais essayer de parcourir rapidement les divers moyens utilisés en un siècle pour diffuser de la musique lors de soirées dansantes ou de cours de danse. En effet, tous les adolescents d’aujourd’hui n’ont jamais rien connu avant le CD audio et les enfants encore plus jeunes auront tous toujours connu la musique au format numérique. Petit retour en arrière…

En 1900, la musique pouvait être écoutée et diffusée uniquement de deux manières : soit en direct par le biais des musiciens et orchestres qui se produisaient en divers endroits, soit mécaniquement par l’intermédiaire de disques. En ce début de siècle, la qualité des enregistrements est telle que cela n’avait rien à voir avec un orchestre en vrai. Le développement du marché du disque se fait à partir de 1902 (le cylindre est peu à peu abandonné) et la durée d’un disque est portée de 2 à 4 minutes en 1908, mais ce n’est qu’en 1926 que cette durée est couplée avec le procédé de gravure électrique qui apportait un gain substantiel en qualité. Je passe ici sur les divers progrès autour de ce support comme le microsillon dans les années 50.

Faisons donc une petite pause chronologique ici. Dans les années 20, les particuliers pouvaient avoir leur propre tourne-disque qui se matérialisait parfois par une petite armoire dédiée qui intégrait le mécanisme de lecture et le cône amplificateur comme les produits de la marque Victrola vendus entre 1906 et 1929. Dans la publicité ci-contre, vous pouvez lire : « Il est exquis de danser sur la musique d’un Victrola ». Des années plus tard, c’est le tourne-disque de marque Teppaz qui a été le symbole des années de « Salut les copains ». Ce matériel (aussi appelé pick-up) était entièrement contenu dans une petite valise dont le couvercle logeait les haut-parleurs. Le matériel fixe a par la suite été appelé « platine » avec l’apparition des chaînes hi-fi et n’intégrait plus les éléments d’amplification et les haut-parleurs. Dans les lieux publics, les années 30 voient apparaître les juke-box, armoires intégrant un système de choix de disques à la demande, mais ce sont les modèles bariolés des années 50 qui restent dans les mémoires. Servant aussi à diffuser de la musique, mais intégrant aussi un système diffusant des clips, on passe des Panoram des années 40 (avec des petits films en noir et blanc appelés soundies) aux scopitones (terme désignant aussi les clips qui y étaient proposés) dans les années 60. Voilà donc en quelques lignes ce qui permettait aux gens de diffuser de la musique pour danser en privé ou en public. Dans les années 30 et 40, on connaît l’âge d’or des big bands (pour qui la musique swing est reine) composés de nombreux musiciens alors que dans les années 50 et 60, les orchestres sont de taille modeste et le rock’n’roll est à son apogée. C’est la fameuse époque des yéyés.

Continuons donc notre parcours chronologique avec le passage de l’analogique au numérique. Je n’oublie évidemment pas l’étape de l’apparition du premier magnétophone à cassettes en 1963 qui révolutionne le domaine en terme de portabilité. L’avantage de ce système à bande magnétique est qu’il est réenregistrable et compact. Cela conduit naturellement à l’invention du baladeur (sous le nom walkman) par Sony en 1979, donnant une certaine liberté aux amateurs de musique et de danse. On peut alors danser le disco ou faire du roller sur ses morceaux préférés. Sur une cassette, on stocke alors de 60 à 180 minutes de musique alors que sur les disques à 33 tours on en trouvait que de 40 à 60 minutes. C’est toujours Sony, associé à Philips, qui en 1983 signe le passage au son enregistré numériquement en créant le disque compact (CD). Ici, on ne stocke que 74 minutes de musique (650 Mo), mais le support est réputé inusable (surtout vis-à-vis de la K7 audio qui est sensible aux ondes magnétiques). La platine CD est aussi déclinée en version baladeur, cela va de soi. Le système du CD audio est encore énormément utilisé de nos jours. Beaucoup d’enseignants et DJ utilisent ce support dans des platines spéciales où l’on peut faire varier la vitesse de la musique (comme la ralentir pour travailler une chorégraphie sur le bon morceau, mais sans trop stresser… ou encore passer d’un titre à un autre tout en douceur au niveau du tempo).

Le lecteur de CD n’est pas seulement un matériel de lecture audio, c’est aussi un périphérique informatique pour les ordinateurs. En 1995 les premiers graveurs de CD enregistrables (CD-R) grand-public apparaissent et chacun peut y faire soit des sauvegardes informatiques, soit de compilations personnelles de ses morceaux préférés issus des CD non réinscriptibles. Et puis, renouant avec la capacité d’enregistrement, voici que naît le Digital Versatile Disc (DVD) en 1996, qui grâce à ses propriétés multi-face et multi-couche, est capable de stocker de 4,7 à 17 Go de données (soit des dizaines d’heures de musique). Il est évident que, avec cette capacité, l’utilisation classique du DVD est plutôt informatique ou vidéo. Le CD reste donc le support audio roi de nos jours, mais c’est sans compter avec la compression et les formats comme le MP3. Ce format audio a été breveté en 1996 par l’institut allemand Fraunhofer. Par rapport au format numérique du CD audio (PCM/WAV/CDA), le format MP3 est compressé. Autrement dit, le son est traité de manière à prendre moins de place une fois stocké. Il faut donc obligatoirement le décompresser via des calculs complexes avant de pouvoir l’écouter. Dans un fichier MP3, le son peut être plus ou moins compressé, mais le gain de place se fait au détriment de la qualité audio.

Voici donc que le son est dématérialisé et extrêmement portable. D’ailleurs, il ne reste pas dans les ordinateurs et les premiers lecteurs MP3 portables ont tôt fait d’apparaître en 1999. Des fabricants comme Saehan, Rio et Creative démarquent alors par leurs produits. Comme les mémoires de type flash (mémoire qui ne s’efface pas lorsqu’on éteint l’appareil) n’atteignaient pas encore les capacités que nous connaissons aujourd’hui, ces baladeurs contenaient un disque dur où l’on enregistrait les fichiers audio en MP3. J’ai moi-même acheté l’un de ces appareils en 2000 sous la forme du Creative Nomad DAP Jukebox avec un disque dur de 6 Go. À l’époque, c’était l’appareil rêvé pour gérer la musique pour mes cours de danse et les fonctions EAX me permettaient même de réduire la vitesse d’un morceau sans faire varier la hauteur du son. De nos jours, on a des appareils qui tiennent au creux de la main pour faire la même chose et une mémoire micro-HD de 8Go est plus petite qu’un ongle… Les enseignants utilisent ces appareils (beaucoup ont des iPods ou des appareils similaires) pour se déplacer avec leur CDthèque sur eux alors que d’autres préfèrent encore le grand écran d’un ordinateur portable associé à son disque dur (éventuellement externe) plein de MP3 comme c’est souvent le cas pour les DJ. On a même des platines DJ virtuelles connectables en USB à un ordinateur qui permet de retrouver le toucher des platines CD sans avoir à manipuler des dizaines de disques en une seule soirée.

Voilà en une page plus de 100 ans d’évolution des habitudes d’écoute musicale pour danser au son de ses musiques favorites. À chacun sa préférence. Je connais des personnes qui préfèrent le contact du boîtier du CD et lire les titres sur le livret associé afin de se laisser porter par l’inspiration. J’en connais d’autres qui préfèrent le choix technique des morceaux triés par thème, par tempo ou par titre et manipuler leur ordinateur avec dextérité. Je connais même au moins un enseignant qui anime toujours ses cours et soirées avec ses cassettes audio qu’il connaît par coeur, quitte à passer son temps à changer la K7, rembobiner, activer l’auto-reverse, etc. Cela me donne l’occasion de dire que, pour un enseignant comme pour un DJ, rassembler et trier sa collection de morceaux de musique est une tâche capitale. Cela représente des heures et des heures d’écoute, de recherche et de classement afin de trouver les titres de qualité pour danser. Parfois, cela a nécessité des jours, des efforts importants et de l’argent pour acquérir un seul disque ou un CD donné. Ainsi lorsque vous demandez à un professionnel s’il peut vous donner une copie d’un disque ou un CD qu’il a utilisé en soirée ou en cours, vous comprendrez aisément qu’il puisse vous dire non. La première raison de ce refus est, je viens de le dire, que c’est un investissement pour lui. La seconde raison est légale, évidemment. Il vaut mieux que vous achetiez vous-même votre musique. En tout état de cause, un enseignant ou un DJ vous donnera probablement volontiers le nom et l’artiste d’un titre ou d’un album pour que vous puissiez vous le procurer en toute légalité. Sinon, si vous aimez danser sur bon son, vous pouvez aussi guetter les soirées avec orchestre ou les concerts où il y a de la place pour danser. Quel bonheur lorsqu’une soirée est organisée au son d’un véritable orchestre en direct live ! Pour ma part, je préfère largement cela à une soirée aux morceaux certes de styles très variés, mais à base de MP3 d’une qualité sonore se rapprochant des cynlindres des années 20… Et là, j’exagère à peine, car j’ai parfois l’impression de ce retour en arrière à cause de DJ qui utilisent mal la technologie ou qui ont négligé d’acheter légalement leur musique…

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Mia Frye et la macarena

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Je comptais attendre l’été pour aborder ce sujet, mais finalement le voici plus tôt que prévu. En effet, dans ce blog, j’essaye de parler de toutes les danses et de ne pas rester plusieurs semaines d’affilée sur des sujets trop similaires. Alors, cette fois et pour changer un peu des danses en couple, nous allons évoquer la Macarena, un tube planétaire des années 90, ainsi que sa chorégraphe Mia Frye, qui fait partie de ces chorégraphes résidant en France et connues du grand public.

Commençons par quelques mots pour présenter Mia Frye, danseuse et chorégraphe plus connue pour sa prestation dans le jury de l’émission Popstars ou son passage dans la ferme célébrités première du nom. Elle est née à New York en 1965 de parents américains et est arrivée en France à l’âge de 12 ans. Après plusieurs apparitions à la télévision dans les années 70 et 80 (et même une tentative de single en tant que chanteuse), elle travaille avec Luc Besson dans les années 90 (collaboration à « Nikita » et « Le 5ème élément »). Elle est en particulier l’héroïne du film « The Dancer » en 2000 (réalisé par Frederic Garson, mais produit par Luc Besson) où elle joue le rôle d’India, une danseuse muette qui éblouit son public dans des battles DJ contre danseuse. Malheureusement, cette danseuse (dans le film) connaît un refus lors d’une audition à Broadway juste parce qu’elle est muette, mais elle rencontre un scientifique qui travaillera sur un système qui permettra à India de s’exprimer librement. Mia Frye est non seulement la chorégraphe de la Macarena (on la voit danser dans le clip de Los del Rio) mais elle est aussi la chorégraphe de « Alané » de Wes la même année (on la voit aussi danser dans le clip) et de « Yakalelo » des Nomads en 1998. Forte du succès des titres dont elle a chorégraphié la danse, la réputation de Mia Frye l’amène à recevoir des propositions de participation à des projets de plus grande envergure (dont le film produit par Besson en 2000). Comme je l’ai dit, en 2001, elle fait partie du jury de l’émission Popstars (du type Nouvelle Star) et par la suite devient la chorégraphe officielle du groupe de filles L5 ayant remporté cette émission de télécrochet moderne. D’ailleurs, l’expression « Happy Face ! », lancée maintes fois par Mia pour encourager les participants à l’émission est restée dans le langage courant depuis. Elle contribue aussi au film « Podium » de Yann Moix (film ayant pour sujet un sosie de Claude François) où elle se fait apostropher par « toi, avec le calamar sur la tête ! » Si vous souhaitez voir Mia Frye en action, il existe deux DVD dans le commerce. Le premier est le DVD du film « The Dancer » dont Mia est la vedette ; j’en ai parlé un peu plus haut. Le second s’appelle « Danse avec Mia Frye » et correspond à un cours de danse pour apprendre trois chorégraphies sous la direction de Mia Frye (échauffement, progression, etc.) qui ponctue ses explications d’exclamations en anglais. Le public visé est clairement les ados qui veulent apprendre quelques pas devant leur écran sans prendre de cours dans une école.

Parlons à présent de la Macarena, tube de l’été 1996 (classée 7 semaines numéro 1 dans le top 50). La chanson est arrivée en premier dans sa version espagnole et enregistrée par le duo Los del Rio en 1992 comme une rumba. On peut encore acheter ce titre sous la forme de compilations ou d’album single Macarena. « Macarena » est le nom donné à la jeune fille dont parle la chanson. Ce nom aurait dû être Madgalena, mais comme une chanson portait déjà ce titre, une modification a été faite pour éviter la confusion. La partie des paroles en anglais a été ajoutée en 1995 lorsque les Bayside Boys ont décidé de remixer le titre et c’est là que le succès mondial a été atteint. La chanson devient le tube de l’été 1996 en France et dans le monde entier. On voit même la fronde se monter sur Internet par le biais de sites anti-macarena (dont une bonne partie n’existe plus aujourd’hui). À cette époque, un autre groupe, Los del Mar (tiens, c’est proche du nom de l’autre groupe, non ?), s’est glissé dans la vague de succès envers ce titre et a sorti sa propre version de la Macarena (coupant parfois l’herbe sous le pied des Los Del Rio sur certains continents comme l’Australie). Le clip des chanteurs originaux du titre, Los del Rio, est tourné sur un fond blanc, les chanteurs Romero et Ruiz chantent alors que dix filles dansent et font une chorégraphie à répétition. L’une de ces danseuses, particulièrement reconnaissable à son turban orange, n’est nulle autre que Mia Frye, la chorégraphe des mouvements dans ce clip. Cette chorégraphie prend dès lors le nom de la chanson et « Macarena » désigne actuellement donc à la fois une chanson et la danse que l’on effectue au son de cette chanson. Un dernier mot sur la chanson avant de passer à la danse : il en existe à ce jour de nombreux remixes (officiels cautionnés par Los del Rio ou non) et il y a diverses ambiances allant de la version spécial Noël (avec les clochettes et tout et tout…) à une version style Bollywood que j’ai eu l’occasion d’entendre il y a quelques années.

La chorégraphie de la Macarena commence face au DJ. Tous les participants sont debout sur plusieurs lignes, pieds parallèles en léger écart et bras le long du corps. Le premier mouvement se fait sur le temps 1 de la musique.
 
L’enchaînement d’origine de Mia Frye et présenté dans le clip de Los del Rio dure 16 temps (2 x 8) et chaque position issue d’un mouvement simple dure 2 temps. Je vous le décris :

  1. Tendre le bras droit en avant avec une petite vague (un peu comme lorsqu’on nage le crawl), la paume de la main vers le sol
  2. Tendre le bras gauche en avant avec une petite vague de la même manière
  3. Mettre la main droite derrière sa tête (paume vers l’oreille)
  4. Mettre la main gauche derrière sa tête (paume vers l’oreille)
  5. Poser la main droite dans le bas du dos (à droite)
  6. Poser la main gauche dans le bas du dos (à gauche)
  7. Faire onduler le bassin sur 3 temps
  8. Sauter sur place d’un quart de tour à droite (on entend « haaha » dans la musique)

En même temps que l’on fait l’ensemble de ces mouvements, les danseurs effectuent un petit déhanché de droite à gauche. Lorsqu’on est arrivé à la dernière étape, on recommence au début.

J’entends déjà certains d’entre vous qui s’exclament : « Mais je ne fais pas comme ça, moi ! ». Et il est vrai que l’enchaînement que l’on voit pratiquer depuis des années diffère. Celui-ci dure aussi 16 temps (2 x 8), mais chaque position issue d’un mouvement dure un seul temps, rendant la chorégraphie plus dynamique. Voici cet enchaînement :

  1. Tendre le bras droit en avant avec une petite vague (un peu comme lorsqu’on nage le crawl), la paume de la main vers le sol
  2. Tendre le bras gauche en avant et parallèle au bras droit avec une petite vague de la même manière
  3. Retourner la main droite, paume vers le ciel
  4. Retourner la main gauche, paume vers le ciel
  5. Croiser le bras droit de manière que la main droite touche l’épaule gauche
  6. Croiser le bras gauche de manière que la main gauche touche l’épaule droite
  7. Mettre la main droite derrière sa tête (paume vers l’oreille)
  8. Mettre la main gauche derrière sa tête (paume vers l’oreille)
  9. Croiser la main droite devant soi de manière qu’elle touche la hanche gauche
  10. Croiser la main gauche devant soi de manière qu’elle touche la hanche droite
  11. Poser la main droite dans le bas du dos (à droite)
  12. Poser la main gauche dans le bas du dos (à gauche)
  13. Faire onduler le bassin sur 3 temps
  14. Sauter sur place d’un quart de tour à droite

En même temps que l’on fait l’ensemble de ces mouvements, les danseurs effectuent un changement d’appui du pied droit au pied gauche avec un léger déhanché (on piétine sur place à la manière d’un mérengué mais en léger écart). Lorsqu’on a atteint la dernière étape, on recommence au début. Pour une description plus illustrée de cet enchaînement, référez-vous à la page correspondante d’UltraDanse.com qui ne devrait pas tarder à la mettre en ligne d’après mes informations.

Mais alors d’où vient donc cet enchaînement ? Fidèle à mon principe de vérification de mes informations, j’ai enquêté pour vous… En réalité, je n’ai pas eu besoin d’aller très loin. Le visionnage du clip de Los Del Mar où l’on trouve une version très proche de celle que je viens de détailler (mains à angle droit sur les premiers mouvements, mouvements des coudes au lieu des ondulations du bassin de la fin, etc.). Il semble que ce soit donc une version légèrement simplifiée de cet enchaînement qui soit resté dans les mémoires et, qui plus est, associé au nom de Mia Frye. Il est amusant de constater que dans le clip de Los del Mar, on peut voir une incrustation vidéo où des vacanciers en maillot de bain dansent la Macarena, mais c’est visiblement la version d’origine (temps dédoublés). Finalement, on ne peut que constater que c’est la chorégraphie du clip de Los del Rio qui subsiste, mais sur la rythmique du clip de Los del Mar… D’ailleurs, il y a une bonne idée dans ce clip concurrent de l’original en le fait de danser la Macarena à deux (la femme devant l’homme comme dans l’image arrêtée ci-contre). À ne pas faire avec un/une inconnu(e).

La Macarena est devenue un classique de la danse à tel point que les personnes ne sachant pas spécialement danser parlent souvent de « chorégraphie du type Macarena » pour faire référence à une danse de l’été ou une danse en ligne. D’ailleurs, on peut se demander si la chorégraphie de la Macarena n’aurait pas influencé la tecktonik (ou electro dance) dont certains mouvements ressemblent étrangement (le « peigne en arrière » par exemple). Qui aurait dit qu’il y avait tant de choses à dire sur une « simple danse de l’été » ? Pour finir, je vous laisse méditer sur cette publicité pour une bière qui a trouvé une autre origine aux mouvements de la Macarena.

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Claquettes ou tap dance

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Dans le domaine des danses en couple, il est une discipline qui est souvent associée aux traditionnels foxtrot, lindy hop ou autres danses pratiquées sur du jazz. Je fais référence ici à ce que beaucoup appellent « les claquettes » et que d’autres préfèrent voir appeler « la danse à claquettes », traduction directe de son nom en anglais « tap dance ». Car « faire des claquettes », ce n’est pas simplement faire de petits sons avec ses pieds, c’est plutôt mêler danse et percussions. C’est ce que je vous propose de découvrir aujourd’hui…

La danse à claquettes est issue de plusieurs pratiques allant du « clogging » anglais (sorte de gigue dansée en sabots à l’origine) aux danses et rythmes africains en passant par la danse traditionnelle irlandaise. Que ce soit du côté des origines européennes ou de celui des origines africaines, on retrouve un point commun dans le fait que les gens accompagnaient leur travail du son de leurs pieds frappés au sol. Bien sûr, entre ces cultures, les rythmes sont différents et les traditions aussi. C’est cela qui a initié la diversité des pas que nous connaissons aujourd’hui. La rencontre s’est opérée à la fin du XIXe siècle et au début des années 1900 aux États-Unis avec, d’un côté, les ouvriers émigrants venant d’Angleterre et d’Irlande et, de l’autre côté, les esclaves africains.

Les mouvements qui scandaient le travail passèrent de la vie à la scène par le biais des « Minstrel Shows » dont j’ai parlé dans un autre article de ce blog. Les Blancs grimés en Noirs faisaient le spectacle en imitant ces derniers. Jusque dans les années 1920, les frappes sont faites grâce à des semelles en bois en deux parties (sur des chaussures de cuir), mais devant l’usure rapide de celles-ci, on les remplaça définitivement par des plaques de métal, les fers (ou taps en anglais), qui pour autant sont de nos jours en aluminium. Pour l’anecdote, notez que les moins fortunés fixaient des capsules de bouteille sous leurs chaussures à la place de vrais fers. Les spectacles de danse à claquettes devinrent de plus en plus techniques et étonnants grâce au Vaudeville et à la concurrence entre les diverses salles de spectacle aux USA. Le mélange des styles de numéros (comiques, acrobaties, danseurs de caractère, etc.) contribua à l’enrichissement des numéros de danse à claquettes par l’importation de nouveaux mouvements de plus en plus spectaculaires et innovants. À cette époque, il était courant de se faire chorégraphier un numéro de claquettes par un professionnel et de l’apprendre en cours particuliers avant de le produire en spectacle. De cette période, on connaît de nombreux artistes comme Bill Robinson, Honi Coles, John Bubbles, les Nicholas Brothers, etc.

La danse à claquettes devint de plus en plus populaire avec les comédies musicales hollywoodiennes à partir des années 30 où des vedettes comme Fred Astaire, Ginger Rogers, Gene Kelly, Ann Miller, Eleanor Powell ou Shirley Temple firent de cette discipline une part essentielle du rêve américain. Ils y ajoutèrent des pas de danse classique et la musique jazz était omniprésente dans leurs numéros qui comportaient aussi du chant. De nombreux films cultes de cet âge d’or sont connus de tous comme « Top hat » (1935)Acheter sur Amazon, « Broadway Melody of 1940 »Acheter sur Amazon, « Chantons sous la pluie » (1952)Acheter sur Amazon, etc.

Comme d’autres manières de danser de l’époque swing, la danse à claquettes passa de mode avec la déferlante du rock’n’roll après la Seconde Guerre mondiale. Mais le renouveau est là de nos jours grâce au retour de l’attrait du public pour les danses traditionnelles et folkloriques (comme les danses irlandaises) ainsi que pour le jazz et le swing. Je dirais, pour simplifier, qu’on parle aujourd’hui de deux principales catégories dans la pratique de la danse à claquettes :

  • les claquettes irlandaises où l’essentiel de l’attention du danseur est portée sur les frappes et que l’on retrouve dans des spectacles comme « Lord of the Dance »Acheter sur Amazon ;
  • les claquettes américaines (au début correspondant au style Broadway et comédies musicales où les postures et déplacements de tout le corps sont importants) qui, de nos jours, correspondent à tout ce qui n’est pas inclus dans les claquettes irlandaises.

Il est intéressant de noter des pratiques spécifiques de la danse à claquettes comme le soft shoe, pratique légère, classe et dansée en chaussures sans fers (le sol est alors parsemé de sable pour qu’il y ait tout de même du bruit…) ou encore le hoofing aux frappes très intenses et complexes. Aux danseurs à claquettes, il est aussi possible d’associer, pour être complet, les percussionnistes qui font feu de tout bois… ou plutôt bruit de tout support comme les artistes du spectacle « Stomp »Acheter sur Amazon puisqu’ils incorporent des claquettes dans leurs numéros. Plus récemment, des artistes comme Gregory Hines ou Savion Glover (photo ci-contre) ont continué ou continuent de faire rêver le public américain (et les autres !) par leur dextérité et de faire évoluer la discipline. Ce dernier fait en particulier partie de ceux qui mêlent les rythmiques hip-hop à la pratique de la danse à claquettes. On voit aussi des innovations en terme de spectacle avec les « Tap Dogs », ces Australiens qui sont loin du sage costume et du chapeau melon de Bill « Bojangles » Robinson dans les années 30… Ce danseur à claquettes a marqué l’histoire à tel point que le « Tap Dance Day » (la journée de la danse à claquettes) est fêté aux États-Unis depuis 1989 le jour de son anniversaire, le 25 mai.

Les claquettes sont liées aux danses en couple de plusieurs manières. Tout d’abord, nous avons tous en tête l’image de Fred Astaire dansant avec ses partenaires (voir un autre de mes billets sur le sujet dans ce blog) à Hollywood où, entre deux refrains et trois pas de foxtrot, les danseurs s’adonnent à des rythmiques qui semblent sortir naturellement de leurs semelles. On a même pu assister à des claquettes sur patins à roulettes dans « Shall we dance »Acheter sur Amazon (« L’Entreprenant Monsieur Petrov » en version française et non le film avec Richard Gere que je vous présente dans un autre article). Donc voilà, la danse à claquettes est particulièrement esthétique en couple, il est simplement dommage que cette manière de les pratiquer ait un peu été oubliée de nos jours. Mais il est à noter que la danse à claquettes continue de se développer non seulement sous l’impulsion d’Américains, mais aussi d’Européens dont certains ont acquis une réputation excellente. Second argument, plus technique, le développement des qualités de danseur à claquettes permet d’améliorer son équilibre, son aisance et ses jeux de jambes dans les danses à deux comme le rock, le lindy hop,… et même la valse. Je l’ai moi-même vérifié dans ma manière de danser les danses à deux au fil de mon apprentissage de la danse à claquettes et je recommande à tout le monde de faire au moins une année (voire deux) de claquettes pour cela. Et (qui sait ?) peut-être ne pourrez-vous plus vous en passer, tout comme le petit manchot empereur du film d’animation « Happy Feet » (2005)Acheter sur Amazon qui ne peut s’empêcher de faire naturellement des claquettes depuis sa naissance…

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Petite histoire du cakewalk

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Les débuts du jazz ont été marqués par diverses influences entre les instruments de musique européens et les chants issus du continent africain. Il faut considérer que l’on trouve les origines du jazz dans la culture africaine des esclaves qui étaient « importés » par bateaux entiers sur le continent américain. On confiait aux esclaves noirs africains les tâches les plus difficiles et ces derniers se donnaient du courage en chantant des hymnes de leur patrie d’origine de l’autre côté de l’Océan Atlantique. De leur côté, leurs maîtres blancs avaient aussi des origines transocéaniques puisque leurs ancêtres provenaient pour la plupart de la vieille Europe. La culture des Blancs tournait donc autour de la musique classique et des rythmes des traditions européennes où l’on dansait volontiers la polka, la valse, la scottish, le quadrille ou encore le cotillon.

Les esclaves noirs sont petit à petit entrés dans les maisons des maîtres blancs puisqu’il fallait bien faire les diverses tâches ménagères comme le ménage, la cuisine, le service, etc. Ainsi les Afro-américains ont-ils pu regarder avec curiosité et amusement les loisirs de leurs patrons. En particulier, lorsqu’au son d’un piano, les jeunes gens dansaient à l’européenne, les serviteurs trouvaient cela bien curieux. Lorsque les maîtres avaient tourné le dos, certains des serviteurs se mettaient à les imiter pour s’amuser. Or, ils n’avaient pas cette culture européenne de leurs maîtres et faisaient des gestes peu élégants, sans compter qu’ils exagéraient souvent les mouvements pour faire éclater de rire leurs collègues.

Un jour, des maîtres surprirent leurs serviteurs en pleine séance d’une danse comique qui ressemblait un peu à leurs propres danses. Ils trouvèrent cela très amusant (ne saisissant probablement pas qu’ils étaient volontairement caricaturés) et ils demandèrent aux danseurs de recommencer. Ces derniers se firent prier pour retrouver le naturel qu’ils avaient lorsque les maîtres étaient absents. Afin de les motiver, on leur mit en avant le fait que s’ils se donnaient à fond dans la danse, on leur donnerait une part de gâteau. Ce type de gâteau étant réservé aux Blancs, les Noirs n’hésitèrent plus et firent cette danse à leur manière pour obtenir la récompense. Comme leur danse ressemblait plus à une marche stylisée qu’à une vraie danse, on appela cela le cakewalk ou, en français, la marche du gâteau. Voici l’un des rares films d’époque où l’on peut voir danser le cakewalk (ici d’une manière burlesque).

Le cakewalk est une danse qui se fait généralement sur du ragtime ou des morceaux de piano stride. Pour vous donner une idée, c’est un peu le genre de morceau de piano que l’on mettait pour sonoriser les films muets des débuts du cinéma. D’ailleurs à cette époque, le pianiste était dans la salle de cinéma et jouait l’accompagnement en direct tandis que le film défilait. Mais je digresse… Le cakewalk n’a pas (ou peu) été dansé par les Américains blancs et, au début du XXe siècle, il a initié les premières danses sur des musiques qui ont évolué pour donner le jazz. Dans les années 1920, alors que le lindy hop n’existait pas encore, des pas de cakewalk étaient insérés dans des danses comme le breakaway (comme sortie de piste de danse par exemple). Dans le court métrage « After Seben », on voit Shorty George (oui, oui, le Shorty George qui a inventé la figure jazz du même nom) qui sort de scène de cette manière (image arrêtée ci-contre). Le cakewalk fait donc partie des lointains ancêtres qui ont évolué ou influencé la danse des Afro-Américains pour donner le lindy hop que nous dansons encore aujourd’hui sur la musique swing. Mais de nos jours, il n’y a plus besoin de motiver les danseurs par une part de gâteau (en dehors de certains pique-assiettes spécialistes des soirées dansantes à buffet gratuit !) et les Noirs dansent aussi très bien avec les Blancs qui, à présent, essayent d’imiter leurs mouvements de danse avec plus ou moins de bonheur en lindy hop, salsa, ragga, danse africaine, etc. Ci-dessous un exemple qui ne me semble pas si mauvais que cela dans le domaine de la danse africaine.

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Le swing de la côte Ouest (West Coast Swing)

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Il est temps que je vous parle un peu du swing de la côte Ouest. Ce n’est pas un swing issu de Brest ou Bordeaux, mais c’est le west coast swing, venant des USA. On l’écrit aussi WCS ou WC swing (mais rien à voir avec le fait de danser au petit coin ). Décidément, mes derniers articles concernent beaucoup les danses swing, il va falloir que j’aborde d’autres thèmes pour satisfaire tous les goûts… Mais revenons au west coast swing. Comme son nom le suggère, il s’est développé sur la côte ouest des États-Unis dans les années 40 à partir du lindy hop (qui, lui, est parti de New York).

Pour tout vous dire, c’est moi qui ai écrit l’article présentant le west coast swing sur UltraDanse.com le 9 juin 2001. Cela fait donc plus de huit ans. J’avais pris mon premier cours de West coast swing l’année précédente et cette danse m’avait intrigué. J’y ai vu tout d’abord une danse en 6 temps très fluide et sexy. Sans doute parce qu’elle se danse de préférence sur de la musique lente et particulièrement du blues. Comme tous les stagiaires danseurs de rock présents, le plus perturbant a sans doute été le fait de devoir donner un guidage dès le compte « 1 » des différentes figures. Je me souviens avoir vu un pas de base stationnaire, puis le push break, puis le break Elvis ainsi que quelques autres figures. En 2000, les cours de WC swing étaient rares en France et ils le sont restés jusque ces, disons…, trois dernières années.

J’avoue avoir peu pratiqué mes figures de WC swing en tant que telles durant les années suivantes faute de partenaires sachant danser cette danse. En revanche, j’y avais vu des variations originales pour agrémenter mon rock. J’ai donc parsemé mes figures de rock de petites références au WC swing surtout sur les musiques les plus lentes comme le blues ou les musiques se dansant habituellement en rock aux tempos convenant à des débutants mais où les avancés sont susceptibles de s’ennuyer un peu. Un petit pas croisé par ici, un guidage anticipé sur le « 1 » par là et voilà !

À présent que le WC swing se développe en France, je suis naturellement le mouvement d’une manière plus affirmée. Dans le Sud-Ouest de la France, cela fait environ 2 ans que le west coast swing marche bien. En faisant une rapide comparaison par rapport à il y a 8 ans, je remarque que la musique a évolué. Bien sûr, les musiques que nous entendons à la radio ont aussi évolué et on ne peut pas en permanence danser sur les mêmes « vieux » disques. Le R’n’B (parfois à la sauce latino) a envahi les ondes ainsi que les soirées rock/swing/WC swing. Je reste toutefois circonspect quant à l’utilisation de n’importe quelle musique pour danser le WC swing. Le blues est parfait, le disco-funk n’est pas mal, le R’n’B pourquoi pas, mais pas tous les morceaux. Même si la base de la danse est en 6 temps comme le rock, il ne faut pas rester hermétique à une certaine sensibilité musicale. Une rythmique binaire marquée ne suffit pas pour danser le WC swing. Le week-end dernier, j’ai participé à une soirée dansante où quelques morceaux étaient clairement destinés aux danseurs de WCS. L’un de ces titres aurait clairement dû être dansé en rumba (on pouvait deviner la présence de la clave latino par intermittence), mais tout le monde dansait le WC swing. Peut-être n’y avait-il pas d’amateurs de rumba ? Dans doute ce facteur a-t-il pu jouer un rôle.

En dehors de toutes ces réflexions plutôt personnelles (mais je suis sûr qu’elles peuvent intéresser quelques-uns d’entre vous), mon idée était d’établir un petit constat personnel sur l’évolution du WC Swing en France. Pour vous donner, une idée plus visuelle de ce qu’est le west coast swing, voici une petite vidéo. Il s’agit de Benji Schwimmer (gagnant de la troisième saison de l’émission « So You Think You Can Dance ») et de sa cousine, Heidi Groskreutz (qui a aussi brillamment participé à l’émission) en 2005. Je vous rassure, on y voit très peu de pas de base comme c’est le cas dans de nombreuses démonstrations et spectacles. Rappelons-le, l’objectif est d’épater les spectateurs et de les divertir le mieux possible.

Ceux qui découvrent cette danse y trouveront peut-être quelque similitudes avec la salsa portoricaine (que je préfère aussi danser sur des tempos lents). Les deux danses partagent en effet la même conception de la ligne de danse. Ceux qui connaissent un peu le monde du WC swing et celui de la salsa portoricaine pourront d’ailleurs aussi faire un petit rapprochement entre deux enseignants : d’un côté John Lindo pour le west coast swing et de l’autre côté (Super) Mario Hazarika pour la salsa portoricaine (je vous ai fait un petit montage ci-dessous pour illustrer mon propos). Si vous cherchez un peu sur Internet, vous trouverez des vidéos de démonstrations où ces deux gabarits démontrent que lorsqu’on est baraqué, la danse peut très bien être spectaculaire et agréable à regarder.

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Portrait swing du lion

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Cela faisait un certain temps que je n’avais pas présenté de morceau de musique dans ce blog. Il s’agit évidemment d’un titre sur lequel on danse. Et pour pouvoir vous raconter quelques anecdotes sur le sujet, j’ai choisi « Portrait of the Lion » de Duke Ellington. C’est un morceau swing (et non une chanson comme les précédents titres que j’ai abordés ici) sur lequel j’ai longtemps répété un enchaînement chorégraphique au sein d’une troupe professionnelle il y a quelques années et cela m’a fait tout drôle de le réécouter récemment.

Alors qu’est-ce donc que cette histoire de lion qu’on prend en photo ? En réalité, il n’y a ni animal à crinière, ni appareil photographique dans l’histoire. Lorsque Duke Ellington compose « Portrait of the Lion » en 1939, il pense en réalité à un de ses pianistes modèles : Willie Smith, surnommé « le Lion » pour rappeler sa bravoure durant la Première Guerre mondiale. Ce dernier est l’un des maîtres du piano stride (bien souvent identifiable par son inséparable chapeau melon et son inamovible cigare) dont Duke Ellington a beaucoup appris au point de lui dédier non pas un portrait musical, mais deux puisqu’il composa plus tard « Second Portrait of the Lion ». Le Lion lui rendit la politesse en 1957 en composant un « Portrait of the Duke ». Si vous vous rappelez bien, je vous avais déjà parlé de Wille « the Lion » Smith il y a quelques mois, dans ce blog, dans un article à propos d’une fameuse photo représentant quasiment tous les grands jazzmen. Willie Smith ressortait du lot… par son absence. C’est lui qui se reposait à côté du groupe alors qu’était prise la photo qui a ensuite été sélectionnée et publiée. La faute à pas de chance…

Le fait est qu’il était très fréquent que les musiciens de jazz se fassent mutuellement des hommages sous la forme de « portraits » musicaux. On vient de le voir entre Duke Ellington et Willie Smith, mais il en existe de nombreux autres comme « The Count » (portrait de Count Basie par Benny Goodman), « Portrait of Django » (portrait de Django Reinhardt par Lucky Thompson) voire même le comble de l’exercice dans « Portrait », le portrait de Charlie Mingus par lui-même… On a même des portraits musicaux de danseurs par des musiciens comme « Bojangles », le portrait de Bill « Bojangles » Robinson (fameux danseur à claquettes) par Duke Ellington ou encore « Taps Miller », le portrait de Marion Joseph « Taps » Miller (danseur à claquettes et trompettiste) par Count Basie.

Alors revenons un peu à notre « Portrait of the Lion » en tant que musique à danser. Il s’agit d’un morceau de swing traditionnellement joué à un tempo de 41 MPM (164 BPM) sur une durée de 2’31 (ce qui est assez court). C’est donc un lindy lent que l’on dansera généralement dessus car la section rythmique marque bien les bounces avec, malgré tout, une grande souplesse. On entend un contraste entre la pulsation régulière de la section rythmique et les irrégularités façon ragtime (qui rappellent le style fétiche de Willie Smith). Tiens, je vais me livrer ici à un petit exercice de « décorticage » de la structure rythmique du morceau. Cela pourra servir à une interprétation dansée la plus appropriée possible.

Je vais ici utiliser quelques termes techniques familiers aux musiciens de jazz (j’aurai peut-être l’occasion de faire un sujet dessus ultérieurement), néanmoins je remplace ensuite ces termes par des mots plus familiers aux danseurs sachant écouter la musique (et là, je passe sur le débat du manque d’écoute musicale dans les cours de danse en couple…). À la base, il faut savoir que la structure de base de ce morceau est de la forme ABAB sans pont. Chaque thème (ABAB) s’étend sur 16 mesures. Il y a une introduction ainsi que deux solos en dehors des parties assurées par l’orchestre tour entier. Voici la structure que l’on peut entendre (point de vue « musical ») :

  1. Introduction au piano (4 mesures)
  2. ABAB (thème) – orchestre (16 mesures)
  3. ABAB (chorus) – orchestre + piano (16 mesures)
  4. ABAB (chorus) – solo de cornet (16 mesures)
  5. ABAB (chorus) – orchestre (16 mesures)
  6. ABAB (chorus) – solo de saxophone alto (16 mesures)
  7. ABAB (thème) – orchestre (16 mesures)

Il peut être intéressant de calquer sur cette description une perception qui parle davantage aux danseurs. Voici ce que je vous propose (point de vue « danse ») :

  1. Introduction au piano (1 phrase = 2 x 8 temps)
  2. Thème 1 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)
  3. Thème 2 – orchestre + piano (4 phrases = 8 x 8 temps)
  4. Thème 3 – cornet (4 phrases = 8 x 8 temps)
  5. Thème 4 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)
  6. Thème 5 – saxophone alto (4 phrases = 8 x 8 temps)
  7. Thème 6 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)

Enfin, je vous mets en lumière quelques points qui peuvent permettre de danser des figures appropriées (à chacun de voir ensuite ce qu’il ressent).

  1. Introduction au piano
    Ici on ne danse pas, on attend la section rythmique de l’orchestre.
  2. Thème 1 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)
    Mise en place de la danse, figures plutôt simples. Il y a des notes un peu plus longues à la fin de la seconde phrase. Il est souhaitable de les marquer par des mouvements comme les slides ou un petit ralenti.
  3. Thème 2 – orchestre + piano (4 phrases = 8 x 8 temps)
    Le piano est mis en évidence ici et il est donc possible d’utiliser sa mélodie de temps en temps pour des rythmiques de jambes.
  4. Thème 3 – cornet (4 phrases = 8 x 8 temps)
    Sur le solo de cornet, il serait dommage de manquer de caler une rythmique de pas sur la mélodie ainsi que des figures correspondantes.
  5. Thème 4 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)
    Tout l’orchestre reprend et la section rythmique est bien audible, on peut donc reprendre des figures plus basiques et « calmer » le jeu.
  6. Thème 5 – saxophone alto (4 phrases = 8 x 8 temps)
    Comme pour le solo de cornet, il est possible de suivre le rythme mélodique de saxo et danser quelques rythmiques ou figures spéciales.
  7. Thème 6 – orchestre (4 phrases = 8 x 8 temps)
    On approche de la fin du morceau, on peut très bien de nouveau reprendre des choses simples pour finir la danse sur une impression sereine. Une petite figure finale comme un léger renversé sur les deux derniers temps pourrait être approprié.

Me voici donc à la fin de cet article mêlant diverses choses, entre culture générale swing et technique en rapport avec la danse. Avec ce petit exercice, j’ai essayé de vous montrer comment on part d’un morceau de musique pour arriver à une danse. Je ne vous ai pas donné d’enchaînement chorégraphique et j’aurais pu décortiquer encore plus, mais je voulais juste ouvrir quelques perspectives à ceux qui n’ont pas encore beaucoup mis en relation la musique et la danse. Ici, l’objectif est aussi de pouvoir improviser librement sur cette musique et, à chaque nouvelle écoute, de découvrir de nouvelles manières d’interpréter les subtilités des musiciens de swing en dansant à deux. J’espère, en tout cas, que cela vous aura donné l’envie d’aller plus loin dans l’écoute et la compréhension des musiques sur lesquelles vous dansez habituellement. Elles recèlent sûrement tout un tas de subtilités que vous ne soupçonniez peut-être pas. Et je ne parle pas que du swing, mais d’autres styles musicaux peuvent vous surprendre.

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L’accordéon et la musette

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J’ai déjà eu l’occasion de le dire dans un article précédent, l’accordéon est l’instrument roi des bals musette. Mais, si l’on regarde la fiche consacrée à l’histoire de la valse musette sur UltraDanse.com, on découvre que musette n’est pas forcément synonyme d’accordéon. J’ai donc décidé aujourd’hui de vous en dire plus sur cette curiosité qui intrigue souvent les danseurs peu au fait de l’histoire.

Au début était la cornemuse, un instrument à vent composé de trois ou quatre tuyaux sortant d’un sac en peau de chèvre ou de mouton que l’on remplit d’air. L’un des tuyaux sert à gonfler le sac à la bouche, un autre est percé de trous comme une flûte et permet au sonneur de faire les différentes notes ; enfin, les autres font une note permanente (on les appelle les bourdons). Ce type d’instrument était déjà connu dans l’Antiquité et, au Moyen-Age, on l’appelait « muse ». Plus tard, les Écossais et les Irlandais l’on appelé « bag-pipe » (« tuyau à sac ») et les Bretons le nomment « biniou » ou « biniou braz » (la grande cornemuse). Comme son nom pourrait le suggérer (mais c’est une mauvaise piste, comme nous allons le voir plus loin), la musette est une petite cornemuse composée de deux tuyaux à trous et d’un tuyau à son unique. Le tuyau dans lequel on souffle dans le cas de la cornemuse n’y existe donc pas et l’entrée de l’air dans le sac de cuir était assurée par un des soufflets que l’artiste plaçait sous ses bras. En Auvergne, patrie des hommes à l’origine des guinguettes parisiennes, cet instrument était également appelé cabrette, rapport au cabri dont on utilisait la peau pour fabrique le sac à air.

Le nom musette provient en réalité du patronyme de son inventeur supposé, Colin Muset, un ménestrel français du XIIIe siècle. L’époque nous dit qu’il n’est pas l’inventeur de la cornemuse, mais simplement de la variante appelée musette. Le point commun entre la musette et l’accordéon est le soufflet qui permet de gérer l’air propulsé dans l’instrument. Mais la ressemblance s’arrête là, car la musette n’est en aucun cas l’ancêtre de l’accordéon. L’accordéon est plus ou moins issu de l’harmonica sous l’impulsion de l’Autrichien Cyrill Demian qui eut l’idée de remplacer le souffle humain par un « souffle » mécanique. Habitant de Vienne et associé à ses deux fils Carl et Guido, ce dernier déposa un brevet en 1829 décrivant un instrument nommé « accordion ». Le brevet le décrit comme consistant « d’une petite boîte avec des hanches de métal et un soufflet qui lui est rattaché de manière à pouvoir être facilement transportée » (traduction personnelle). Suivant un flot constant de brevets autour de cet instrument, divers contributeurs le feront évoluer, dont des Anglais, des Italiens et des Français. L’accordéon a ainsi connu de très nombreuses étapes avant de parvenir au stade de l’instrument que nous connaissons de nos jours.

La fin du XIXe siècle est marquée par une forte rivalité à Paris entre les joueurs de cabrette (les cabrettaires) et les joueurs d’accordéon (les accordéonistes) dans l’animation des bals musette. La rue Lappe est le théâtre de certaines scènes clefs. Les riches sonorités de l’accordéon diatonique tenu par l’Italien Félix Peguri s’opposent à la cabrette classique de l’Auvergnat Antoine Bouscatel (le moustachu représenté un peu plus haut). Peu à peu, l’accordéon remporte le match car les airs qui en sortent sont vifs et très entraînants. En effet, l’accordéon diatonique fait un son différent selon qu’on pousse ou qu’on tire sur le soufflet et confère un style bien particulier aux morceaux joués. Le mot « musette », lui, est resté attaché au style musical associé à l’accordéon, bien que ce dernier ait bien vite été aussi utilisé dans un contexte de jazz. On dit que le mot musette est resté parce que c’est aussi le nom donné au petit sac où l’on rangeait l’accordéon diatonique au début du XIXe siècle. Par la suite, l’accordéon a été mis à toutes les sauces : jazz, pop, rock. Sa variante chromatique permet en effet de jouer les demi-tons en plus des sept notes d’une gamme. Non seulement les grands noms de l’accordéon des années 50 étaient de la partie (Marcel Azzola, Yvette Horner — même relookée par Jean-Paul Gaultier en 91 —, André Verchuren, Aimable, etc.), mais aussi de nouveaux venus plus « rock » dans les années 80 comme les Garçons Bouchers, les Négresses Vertes, Blan Kass et Gérard Blanchard (et ses fameuses grottes de Rocamadour…). On parle alors aussi de « piano à bretelles » pour faire plus moderne car les touches rectangulaires blanches et noires ont fait leur apparition sur l’instrument. Cela dit, en dehors des bals populaires et des bals tango, l’accordéon (quel que soit son type) n’est plus le roi des instruments aujourd’hui. L’informatique et les synthétiseurs sont passés par là.

Bien sûr, parallèlement à tout cela, la danse a, elle aussi, évolué. Je vous laisse en découvrir la manière par vous-mêmes en lisant les quelques pages de présentation de la valse et de la java, que j’ai écrites à l’occasion de mon nouveau livre (dont je vous parlerai un peu dans mon prochain article). Mais pour cela, il vous faudra vous le procurer… Disponibilité prévue la semaine prochaine.

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Le moonwalk de Michael Jackson

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Les statistiques des moteurs de recherche sur Internet (Google, Yahoo, etc.) montrent que la personnalité la plus recherchée sur Internet en ce moment est Michael Jackson, décédé le 25 juin dernier. Son style de danse caractéristique et sa contribution à la danse sont reconnus à l’échelle mondiale, mais l’on retient surtout certains mouvements, dont le fameux moonwalk.

Dans ce mouvement du moonwalk de Michael Jackson, autrement appelé backslide (soit le « glissé arrière » en français), le danseur semble avancer alors qu’il recule en réalité. Tout est donc dans l’illusion tout comme le travail des mimes. Cela rappelle la « marche contre le vent » que le célèbre mime Marceau mettait en avant il y a quelques années, à la différence près que cet exercice classique du mime consiste à rester sur place en donnant l’illusion de lutter contre le vent pour avancer. En réalité, Michael Jackon, lui-même, a admis s’être inspiré de Marcel Marceau pour peaufiner son interprétation du moonwalk. En effet, ce mouvement existait en breakdance bien avant que Michael Jackson ne le popularise et ce dernier n’en est donc pas l’inventeur. En réalité, ce mouvement a même été réalisé bien avant la breakdance puisque sa première apparition filmée date de 1943 dans le film « Cabin In the Sky ». Il y est fait devant Ethel Waters par Bill Bailey qui le danse aussi en 1955 dans le film « Showtime at the Apollo » comme sortie de son numéro de claquettes.

D’autres artistes que Bill Bailey ont aussi réalisé le moonwalk alors que ce mouvement ne portait pas encore ce nom. Citons Cab Calloway (qui faisait plutôt une marche sur place ou un tortillement des jambes à la manière d’Earl « Snakehips » Tucker dès 1932 dans « The Big Broadcast ») ou encore les Nicholas Brothers.

Michael Jackson s’est inspiré de trois gamins-danseurs des rues au début des années 80 (d’après « Moonwalk » son autobiographie bien nommée) et des techniques de mime pour personnaliser son mouvement qu’on a pu découvrir à la télévision en 1983 alors qu’il chantait « Billie Jean » (le mouvement est fait sur le riff de guitare aux 4/5 de la chanson). Si le moonwalk est devenu par la suite une sorte de signature pour Michael Jackson, ce pas n’en a pas moins été repris par d’autres artistes comme James Brown ou encore Debbie Allen (dans l’un des épisodes de la série TV « Fame »). Flashdance a aussi une scène où l’on voit un danseur faire le moonwalk avec un parapluie juste après avoir mimé la marche contre le vent.

Tiens, détaillons un peu la technique de base de ce pas de danse spectaculaire mais pas si difficile que cela à reproduire… Nous allons découper cette figure en plusieurs étapes. Le départ se fait les pieds joints, dos à la direction dans laquelle on souhaite aller.

  1. Lever le pied droit, la pointe vers le sol.
  2. Poser fermement la demi-pointe du pied droit au sol (à peu près au niveau du milieu du pied gauche) et y placer le poids du corps. Conserver le genou droit plié.
  3. Faire glisser le pied gauche en arrière et à plat sur le sol (on prend appui sur le pied droit pour « pousser » de pied gauche en arrière).
  4. Lorsque le pied gauche a parcouru une trentaine de centimètres en arrière du pied droit, arrêter le mouvement et le plier comme si l’on venait d’en poser la demi-pointe sur le sol.
  5. Placer le poids du corps sur le pied gauche et plier le genou gauche tout en tendant la jambe droite.
  6. Faire glisser le pied droit en arrière et à plat sur le sol (on prend appui sur le pied gauche pour « pousser » de pied droit en arrière).
  7. Lorsque le pied droit a parcouru une trentaine de centimètres en arrière du pied gauche, arrêter le mouvement et le plier comme si l’on venait d’en poser la demi-pointe sur le sol.
  8. Placer le poids du corps sur le pied droit et plier le genou droit tout en tendant la jambe gauche.
  9. Reprendre à l’étape numéro 3.
pas du moonwalk

L’illusion est renforcée si ce mouvement se fait sans à-coup et si les deux pieds glissent au sol en alternance à la même vitesse. Des mouvements du haut du corps et des bras peuvent aussi renforcer cette illusion.

En plus du backslide, les danseurs de hip-hop font aussi une figure nommée le moonwalk, mais elle est réalisée d’une manière circulaire (d’où la référence à la lune : moon+walk=marche lunaire). Ce pas fait partie d’un ensemble de mouvements regroupés sous la dénomination glides ou floats avec le sidewalk ou le kangaroo walk (backwalk en courant). Dans les années 90, ces mouvements ont été intégrés dans le style de danse hip-hop appelé liquid pop où les danseurs miment le déplacement d’un fluide d’énergie dans le corps et ses effets.

On le voit, il y a bien des choses à dire sur un simple mouvement qui, s’il n’y avait pas eu Michael Jackson, n’aurait probablement pas eu autant d’adeptes. Depuis le décès de ce dernier, on ne compte plus le nombre de personnes qui ont décidé d’apprendre à faire le moonwalk à sa manière et cela en hommage à leur idole.

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